Cinéma
Réunis pour des Rencontres à Dijon, les professionnels du cinéma ont fait entendre leurs doléances en matière de financement et de publicité.

Malgré la future loi sur l'audiovisuel, et la réforme publicitaire qui l'accompagne, les professionnels du cinéma sont inquiets. D'autant que la contribution à l'audiovisuel public, qui permet à la filière de recevoir 60 millions d'euros par an de France Télévisions, est en baisse l'an prochain (de 139 à 138 euros). La publication dans la presse de pistes de travail comme le calcul de la redevance en fonction de la taille du foyer, même démenties par le ministre de la Culture Franck Riester, ajoute à la confusion. « Dans les discours, on sent seulement la volonté de faire des économies. Mais faire des économies, c'est juste faire l'économie de la culture », s'est exclamé le 7 novembre Cédric Klapisch, coprésident des Rencontres cinématographiques de Dijon, lors d'une table ronde organisée par l'ARP, la société civile des auteurs réalisateurs producteurs. Le Centre national du cinéma (CNC) a d'ores et déjà annoncé en octobre un plan d'économies de 15 millions d'euros sur la filière, ce qui a des conséquences sur les subventions accordées à des associations professionnelles du cinéma.

Mauvaise « surprise »

Pour autant, la future loi, qui transpose la directive SMA [Services de médias audiovisuels] a de quoi séduire les cinéastes. Elle prévoit un quota de 30 % d'exposition d'œuvres françaises et européennes sur les plateformes. Et Netflix, qui est amené à financer la création, se prépare à augmenter sa participation à la taxe du Centre national du cinéma en la faisant passer de 2 à 5,15 %, conformément au projet de loi de finances 2020. Par la voix de sa directrice des relations institutionnelles, Marie-Laure Daridan, la plateforme se déclare même tout à fait disposée à respecter le droit moral en France. 

Pas tout à fait, pourtant, de quoi rassurer la filière. Pour résister à la plateformisation du cinéma, Arte France expérimente du replay à 90 jours sur dix films. Une mauvaise « surprise » pour les producteurs. Par ailleurs, la fin de l'arrimage de la redevance à la taxe d'habitation, pour cause de surpression de cet impôt en 2022, fait ressortir des velléités de la part de Bercy de soumettre les budgets de l'audiovisuel public aux lois de finances. Ou comme dit Delphine Ernotte, PDG de France Télévisions, « le projet de loi réaffirme une trajectoire [financière] jusqu'en 2022. Là où il y a une ambiguïté, c'est après : une taxe affectée ou pas, c'est une des conditions de l'indépendance, ce n’est pas un petit sujet ». De quoi faire peser un risque de contrôle politique, même si Aurore Bergé, députée LREM et probable rapporteuse de la loi, s'est dite attachée à Dijon a une taxe « affectée et universelle ».

Effet pervers

Autre point sensible, le décret qui autorise la publicité pour les films à la télévision. Le vice-président de M6, Thomas Valentin, a jugé « inapplicable » le système à double quota de 50 % sur les films d'art et d'essai ou le cinéma français et européen. « L'effet pervers, c'est que cela va favoriser les films américains et défavoriser les films d'auteurs ». Il appelle donc à « toutes les expérimentations » comme un rabais consenti sur les films à petit budget (-60 %), ou à moyen budget (-30 %) quand les gros budgets paieraient plein pot. Pour 50 000 euros, dit-il, la télévision touche 18 fois plus de contacts que le cinéma. Mais Frédéric Brillion, président de l'Union des producteurs de cinéma, rétorque que la TV est moins adaptée que les Gafa pour le ciblage des films, même si la TV adressée, à terme, peut rebattre les cartes. 



 

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