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Jean-Michel Aphatie, le Journal du dimanche et Havas sont les cibles collatérales de l'affaire qui a emporté l'ex-ministre du Budget Jérôme Cahuzac.

Quelques heures avant la publication d'un article du Canard enchaîné, Jérôme Cahuzac  a reconnu le 2 avril sur son blog avoir été entraîné dans «la spirale du mensonge». Michel Gonelle, l'ancien maire de Villeneuve-sur-Lot, à l'origine des révélations de Mediapart après l'enregistrement de son ancien opposant, croit sincère celui qui avait démissionné deux semaines auparavant de son poste de ministre du Budget, après l'ouverture d'une information judiciaire pour «blanchiment de fraude fiscale».

Comme il l'a déclaré sur France Info,  ce sont les communicants d'Euro RSCG qui sont, selon lui, responsables de son obstination à mentir: «Il s'y est enfermé volontairement, en remettant son sort à des gourous qui sont indignes dans une démocratie. Ce sont des communicants qui maintenant entourent la plupart des hommes politiques d'importance, en leur disant: "faites-ci", "faites-ça", "prenez cette phrase", "répétez-là sans arrêt", ces éléments de langage qu'on leur donne tout mâchés! Le drame est là et cette affaire va faire de grands ravages dans la vie démocratique française.»

Défense des puissants... ou du journalisme?

Jérôme Cahuzac n'est d'ailleurs pas le seul à faire les frais du triomphe de Mediapart. Jean-Michel Aphatie, journaliste de RTL et de Canal+, a été aussi mis en cause par de nombreux journalistes et par l'humoriste de France Inter Sophia Aram pour son exigence intransigeante de preuves du compte en Suisse alors même qu'un enregistrement téléphonique authentifié par plusieurs témoins avaient été produit. Sur son blog de L'Express, Eric Mettout estime que «Mediapart [a] fait un travail formidable» et que beaucoup de journalistes sont «trop proches des hommes politiques et leur font trop confiance». Ils ont cru davantage à la parole du ministre qu'à celle de leurs confrères.

Jean-Michel Aphatie, qui recevait mercredi 3 avril dans sa matinale le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, pour qu'il dise sa vérité sur le mensonge de Cahuzac, son ministre délégué, s'est défendu sur Télérama.fr par un étrange contre-pied: «J'estime que ma crédibilité n'est absolument pas remise en cause. Quand Le JDD écrit il y a quelques semaines que "la Suisse blanchit Cahuzac", que réclame Mediapart? Des preuves! On m'accuse d'avoir défendu les puissants dans cette affaire, alors que j'ai défendu une conception du journalisme.»

Jean-Michel Aphatie, qui semble désormais se réclamer de la même exigence journalistique que Mediapart, ne fustige sans doute pas l'instrumentalisation de l'administration fiscale par le ministre de l'Economie dans une opération de contre-feu médiatique. «"Il n'y a aucune place au doute dans la réponse transmise par la Suisse", certifie au JDD l'entourage du ministre de l'Économie», écrivait Le Journal du dimanche dans son édition du 10 février.

Le JDD dans l'orchestration?

Le Journal du dimanche est aussi la cible du site d'information. Le 7 mars, en dénonçant «une campagne médiatique contre Mediapart», c'est notamment à ce journal que pensait son président Edwy Plenel.

Sur la foi d'une source à Bercy, l'article du JDD publié le 10 février par Laurent Valdiguié, et intitulé «Les Suisses blanchissent Cahuzac», soutenait en effet que Jérôme Cahuzac n'avait jamais eu de compte suisse, au moins entre 2006 et 2012. Le jour-même, François Bonnet réagissait dans Mediapart en mettant en cause les liens qui unissent le JDD à une grande agence de communication. «Stéphane Fouks [Havas, ex-Euro RSCG] a ses petites et grandes entrées au Journal du dimanche», pointait le cofondateur du site d'information, en reprochant à son confrère («celui-là même qui voyageait avec le marchand d'armes Ziad Takieddine lorsque ce dernier s'était fait interpeller de retour de Libye avec un sac contenant 1,5 million d'euros en liquide») d'orchestrer la «séquence blanchiment du ministère du Budget».

Havas et «les réseaux»

Havas était également cité dans cet article de Mediapart à travers la conseillère du ministre Marion Bougeard («qui conseillait Liliane Bettencourt dans le scandale des comptes suisses de la milliardaire»). Le 21 mars, Le Nouvel Observateurallait plus loin en expliquant que Jérôme Cahuzac, alors qu'il était encore dans l'opposition et que François Baroin était ministre du Budget, avait épluché les déclarations fiscales de ZiadTakieddine et de Liliane Bettencourt. Et qu'il avait ensuite pris pour l'aider dans sa défense contre Mediapart «les réseaux» de Dominique Strauss-Kahn. A savoir Stéphane Fouks, président d'Euro RSCG Worldwide, et Gilles Finchelstein, ancien conseiller de DSK et de Pierre Moscovici, également à Havas, agence dont est issu Ramzi Khiroun, porte-parole du groupe Lagardère, l'éditeur du JDD.

Le président du directoire de Lagardère Active, Denis Olivennes, ne semble pas non plus très éloigné de cette agence. En 2008, il avait ainsi confié à Euro RSCG une étude sur la maquette du Nouvel Obs dont il était depuis peu le patron.

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