Presse
Erin Doherty, la nouvelle directrice de la rédaction d'Elle en était pigiste il y a plus de quinze ans. Parcours d’une quadra, bosseuse impénitente, passionnée par la presse depuis l’adolescence et obsédée par l’envie d’être utile à sa lectrice.

Ce qui frappe d’entrée chez cette femme, que l’on rencontre dans son bureau à Elle, à Levallois-Perret, c’est le mélange de timidité et de détermination qui l’anime. Toute de cuir noire vêtue, ceinturée et chaussée, elle semble pourtant hésitante dans ses mouvements. Le photographe ne cessera de vouloir chasser «la mélancolie» de ses yeux verts. «Depuis toujours, on me dit souvent que j’ai le regard triste», regrette-t-elle.

Sujets malins

Elevée par des universitaires bobos américains (son père, docteur en philosophie et littérature, a épousé une de ses élèves) émigrés à Paris, l’adolescente dévore la presse anglo-saxonne avec sa sœur, Genève, sans avoir la moindre idée de son avenir. Son oncle avocat lui conseille de faire son droit à Assas. «Je me sentais à côté de moi-même jusqu’à ce que je découvre que ma fac hébergeait un troisième cycle en journalisme» [l'Institut français de presse]. Une révélation. Elle multiplie les stages en presse féminine alors que sa sœur part dix ans à New York travailler chez Condé Nast. «J’ai harcelé la rédactrice en chef des pages “Vie privée” d'Elle pendant deux mois pour qu’elle me reçoive. J’ai fait mon trou l’été en écrivant 25 papiers. J’ai su me rendre indispensable», avoue-t-elle.

Son crédo? Les sujets malins et concernants: copier les looks luxueux des stars en piochant dans des marques accessibles ou convaincre les rédactrices beauté de livrer leurs «vrais» produits préférés. Au bout de sept ans, la pigiste devient rédactrice en chef mode et beauté. Elle y reste six ans. Et devient la valeur montante de la presse féminine. Xavier Romatet, le patron de Condé Nast, la débauche en lui offrant de relifter le magazine Glamour. Elle s’y emploie pendant trois ans.

«Besogneuse»

Revenue dans «sa maison de cœur», reconnaît-elle, elle veut rendre au fleuron de Lagardère Active «son pétillant. C’est un magazine chic et populaire, une amie qui doit donner aux femmes des clés pour avancer dans la vie.» Avec 333 141 exemplaires par semaine, le titre a progressé de 0,73% en 2016 en diffusion France payée, mais a besoin d'un second souffle. C'est sa sœur Genève, nommée directrice artistique, qui va l'aider à l'impulser. «J’ai senti une appréhension de l’équipe, mais j’ai une confiance totale en elle. C’est fluide, rapide et agréable entre nous.» Erin Doherty garde viscéralement la tête froide. «Je trouve terrible quand l’ego s’exprime plus que la mission pour laquelle on a été appelé.» Et qu’importe si elle ferait se dresser les cheveux sur la tête d’un coach en se répétant «besogneuse». Erin Doherty est au service d'Elle, non de sa propre image. Les temps changent.

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