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Le moteur de recherche, via Google Insight, a été adopté par la Banque d'Angleterre pour optimiser ses analyses et ses prévisions de l'activité économique.

C'est l'une des figures les plus médiatiques de Google. Le «chief economist» Hal Varian a participé à la conception de Google Trends et de Google Insight. Aujourd'hui, indique-t-il à Stratégies, «de nombreuses organisations privées comme Master Card, Visa, Federal Express, UPS et donc Google ont des systèmes de données en temps réel qui sont beaucoup plus précis dans le temps que les systèmes traditionnels utilisés par les banques centrales. Utiliser les données à partir de tels systèmes est de nature à permettre une amélioration de l'analyse de l'activité économique.» La Banque d'Italie et la Banque d'Israël, rappelle-t-il, «utilisent déjà Google Insight depuis quelque temps.»

 

L'annonce, par la Bank of England (BOE), de son recours croissant aux statistiques de recherche de Google pour élaborer ses analyses, voire ses décisions sur les taux d'intérêt, est venue renforcer l'idée d'un pouvoir d'influence majeur du moteur de recherche sur le plan économique et financier.

 

Très peu d'internautes britanniques savent que leurs recherches quotidiennes sont désormais scrutées par les économistes les plus influents. Pourtant, la banque centrale britannique, créée il y a plus de trois cents ans, a bien franchi le Rubicon. Le simple suivi des mots-clés, entrés sur le moteur de recherche et finement analysés à partir d'algorithmes lissant les résultats, permet d'offrir une vue de plus en plus fidèle de ce qui se passe au jour le jour dans le disque dur du pays en matière d'emploi, d'inflation ou de prix de l'immobilier. Les sondeurs économiques a posteriori (questions aux commerçants, aux entrepreneurs) ont du souci à se faire...

 

Algorithmes intelligents

Le prestige et l'autorité de la BOE pourraient provoquer un effet domino, même si la Banque centrale européenne indique de son côté qu'une utilisation de Google n'est pas prévue à court terme. Il est toutefois difficile d'imaginer que ses économistes ne sont pas allés jeter un coup d'œil sur le site, librement accessible.

 

En tapant Google Insight, il est par exemple possible de connaître les mots-clés les plus saisis en Aquitaine sur les trois derniers mois dans le domaine de la beauté et des soins. On constate, sans surprise au vu du retour des beaux jours, une forte augmentation des recherches sur la cellulite, l'épilation ou la recette Dukan par rapport à la période précédente. Recherche millimétrée valable pour toutes les époques (depuis 2004), secteurs et régions du monde. Compilées et algorithmées sur des tendances plus générales, ces données peuvent permettre à terme de définir le niveau d'inflation, et de déterminer en conséquence le taux d'intérêt.

 

Dans l'attente d'un affinement des méthodes, aucun économiste interrogé ne remet en cause la pertinence de cet outil. George Buckley, de Deutsche Bank à Londres, estime par exemple que «tout ce qui peut permettre de fournir plus d'informations à la BOE à propos des tendances actuelles est potentiellement utile.» De là à imaginer qu'un monde toujours plus connecté et des algorithmes toujours plus sophistiqués permettent à terme de définir avec une précision géométrique les tendances d'une économie, comme c'est déjà possible à travers les mots «emploi» ou «agent immobilier», qui sont liés à l'évolution du chômage et du prix des maisons, il n'y a qu'un pas.

 

Du haut de Mountain View, Hal Varian temporise lorsqu'on l'interroge sur l'éventualité d'une économie essentiellement dirigée par une intelligence artificielle, selon les pensées des consommateurs: «Il faudra beaucoup d'imagination pour en arriver là.»

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