Presse
La réforme de la distribution de la presse, en passe d’arriver devant l’Assemblée nationale, propose de sauver la garantie de pluralisme qu’apporte la loi de 1947 pour l’information politique et générale. Et d’assurer un libre accès au marché pour les kiosquiers.

La réforme de la distribution de la presse doit encore être votée à l’Assemblée nationale mais elle a passé sans encombre le 22 mai le test du Sénat, à majorité de droite. Il est vrai que Franck Riester, le ministre de la Culture et président d’Agir, avait su trouver les mots : « Aujourd’hui, les objectifs de la loi Bichet demeurent : garantir la pluralité de l’information et l’égalité entre les éditeurs, et de façon indépendante des opinions qu’ils véhiculent. » De cette loi issue du Conseil national de la Résistance, qui régit depuis 1947 la péréquation entre les titres de presse, autrement dit la possibilité pour les publications d’être distribuées partout en France, il reste, selon lui, ce qui est essentiel : la libre circulation des titres dits IPG, d’information politique et générale. Mieux, elle étend aux agrégateurs et aux kiosques numériques les droits d’accès des éditeurs en obligeant les plateformes à la transparence sur les titres mis en avant. En revanche, la réforme entend donner aux marchands de journaux, qui assurent l’interface avec les acheteurs, la liberté de choisir les publications qu’ils reçoivent - hors IPG – et la quantité qu’ils distribuent.

Grands changements

« Si elle est une icône de la République, elle ne doit pas être un totem », a prévenu le ministre. Parmi les grands changements, qui lui ont valu l’essentiel des 54 amendements du Sénat, la mise en concurrence avec un ou des nouveaux opérateurs, prévue à partir du 1er janvier 2023 et les transferts des compétences des instances de régulation de la presse (1) vers l’Arcep. Le premier point a notamment soulevé les oppositions des communistes. Didier Lourdez, secrétaire général du Syndicat du Livre-CGT, craint que l’on se retrouve « dans une situation où lorsque les éditeurs joueront de la concurrence entre Presstalis et MLP, ils auront la possibilité d’aller voir un troisième opérateur pour faire baisser les prix » ; bref que l'on « ajoute de la concurrence à la concurrence » et une liquidation à terme de Presstalis par l’introduction d’un nouvel acteur privé.

Pour le gouvernement, un délai de trois ans et demi est justement accordé à l’opérateur historique pour lui permettre de se restructurer.  La réforme vise à sauver l’entreprise, après l’injection de 90 millions d’euros dans ses comptes l’an dernier, qui lui ont évité la liquidation. Mais l’enjeu reste de taille : si elle devrait gagner quelques millions d’euros en 2019, Presstalis sort d’une perte annuelle de 50 millions d’euros et d’un plan de départs volontaires portant sur 250 salariés. Avec 400 millions de fonds propres négatifs, elle demeure insolvable aux yeux des banques.

6 000 points de vente fermés 

Entre 2007 et 2017, a rappelé le ministre, plus de 1 000 éditeurs de presse ont vu leur volume de vente diminuer de 54 %. Et 6 000 points de vente ont fermé entre 2011 et 2018. L’urgence est donc là. L’intervention de l’Arcep doit permettre d’introduire de la régulation économique en homologuant les barèmes tarifaires et en assumant un pouvoir de sanction. Pour David Assouline, sénateur PS, si l’on peut reconnaître à la réforme le mérite de ne pas rendre les éditeurs-actionnaires des messageries juges et parties, ce n’est pas innocent de confier la régulation à une instance dont le rôle n’est pas d’assurer la liberté de la presse.

Suivez dans Mon Stratégies les thématiques associées.

Vous pouvez sélectionner un tag en cliquant sur le drapeau.