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Deux reportages de France 2 s'intéressent aux aspects peu glorieux du sport business. Un milieu très opaque et difficile à pénétrer.

Argent sale, corruption, marchés publics truqués, exploitation d'enfants, travail au noir... la parfaite description d'un secteur mafieux... celui du sport ! Coup sur coup, France 2, chaîne autoproclamée «le plus grand terrain de sport», diffuse deux enquêtes sur la face obscure du sport. Mercredi 11 septembre, c'était Cash investigation, sur l'omerta du football business. Le lendemain, c'est le magazine Envoyé spécial qui propose un reportage sur les dessous des chantiers des Jeux olympiques de Sotchi (Russie).

«Oui, France 2 est diffuseur des Jeux cet hiver mais je n'ai eu aucun mot, subi aucune pression de qui que ce soit à France Télévisions quand nous avons réalisé ce reportage», assure Hervé Ghesquière, grand reporter et auteur de «Sotchi: les Jeux à tout prix» où sont dénoncés les coûts astronomiques des travaux réalisés par l'Etat russe, organisateur des JO d'hier: 38 milliards d'euros.

Cash investigation, de son côté, a enquêté sur les réseaux troubles des agents du football qui n'hésitent pas à recruter des enfants de dix ans ou à céder des «parts de joueurs» à des fonds d'investissements, tels des chevaux de course.

 

Un système clos

«C'est le milieu le plus difficile que j'ai eu à pénétrer, explique Martin Boudot, auteur de l'enquête de Cash investigation. Il n'y a ni opposant ni syndicat. Tout le monde profite du système, sauf les supporters.» «Le sport est un monde très opaque, dont on parle peu, car les journalistes spécialisés font de l'entertainment et sont trop tenus par leurs sources», ajoute Hervé Ghesquière.

Un an d'enquête à travers l'Europe a été nécessaire à Martin Boudot. «C'est un système clos, où tout le monde se connait et possède des dossiers sur les autres», confie le journaliste qui n'a pas hésité à poursuivre à pied un agent de joueur qui s'enfuyait. «C'était incroyable, raconte-t-il. Heureusement que j'ai de l'entrainement. Mais mon cameraman n'a pas pu suivre.»

En Russie, Hervé Ghesquière n'a pas reçu d'aide de la part du service de communication des Jeux olympiques de Sotchi, aux abonnés absents depuis six mois. «Ils savaient que l'on était là, mais tout le travail a été réalisé sur place grâce à une consœur, Elena Volochine», indique-t-il.

Les deux reportages mettent en exergue les positions ambiguës des autorités sportives, plutôt réticentes à s'exprimer sur ces sujets. «Jean-Claude Killy était très en colère, explique Hervé Ghesquière. Il n'a clairement ni les moyens ni l'envie d'aller voir ce qui se passe sur les chantiers de Sotchi.» Un entretien qui n'a été possible que grâce à un vieux routier du service des sports de France Télévisions, Jean-René Godart.

Les portes ne s'ouvrent pas plus facilement dans le football. Pour Cash investigation, seul Noël Le Graët, le président de la Fédération française, a répondu aux questions d'Elise Lucet. Equipée d'une oreillette pour bénéficier de l'appui de journalistes «fact checkers», celle-ci pouvait vérifier en temps réel si les affirmations du dirigeant étaient exactes. Sepp Blatter, le président de la Fifa, lui, a délégué son numéro deux.

«Pour approcher Michel Platini, le président de l'UEFA, il a fallu s'incruster dans une conférence de presse», lâche Martin Boudot, décontenancé par la réplique de l'ancien numéro 10: «Quand j'étais consultant, je disais plein de choses. Maintenant que je fais les choses, il y en a que je ne peux pas faire!» Autant dire que la face cachée du sport risque d'être un sujet d'enquête pour plusieurs années.

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