Non-choix ou validation d'une approche prudente? En décidant de ne pas adopter le principe du paiement au compteur via un mur payant ("pay wall"), à l'image du New York Times, Le Monde conforte sa stratégie de déploiement numérique alliant gratuité et espace pour e-abonnés ("freemium").
"On est convaincu qu'on peut atteindre 150 000 à 200 000 abonnés numériques, contre 45 000 aujourd'hui", a souligné Louis Dreyfus, président du directoire du groupe, lors de la présentation de sa nouvelle zone payante, le 5 avril. Proposée à 1 euro le premier mois, puis au tarif inchangé de 15 euros par mois, celle-ci entend apporter «profondeur, analyse, aide à la navigation et deux fois plus de contenus que l'offre gratuite, mais hiérarchisés et sélectionnés», selon Isabelle André, PDG du Monde Interactif. Parmi les innovations, des articles en avant-première, un planisphère de l'actualité ou l'accès aux archives depuis 1944.
Un nouveau JT (pour "journal tactile") adapté à la navigation sur tablettes est attendu à la mi-mai avec des enrichissements comme la vidéo, le portfolio, l'infographie ou... des "effets accordéon" pour donner à l'internaute l'impression qu'il déplie du papier.
Pour être performant sur cette zone, la nouvelle directrice du Monde, Natalie Nougayrède, a présenté une nouvelle rédaction en chef décloisonnée, rapprochée des équipes Web et organisée en fonction des temporalités: Nabil Wakim s'occupe du temps réel; Cécile Prieur et Arnaud Leparmentier du "temps 24h". Objectif: "Que chacun ait pour priorité de produire pour le numérique", comme dit Natalie Nougayrède, et que soit mieux monétisés les articles à forte valeur ajoutée.
Pour autant, "on veut continuer à être très puissant sur le gratuit", a martelé Isabelle André. La zone en accès libre, forte de 2,3 millions de lecteurs par jour, proposera des teasers des principaux articles et une montée en puissance du data journalisme et de la vidéo, qui doit passer de 3 à 10 millions de séquences vues par mois grâce notamment à un partenariat avec l'INA.
Encadré
Partenaire de l'«offshore leaks»
Parmi les contenus payants par excellence, la révélation, le 4 avril par Le Monde, de l'existence de participations de Jean-Jacques Augier (trésorier de la campagne de François Hollande en 2012 et propriétaire de Têtu) dans un paradis fiscal lève le voile sur une enquête internationale baptisée «Offshore leaks». A l'origine de cette affaire, une petite ONG de Washington (ICIJ, International Consortium of Investigative Journalists), qui a décidé de s'associer à 36 médias internationaux, dont Le Monde.
