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Face à l’hégémonie de Google et Facebook sur le marché publicitaire, l’idée d’une alliance des éditeurs sur la data fait son chemin. En première ligne, les groupes Les Echos et Lagardère Active.

Plus de 30 millions d’utilisateurs actifs pour Facebook en France, près de 40 millions de visiteurs uniques chaque mois pour Google: des chiffres astronomiques qui offrent aux Gafa la base de données la plus large - et très certainement la plus fine - du marché, en France comme ailleurs. Pour les médias, difficile de rivaliser: le groupe Les Echos-Le Parisien revendique plus de 20 millions de profils qualifiés, Prisma Media 23 millions. Seul Le Figaro-CCM Benchmark et ses 50 millions de profils qualifiés revendiqués joue dans la même catégorie.

«Ces dix dernières années, la presse a perdu deux milliards d’euros de recettes publicitaires, qui sont passés directement dans les poches de Facebook et Google. Dans un marché où les achats médias passent de plus en plus par de l’audience planning, la data est clé. Et si la presse est riche en matière de data, il lui manque du volume pour peser dans les choix des annonceurs et de leurs agences», insiste Stéphane Bodier, président de l’ACPM.

C’est dans cette logique que les groupes Les Echos-Le Parisien et Lagardère Active ont annoncé, début septembre, une alliance dans le domaine de la data science, ouverte à d’autres éditeurs. «Nous sommes favorables à la constitution d’une seule plateforme de traitement des données», avait précisé début octobre Denis Olivennes, patron de Lagardère Active, appelant à ne pas reproduire l'erreur faite sur le programmatique, avec la constitution de deux plateformes concurrentes, La Place Media et Audience Square.

Vers une DMP commune?

Depuis, les voix en faveur d’un rapprochement des éditeurs sur la data se multiplient. «Il serait pertinent de créer des alliances autour de la data pour proposer au marché publicitaire des solutions encore plus efficaces, basées sur les données de plusieurs groupes médias», indiquait à Stratégies le patron de Prisma Media, Rolf Heinz, fin septembre.

«Une action concertée pourrait permettre aux éditeurs d’obtenir des possibilités de ciblage et de segmentation plus importantes, explique Alain Lévy, PDG de Weborama. Personne ne dispose d’un capital data assez important pour être autosuffisant, d’où le besoin de faire appel à des données tierces afin d'offrir une grille de lecture supplémentaire aux données dont on dispose, mais aussi pour atteindre une couverture supplémentaire.»

Reste à définir la forme que pourrait prendre une telle alliance. Faut-il constituer une super-DMP (data management platform), qui agrégerait les données de tous les acteurs? «Il convient de tenir compte des solutions déjà mises en place, d’où l’idée, peut-être, d’une DMP chapeau», avance Alain Lévy. Autre problème à résoudre, selon Pierre Calmard, président d'I-Prospect (Dentsu Aegis), «la clé de répartition des revenus entre les éditeurs, en fonction de la qualité supposée de leurs datas».

En Allemagne et en Israël, de telles alliances ont déjà vu le jour. En France, les prochains mois s’annoncent décisifs. «Plus il y a de données, plus on est fort. Et à deux, on est toujours plus forts que tout seul», rappelle Alain Lévy. Une DMP média unique n’est peut-être pas pour demain.

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