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Le magazine du Monde a reçu le prix du magazine de l'année, remis le 24 avril par le Syndicat des éditeurs de presse magazine (SEPM) à Paris.

Une simple lettre vaut-elle mieux qu'un long discours? La presse a créé son propre abécédaire: D comme le supplément week-end de La Republicca, T comme l'hebdo stylé du New York Times et, depuis septembre 2011, M comme le magazine du Monde. Aucun hasard dans le choix du caractère gothique. «Lorsque nous discutions du projet avec Louis Dreyfus [président du directoire du Monde] et Erik Israelewicz [le défunt directeur du Monde], nous avions pour modèles ces suppléments étrangers anglo-saxons et italiens, mais aussi El Pais Semanal, titre dominical de El Pais ou encore Die Zeit», raconte sa rédactrice en chef, Marie-Pierre Lannelongue. A l'origine de M, en somme, «un fantasme de presse», résume-t-elle.

Les jurés du prix du magazine de l'année 2013, organisé par le Syndicat des éditeurs de presse magazine (SEPM), ont été conquis : «Une superbe offre de week-end», «du journalisme qui va plus loin», «des couvertures audacieuses»... L'hebdomadaire (DFP 2012 : 246 080 ex.) remporte la récompense suprême, après une finale avec l'alternatif Causette. «Ce féminin comptait de fervents défenseurs, mais assez vite, il s'est formé un consensus autour de M, bel exemple d'extension de marque qui a non seulement trouvé son public mais aussi une économie», souligne Dominique Lévy-Saragossi, directrice générale d'Ipsos France. Le titre a en effet réalisé, fin 2012, un chiffre d'affaires publicitaire de 11,5 millions d'euros, alors que l'ancien supplément du Monde culminait à 3 millions d'euros.

Pour autant, les débuts de M ne furent pas des plus aisés. Si la première couverture de l'hebdomadaire, un portrait ouvragé d'Arnaud Lagardère par Raphaëlle Bacqué et Ariane Chemin, fait parler de lui, le titre «a mis du temps à trouver sa formule», reconnaît Marie-Pierre Lannelongue. «M faisait figure d'ovni, certains ne comprenaient pas le mélange entre séries de mode et actualité», se souvient la rédactrice en chef.

Ni féminin ni news

Mais M c'est aussi un nouveau territoire d'expression pour les journalistes du Monde. Mars 2012: Nicolas Sarkozy entre en campagne, et la rédaction de M a l'idée de faire appel à Philippe Ridet, son correspondant à Rome, bon connaisseur du président sortant: il a suivi, en 2007, la campagne du candidat UMP, et en a tiré un ouvrage savoureux, Le Président et moi. Cinq ans après, M publie Le Président et moi, saison 2. «La question posée par l'article, écrit à la première personne par Philippe Ridet, était: Sarko a-t-il changé?», explique Marie-Pierre Lannelongue. Avec ce papier singulier, vu nulle part ailleurs, nous avons senti que la perception de M avait changé.» Suivent une série d'articles qui, selon l'expression consacrée, «font le buzz»: un portrait de la veuve du patron de l'OM, Margarita-Louis Dreyfus, celui, particulièrement incarné, de Franz-Olivier Giesbert, les enquêtes sur «La vraie vie des Chirac» ou encore l'impossible reformation du groupe Téléphone...

«Petit à petit, nos lecteurs ont compris que nous n'étions ni un féminin ni un news, estime Marie-Pierre Lannelongue. Et nos équipes prennent tellement de plaisir à travailler pour M que cela finit par se traduire par un plaisir de lecture». Un plaisir des yeux, aussi: les choix esthétiques de M ont été salués par le prix du SEPM. «Notre chance, c'est que nous ne sommes pas en kiosque», estime la rédactrice en chef. «J'ai connu des rédactions, chez Elle ou au Nouvel Observateur, où c'était la guerre pour déterminer une “cover”! Avec le directeur artistique Eric Pillault, nous choisissons les unes qui nous semblent les plus originales, les plus fortes, les plus justes, sans nous soucier de savoir si elles plairont au plus grand nombre. Une liberté énorme.»

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