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Détrônant RTL, la radio est de nouveau la plus écoutée de France. Jean-Paul Baudecroux, son PDG, se veut confiant. A 66 ans, il n'a pas l'intention de dételer.

Selon les audiences publiées par Médiamétrie pour le deuxième trimestre 2012, NRJ est redevenue la première radio de France, devant RTL, avec une audience cumulée de 11,7%. Jusqu'où espérez-vous emmener la station?

J.-P.B. L'objectif aujourd'hui est d'accroître l'écart avec nos poursuivants et c'est bien parti pour. Je veux que nous soyons à 13%, ce qui ferait 8% de progression par rapport à aujourd'hui, d'ici, j'espère, la rentrée prochaine. Il y a dix ans, nous étions passés une première fois devant RTL, mais il y avait une conjonction d'événements excessivement favorables. RTL avait fait une grosse bêtise en arrêtant les Grosses Têtes et pour la première fois, les 13 ans et plus étaient pris en compte par Médiamétrie dans le sondage, et non plus seulement les 15 ans et plus. Cette fois, nous sommes passés leaders sans aide extérieure, à la loyale. Nous avons terminé la vague avec 6 161 000 auditeurs quotidiens sur NRJ, en progression de plus d'un demi-million d'auditeurs. C'est un résultat très solide puisque toutes les tranches progressent.

 

Sur un an, Nostalgie, Chérie FM, Rire et Chansons sont en baisse. Est-ce la fin des musicales adultes?

J.-P.B. Pas du tout. Nous avons, c'est vrai, mis tous les efforts du groupe sur le vaisseau amiral NRJ mais je suis persuadé que nos trois réseaux adultes vont maintenant "performer". Je suis confiant sur Chérie FM: la mise en place des 38 mornings locaux va être quelque chose de très positif pour l'audience. Pour Nostalgie, il y a eu des erreurs, il faut les assumer. Nous avons voulu trop rajeunir la station, mais c'est derrière nous. Aujourd'hui, nous nous sommes recentrés sur les fondamentaux et je pense que nous en verrons les résultats assez vite.

 

Vous dites avoir augmenté les tarifs publicitaires de NRJ de 30% en un an. Pourtant le chiffre d'affaires radio du groupe a baissé de 5,8% au premier semestre. Peut-on parler de dévalorisation du coût de l'espace?

J.-P.B. Sur NRJ non. Les baisses de tarif, c'est l'arme des faibles. Ce n'est jamais une bonne politique commerciale. Sur les six premiers mois de l'année, NRJ a bien marché mais les radios adultes ont pesé sur le chiffre d'affaires. Nous avons eu un premier semestre catastrophique pour l'ensemble des médias, avec un mois de mai comme je n'en ai jamais vu. Dans l'ensemble, le groupe NRJ ne s'en tire pas trop mal. En revanche, le média radio n'a pas la part de marché publicitaire qu'il devrait avoir. C'est un média écouté par 83% de la population chaque jour, hyperefficace, qui génère du trafic, qui a une relation très affective avec son auditeur. Je ne comprends pas que sa part de marché publicitaire ne soit pas supérieure. C'est très injuste.

 

Début 2012, vous avez commencé à commercialiser les webradios. Que représentent-elles en termes de recettes?

J.-P.B. Entre 0,3% et 0,5% du chiffre d'affaires généré par la FM. C'est tout petit, mais les revenus explosent. Chaque mois, nous multiplions par cinq ou six le chiffre d'affaires de l'année précédente. Nous avons 200 webradios dans le groupe, qui génèrent 60 millions de sessions par mois, à 70% pour les webradios NRJ. Cela crée des opportunités d'écoute supplémentaires pour nos auditeurs. Cela nous permet aussi de toucher un nouveau public, avec des formats musicaux que nous ne diffusons pas sur l'antenne. Je pense par exemple au rap. Pour les annonceurs, les webradios offrent une affinité particulière avec leur cible.

 

Quel sera le positionnement de la chaîne Chérie HD, lancée le 12 décembre sur la TNT gratuite?

J.-P.B. Chérie HD va être une chaîne grand public, pour toutes les femmes, pas une chaîne élitiste. Ce sera un peu le pendant de Femme actuelle, un magazine puissant, large, qui traite de tout ce qui peut intéresser les femmes. Tous les genres de programmes seront diffusés: magazines, télé-réalité, films, fictions, documentaires... Nous serons une chaîne de divertissement, pas une chaîne d'information. La grille sera présentée fin octobre, début novembre. Nous avons recruté comme directrice des programmes Christine Lentz, qui était la patronne des magazines de M6. Cela va être une très belle chaîne.

 

Votre opposition à la radio numérique terrestre n'est-elle pas contraire à l'esprit qui vous a animé en 1981, lors du lancement des radios FM?

J.-P.B. En 1981, c'était différent, les Français ne disposaient que de cinq radios en tout. La FM a été un succès parce que l'offre était jusque-là très pauvre. A partir du moment où l'offre est très riche, comme c'est le cas aujourd'hui, la RNT n'apporte rien de spécifique comparé aux coûts de diffusion supplémentaires que nous devrions supporter. Dans toutes les villes il y a au moins dix ou douze radios. C'est quoi la RNT? C'est pour mettre dans le Larzac, en Lozère, où il n'y a peut-être que cinq radios? Comment vont-elles vivre? S'il n'y en a que cinq aujourd'hui, c'est que le marché publicitaire ne permet pas d'en faire vivre plus. Face à la radio sur Internet, la RNT est une technologie qui arrive trop tard, c'est obsolète.

 

Comment voyez-vous l'avenir? Envisagez-vous de prendre votre retraite?

J.-P.B. Je m'occupe déjà moins de l'opérationnel. Pour ça, j'ai une équipe, menée par Maryam Salehi. A mon âge [66 ans], j'ai envie de faire des choses qui m'amusent, de développer de nouveaux produits, comme les webradios et les nouvelles chaînes de télé. Les webradios, c'est mon bébé. Il y a plusieurs années déjà, malgré des réticences internes – on me disait que je perdrais de l'argent avec ça – j'y croyais. Aujourd'hui, les audiences me donnent raison. C'est pour cela que je crois beaucoup à l'écoute de la radio sur Internet. Non, je n'envisage pas la retraite, tant que je m'amuse.

 

Vous êtes contre la retraite?

J.-P.B. La retraite, c'est très franco-français. Entre les grèves et la retraite, notre pays a une image déplorable à l'étranger, une image de fainéant total. Personnellement, le jour où je m'ennuierai, je ferai autre chose. Autre chose, mais pas la retraite. S'arrêter, c'est la mort. Vous savez que les gens qui vivent le plus vieux au monde sont les habitants de Hongkong, et pourtant c'est une des villes les plus polluées du monde. Pourquoi? Parce qu'ils travaillent jusqu'à leur mort.

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