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Considéré comme la bible des milieux d'affaires anglo-saxons, The Economist est aussi une arme redoutable de la City contre les pays de la zone Euro.

Sur sa couverture du 17 novembre 2012, concue avec l'aide de l'agence CLM-BBDO, des baguettes de pain transformées en explosifs: "La bombe à retardement au cœur de l'Europe", titrait The Economist. Depuis quelques mois, l'hebdo britannique multiplie les unes chocs sur les politiques économiques des principaux pays européens. En août, la chancelière allemande était montrée lisant Comment briser l'Euro. "Tentée, Angela?", interrogeait la une. Le 14 décembre, une allégorie de la Grande-Bretagne se retrouvait sur un siège éjectable pour illustrer un dossier sur les conséquences d'une sortie de l'Union européenne. Le titre? "Goodbye Europe".

 

Créé en 1843 pour lutter contre les lois protectionnistes, The Economist est le journal qu'il est conseillé de lire dans les facs d'économie et les écoles de commerce, de Paris à New York ou Shanghai. Clair, élégant, structuré, "catchy", il fait mieux que résister à la crise. Comme le Financial Times, qui fait partie du même groupe, Pearson, l'hebdomadaire a su s'appuyer sur les deux principaux attributs de la mondialisation - le capitalisme et la langue anglaise - pour se diffuser à 1,5 millions d'exemplaires imprimés et digitaux, dont la moitié aux Etats-Unis. Le 31 mars, il a présenté un résultat d'exploitation annuel record de 67 millions de livres sterling (82 millions d'euros).

 

Mais quelles sont les véritables visées de ce journal? Un certain malaise est perceptible depuis quelques années, essentiellement en Europe. Au-delà des clichés éculés sur la France, pays voisin dont il semble parfois analyser l'économie depuis un salon, The Economist a pris le parti de jouer la livre contre l'euro, la City contre l'Eurozone.

 

Dans ce cadre, la France a droit à un traitement de faveur. Dans une précédente une polémique ("Le déni français"), le détournement d'une toile de Manet était censé démontrer l'oisiveté et l'insouciance d'Hollande et de Sarkozy. Quelques mois auparavant, Nicolas Sarkozy était représenté en président qui rétrécit, à la poursuite d'une Carla Bruni géante. Loin du "Sarkozy le magnifique" d'une autre époque.

 

The Economist sape depuis des années les politiques économiques menées en France, par les gouvernements de droite comme de gauche. "Ce n'est pas uniquement Hollande que nous critiquons, mais ce qu'ont fait tous les gouvernements dans la gestion des finances publiques depuis dix ans", confie la chef du bureau parisien, Sophie Pedder.

 

Par-delà la critique du laxisme budgétaire, qui touche tout autant l'Italie et l'Espagne, The Economist promeut une certaine idée de l'ultracapitalisme. En témoigne l'invraisemblable numéro l'"Amérique surrégulée", sorti il y a quelques mois, qui confirme que l'hebdomadaire a déjà tourné la page de la crise financière de 2008. Laquelle, faut-il le rappeler, fut provoquée par le manque de surveillance des systèmes financiers, et dont l'effondrement des économies occidentales est un dommage collatéral.


"Nous sommes un journal libéral, poursuit Sophie Pedder. C'est pour cela que le journal a été fondé, pour combattre la régulation du marché du blé au milieu du XIXe siècle. C'est la base de la tradition de The Economist. Mais notre réflexion n'est pas différente de celles du FMI ou de l'agence de notation Moody's, par exemple."

 

Une référence qui laisse perplexe, Moody's ayant enlevé le triple A de la France le surlendemain de la fameuse une-dynamite. Pas de deux? Lors du sommet du G20 d'avril 2009 à Londres, le rôle des agences de notation avait pourtant été jugé suffisamment dévastateur pour devoir faire l'objet d'une intense réglementation...

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