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Un documentaire de France 5 consacré au négociant de matières premières Glencore et à ses pratiques frauduleuses a été diffusé en avant-première sur Télérama, le jour de l’entrée en Bourse du conglomérat.

Dans un hôtel des Îles Vierges britanniques, elle est enregistrée sous le numéro 211 422. Une société écran derrière laquelle se cache Glencore, une compagnie de négoce de matières premières. Son fondateur, le peu scrupuleux Marc Rich, fut un temps condamné outre-Atlantique à trois cent vingt-cinq années de prison pour corruption et évasion fiscale, avant que Bill Clinton ne le gracie, en 2001.

 

L'intrigant - et bien nommé - Rich a trouvé refuge en Suisse, dans l'hospitalier canton de Zoug. Pétrole, gaz, métaux et café... La petite ville de Baar, siège social de Glencore, est devenue l'une des plus grosses plaques tournantes du négoce de matières premières. En 2002, Marc Rich a revendu la société, désormais dirigée par Ivan Glasenberg. Mais les pratiques du conglomérat ne se sont guère moralisées.

 

Zambie: à qui profite le cuivre?, documentaire réalisé par Alice Odiot et Audrey Gallet, revient sur les agissements de Glencore, bien loin du paisible canton de Zoug, dans le district de Mufulira, dans le nord du pays. Via sa filiale Mopani, Glencore y exploite des fonderies et de mines de cuivre.

 

Non seulement, l'activité, extrêmement polluante, est nocive pour les 80 000 habitants alentour, mais elle est l'occasion d'un tour de bonneteau financier dont le conglomérat suisse est friand: Mopani revend à vil prix sa production à Glencore, lui permettant de réaliser des marges colossales. Car le cuivre se vend à prix d'or: son cours s'établit à 10 000 dollars la tonne.

 

Accroche d'actualité

Ce documentaire accablant a été diffusé sur France 5 le 31 mai à 20h35. Mais il a déjà connu une avant-première: le 24 mai, il était diffusé pour 24 heures en streaming sur le site de telerama.fr. Pas totalement un hasard: le 24 mai, Glencore faisait une entrée tonitruante à la Bourse de Londres.

 

C'est Olivier Milot, grand reporter à Télérama, qui a piloté cette diffusion très à-propos. «Nous sommes un hebdomadaire de télévision: il est donc logique de diffuser de plus en plus d'images sur le site», explique le journaliste (qui fut rédacteur en chef de Stratégies). Depuis plusieurs années déjà, la chaîne Arte programme des films avant leur sortie en salles. Pour Télérama, il s'agit de «soutenir le documentaire», souligne Olivier Milot.

 

À la sortie de la projection presse du documentaire sur la Zambie, il est soufflé par la qualité du reportage; il approche alors les équipes de France 5, en arguant de la formidable accroche d'actualité que représente l'entrée de Glencore au London Stock Exchange. Le journaliste en est certain: «La diffusion du documentaire sur telerama.fr ne prendra pas un seul téléspectateur à France 5. Au contraire, elle est génératrice de buzz, à la manière du marketing viral.»

 

Autour du documentaire, Télérama proposait dans ses pages une interview de Daniel Lebègue, ancien banquier et militant anticorruption, sur l'évasion fiscale. «Ce documentaire est dur, le sujet des matières premières n'est pas forcément vendeur, reconnaît Olivier Milot. Mais nous nous trouvons clairement dans une démarche volontariste: nous souhaitons que ce documentaire soit vu du plus grand nombre.»

 

À Télérama, on ne livre pas le nombre de visionnages généré par l'enquête. Sans doute sont-ils satisfaisants, puisque Olivier Milot a déjà repéré un prochain documentaire, qui devrait être diffusé sur le site de Télérama avant l'été. Les œuvres de fiction sont également les bienvenues. Principe inamovible: «Nous ne diffuserons pas de publicité en "preroll"», annonce le journaliste. Le 24 mai, les actions de la pieuvre Glencore s'échangeaient en début de séance aux alentours de 74 centimes suisses, légèrement au-dessous de son prix de lancement de 75 centimes suisses.

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