États généraux, les réformes se précisent

"Dégradation plus rapide que prévu», «indicateurs extrêmement rouges», «situation extraordinairement détériorée et qui tend à s'aggraver». Les mots de Frédéric Filloux, conseiller du groupe Schibsted (20 Minutes) ont donné la mesure de l'alarmisme ambiant, à l'ouverture du 16^e congrès de la Fédération nationale de la presse française (FNPF), le 19 novembre, à Lyon. La révolution numérique est pour l'heure destructrice de valeur pour la presse. Comme le rappelle Frédéric Filloux, pour un dollar gagné sur son site Internet, le Washington Post en perd près de 10 sur le papier. Conséquence globale: aux États-Unis, 13200 journalistes ont perdu leur emploi depuis le début de l'année, contre 2200 en 2007. D'où l'urgence, selon Alain Metternich, président de la FNPF, de «donner à la presse les vrais moyens de son développement». Bilan d'étape des travaux en cours.

Aides à la presse

Il s'agit de les réorienter en profondeur. Selon Christine Albanel, ministre de la Culture et de la Communication, il importe de réfléchir à la «façon de redéployer les aides de l'État afin que la presse puisse faire face à de nouveaux besoins, et notamment aux défis des nouvelles technologies». Il s'agirait donc de stimuler l'investissement multimédia des journaux. Par ailleurs, Alain Metternich appelle à des exonérations d'impôt permettant «les dons des lecteurs aux entreprises de presse». Il souhaite aussi un taux de TVA à 2,1% pour les déclinaisons en ligne des journaux (19,6% actuellement). Reste à voir le coût de telles mesures pour le budget de l'État. Les quotidiens nationaux étudient par exemple un abattement fiscal de 50 euros pour tout abonnement à 300 euros. Mais cela reviendrait à 185 millions d'euros pour le Trésor.

Réseau de diffusion

Outre le plan des NMPP qui prévoie la création de 1500 points de vente sur une offre de titres limitée, 150 rayons intégrés en hypermarchés ou le plafonnement des quantités livrées en fonction de l'historique des ventes, Arnaud de Puyfontaine plaide pour la «liberté de commerce» permettant aux kiosquiers d'aller au devant des lecteurs. Il s'agirait notamment de leur donner la possibilité de «gérer une zone de chalandise» afin de riposter aux gratuits, qui distribuent souvent leurs exemplaires sous leur nez, près des flux de transports en commun.

Factures d'impression

Elles sont, selon Francis Morel, directeur général du Figaro, de «30 à 40% supérieures à la moyenne européenne.» Les éditeurs attendent donc que l'État prenne en charge un plan de restructuration des ouvriers du Livre dans les imprimeries.

Statut des journalistes

Le droit d'auteur devra être réformé afin de permettre la production multisupport des journalistes, et non plus seulement la reproduction en ligne des parutions papier. Faut-il miser sur un forfait négocié ou aller jusqu'à une cession du droit à l'entreprise de presse? Nicolas Sarkozy s'est en tout cas montré attaché au droit d'auteur. Par ailleurs, le chef de l'État sera sans doute sensible à la proposition de la FNPF de limiter la clause de cession à des «changements notables dans le caractère ou l'orientation d'un journal» afin de faciliter le rachat des entreprises. Les questions des chartes internes de déontologie et de création d'une autorité indépendante demeurent aussi posées, même si elles ne font pas l'unanimité.

Concentration

Selon Patrick Éveno, chargé de la question aux états généraux, la concentration «n'est plus un véritable problème» à l'heure où «le pluralisme est autant incarné par Internet que par la presse». Il n'y a donc pas lieu, selon lui, de toucher au dispositif anticoncentration existant, contrairement ce que plaide Michel Boyon, président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, qui appelle à la constitution de groupes plurimédias, donc à l'abrogation de la règle limitant la propriété des médias à deux sur trois. Un discours qui se rapproche du souci de Nicolas Sarkozy de créer de vrais «champions nationaux».

Prix de la FNPF

La Fédération a décerné ses trophées de l'innovation au "Talk Orange-Le Figaro" (cross-média), au Journal des entreprises du Télégramme (marketing), à geo.fr (éditorial), à Lyon poche (technologie). Coup de cœur du jury : Le Journal de Millau. Ses deux dauphins : grenews.com et Le Moniteur.