Presse
Alors que Mondadori inquiète ses salariés en France en engageant des négociations exclusives avec Reworld, son voisin de Montrouge, Bayard, réaffirme sa croyance dans l'imprimé. Projet d'hebdomadaire, diversification de ses marques, intégration au kiosque de SFR. Explications de son président Pascal Ruffenach.

Vous aviez annoncé le lancement d’un hebdomadaire fin 2018 avant de le repousser d’un an. Sont-ce les prémices d'un abandon?

Pascal Ruffenach. Pas du tout. Notre réflexion repose sur deux convictions. Le papier a de l’avenir, même si ce n’est pas forcément sous la forme de la presse très grand public et fédératrice des cinquante dernières années. Mieux, il peut enrayer la volatilité des publics digitaux. Nous le constatons avec le supplément week-end de La Croix. Les abonnés 100 % digitaux sont plus volatils (50 % de réabonnement) que ceux qui souscrivent à l’offre digital+hebdo (70 % de réabonnement) alors que les plus fidèles sont les abonnés 100 % papier (90 %). Une alchimie dynamique est à trouver entre le papier et le digital.

Avec quel business model?

Une équation économique tendue, c’est certain. Moins on produit de papier et plus il coûte cher à fabriquer. Les ressources publicitaires en print ont été divisées par deux en dix ans et ne se sont déplacées qu'en partie sur le digital. Et il est nécessaire de mener des investissements dans le digital. Comme de garder des équipes mobilisées, enthousiastes et aussi nombreuses que possible pour donner à lire.

Qu’attendez-vous pour lancer ce projet?

Nous visons l'automne 2019. On teste à la fois l’offre éditoriale et de nouvelles approches marketing. On ne réussira que si l’on trouve une façon d’associer cet hebdo à des relais forts, sorte d’ambassadeurs sur tout le territoire. Et pas seulement via des emailing et des offres commerciales. Nous souhaitons que ce projet d'hebdo, que développent une dizaine de journalistes et auquel participent l’ensemble de nos équipes marketing, ait une dimension de lien social.

Pourquoi vous être associés à Bouygues Telecom pour la campagne print orchestrée par BETC sur le bon usage des écrans chez les jeunes?

Ces sujets de société nous tiennent à cœur comme toutes les entreprises qui pensent sur le long terme et s’adressent aux jeunes générations. Nous avons une responsabilité éducative.

Côté digital, quels sont vos projets?

Nous avons trouvé un accord avec Orange pour la diffusion de la plateforme Bayam. Investir sur le segment a un sens si nous pouvons avoir accès à de larges audiences en France et à l’international. La France représente 5% du marché, les pays de langue anglaise, 50%. Nous avons aussi décidé de tester le kiosque SFR pour La Croix car nous avons besoin de relais d’audience et d’être mis en contact avec le plus grand nombre.

Quel est le secret de la vitalité de votre portefeuille jeunesse?

Peut-être des équipes éditoriales importantes sur lesquelles nous n’avons jamais rogné et le soutien des enseignements, des centres de documentation et des bibliothèques. Magazine jeunesse le plus puissant en Europe, J’aime Lire a une audience de 2,5 millions de lecteurs pour 140 857 ex. en diffusion France payée [DFP] tandis qu’Astrapi affiche une audience de 650 000 personnes pour 70 000 ex en DFP. Et pour coller davantage au tempo des ados, Phosphore (25 205 ex. en DFP) est passé de mensuel à bimensuel en mai dernier et nous avons lancé «Give me 5», avec cinq infos quotidiennes pour les jeunes adultes.  

Notre Temps vient de fêter ses 50 ans. Continuez-vous à vous développer sur le marché des seniors?

Notre Temps demeure le premier mensuel français [739 182 ex en DFP] avec 85 % d’abonnés et environ 130 000 ventes en kiosque. Les seniors sont nos premiers de cordée. Le titre est aussi présent au Canada, aux Pays-Bas et en Allemagne. Le site Notretemps.com touche avec celui de Notrefamille.com une audience de 65 millions d’internautes, avec une moyenne d‘âge de 50/55 ans. Sur la thématique de la santé, nous avons lancé le magazine Tempo Santé il y a un an. En publicité, notre force de prescription se traduit par la croissance de nos revenus grâce à la confiance des annonceurs et le développement de nouveaux secteurs.

Et côté édition jeunesse?

Nous avons, outre Bayard éditions et Milan éditions, deux labels, BD Kids, leader sur le marché de la BD pour les enfants et Tourbillon dont nous avons acquis la totalité du capital en septembre. Nous développons aussi des box enfance autour de la science. Notre chiffre d’affaires dans l’édition, dont l’écosystème édition/distribution/diffusion se porte bien, représente 50 millions d’euros net éditeursur un chiffre d’affaires global de 350 millions. Nos activités en kiosques, qui incluent une cinquantaine de titres dont Pomme d'Api, Okapi, Les Belles Histoires, Toboggan, Wapiti, GEO ado représentent, elles, 50 millions.

Comment définiriez-vous le rôle du groupe?

Nous nous considérons comme un éditeur et un médiateur qui s’intéresse à toutes les générations et à leurs étapes de vie. D'ailleurs, lorsque le groupe France Télévisions fait en novembre une soirée citoyenne où sera abordée la question des abus sexuels, il se tourne vers nous, éditeurs à la fois de La Croix, de presse jeunesse et de Notre Temps.

Et personnellement, quelle est la mission spécifique que vous vous êtes donnée?

Continuer à montrer la créativité de nos projets. Et faire de La Croix, qui ne perd pas d’argent malgré la tourmente de la presse quotidienne, un quotidien encore lu par les générations futures. Ce journal joue un vrai rôle dans la démocratie et il faut qu’il continue de le faire.

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