Les véhicules aériens sans pilote ne sont plus réservés à un usage militaire. Les médias occidentaux commencent à s’en emparer.

«Chaîne de télévision recrute reporter. Compétences requises: pilotage de drone.» C'est peut-être ce à quoi ressembleront demain les offres d'emploi dans le secteur du journalisme. Car si les véhicules aériens sans pilote, les drones, étaient jusque-là réservés à un usage militaire, ils gagnent depuis peu le domaine civil, notamment le secteur des médias.

En France, BFM TV est la première chaîne de télévision à avoir diffusé des images filmées par un drone à l'occasion des inondations qui ont frappé le Sud-Ouest de la France. «Depuis plusieurs mois, nous réfléchissions à l'utilisation que nous pouvions faire des drones et nous cherchions un événement prévisible pour tenter une première expérience. Les inondations ont accéléré les choses», explique Hervé Béroud, directeur de la rédaction de la chaîne d'information.

Images plus intimes

Le 19 juin, équipé d'une petite caméra et piloté à distance par la société de production Sky-shoot, le drone a survolé la ville de Lourdes afin de rendre compte de l'étendue des dégâts. Les images ont été diffusées à l'antenne non pas en direct, mais une trentaine de minutes plus tard, expérimentation oblige.

«Nous avions aussi un hélicoptère sur place, qui a pu filmer l'ensemble de la région inondée. En volant beaucoup plus bas, le drone permet de montrer plus précisément les choses. L'image est plus intime. Ce sont deux outils complémentaires», estime Hervé Béroud.

A l'occasion du Tour de France, France 2 diffusera également des images filmées par un drone. Tournées avant le départ de la Grande Boucle, celles-ci permettront aux téléspectateurs d'approcher au plus près les sites et monuments historiques des régions traversées par le peloton. Pas question en revanche d'utiliser un drone pour filmer la course. «C'est impossible pour des problèmes évidents de sécurité. Nous ne pouvons pas risquer la vie des spectateurs», assure Jean-Maurice Ooghe, le réalisateur du Tour.

Faible coût et vide juridique

Autre avantage du drone pour les médias: son faible coût. Les modèles d'entrée de gamme coûtent près de 400 euros. Bien moins cher que la location d'un hélicoptère. Encore faut-il savoir piloter l'engin… «C'est 60% de pilotage, 30% de vidéo et 10% de journalisme», souligne Raphaël Labbé, directeur de l'innovation au groupe Express-Roularta, qui a une mené une expérimentation sur le sujet pendant trois mois. «C'est quand ce pourcentage se sera inversé que nous pourrons vraiment parler de drone journalisme», relativise Eric Mettout, rédacteur en chef du site de L'Express.

Preuve que le sujet des drones est à la mode, une conférence lui était consacrée à l'occasion du sommet annuel du Global Editors Network (GEN), qui s'est tenu à Paris du 19 au 21 juin. «Les drones peuvent nous aider à réduire notre exposition au risque dans les zones de guerre», expliquait Mark Corcoran, journaliste pour la chaîne australienne ABC News.

Rassurer les populations

Illustration en Turquie, où un drone piloté par un particulier a permis la diffusion sur Internet de vidéos montrant les affrontements entre manifestants et forces de l'ordre. Jusqu'à ce que la police n'abatte l'appareil. «Les drones ne remplacent pas les reporters sur le terrain, c'est juste un outil supplémentaire. En revanche, dans des pays comme l'Afghanistan, où la population est traumatisée, il faut faire comprendre aux habitants que les drones en question ne contiennent pas de bombe. C'est compliqué», estime Mark Corcoran.

Sans parler du vide juridique qui entoure l'usage civil des drones et des questions de vie privée qu'ils posent. Le drone journalisme n'en est qu'à ses balbutiements.

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