Télévision
Avec l’interruption des tournages, c’est tout un système de fabrication des programmes qui se retrouve exsangue. Les producteurs espèrent se relancer très vite avec des garanties.

C’est tout un symbole qui s’est éclipsé des écrans le 1er mai, jour de la fête du travail : Plus Belle la vie, le feuilleton de France 3, a diffusé son dernier épisode inédit. Depuis le 4 mai, la chaîne ne programme plus que des épisodes déjà vus, avec des intrigues bien connues des fans de la série. L’Union syndicale de la production audiovisuelle (Uspa) a recensé une centaine de tournages à l’arrêt en fiction, documentaires et spectacles vivants. « Cela représente une perte de 100 millions d’euros par mois, constate Thomas Anargyros, président de l’Uspa. À raison de 50 à 100 personnes par tournage, ce sont plusieurs milliers de professionnels qui sont concernés. Sans le chômage partiel, la plus grosse partie se serait retrouvée au tapis. » Au-delà des adhérents de l’Uspa, 200 à 300 tournages suspendus espèrent reprendre à partir du 11 mai.

Code de bonne conduite

Liée à l’actualité, Plus Belle la vie impose une réécriture des scenarii. Mais beaucoup de fictions impliquent de retourner des scènes en retrouvant des lieux et des décors, avec les autorisations nécessaires. Pour permettre aux producteurs TV de redémarrer, l’Uspa préconise un « code de bonne conduite » entre diffuseurs producteurs et agents afin que tous les tournages puissent reprendre. « Mais si on veut relancer la machine, souligne Pascal Rogard, directeur général de la Société civile des auteurs compositeurs dramatiques, le plus urgent est de s’assurer ». Très peu de productions sont en effet couvertes contre le risque pandémique. D’où l’idée d’un fonds de garantie de 50 millions d'euros pris en charge par l’État, les assureurs, les chaînes, les régions voire les producteurs pour assurer un filet de sécurité. Une demande entendue par Emmanuel Macron lors de la présentation de son Plan pour la culture (voir encadré). « Il suffit d’un acteur positif au Covid pour que l’ensemble du tournage se retrouve en quatorzaine », rappelle Thomas Anargyros. 
Le président de l’Uspa chiffre à 150 millions d’euros la perte en 2021, soit 30% de recettes en moins du fait de la crise publicitaire des chaînes. Pour l’empêcher, il suggère de lisser le volume d’activité sur 2020-2021, que les économies prévues par France TV soient fléchées vers la création (Delphine Ernotte, sa PDG, a déjà ajouté 20 millions d’euros aux 420 millions investis) et des dispositifs de crédits d’impôts : non seulement pour les annonceurs investissant dans la publicité mais aussi, au taux unique de 30 %, pour les fictions et documentaires.
De son côté, Pascal Rogard appelle l’État à doter des fonds nécessaires le Centre national du cinéma et de l'image animée, qui ne peut plus compter sur les taxes sur la publicité et les entrées en salles de cinéma. Il faut aussi, estime-t-il, encourager l’investissement des chaînes privées dans les œuvres patrimoniales et conserver France 4. Mais tout dépendra aussi de la loi sur l’audiovisuel qui doit transposer les directives droits d’auteurs et SMA, avec ses obligations de diffusion (30%) et d’investissement (25%) des Gafa. « Ce sont les seuls qui se portent bien », rappelle-t-il. « Si la loi n’est pas votée cette année, il faudra l’intégrer par ordonnances, c’est le seul moyen d’éviter que des dizaines de milliers d’emplois soient perdus », conclut Thomas Anargyros.

Emmanuel Macron promet un plan pour la culture
Très attendu sur le sujet de la culture, Emmanuel Macron a présenté le 6 mai au cours d'une visio-conférence avec des représentants du secteur ses premières orientations pour leur venir en aide dans le cadre d'un «plan pour la culture». Il a ainsi annoncé que les droits des intermittents du spectacle seraient prolongés d'un an, soit jusqu'à fin août 2021, et qu'un fonds d'indemnisation temporaire serait mis en place pour les tournages de séries, téléfilms et films de cinéma qui n'auront pas pu avoir lieu à cause du coronavirus. Concernant l'audiovisuel, il a annoncé que la directive SMA, qui prévoit de soumettre les plateformes étrangères aux obligations de financement de la création française, serait transposée en droit français avant le 1er janvier 2021. Cette obligation fait partie du projet de loi audiovisuel dont l'examen à l'Assemblée a été reporté sine die en raison de la pandémie du Covid-19. Parmi les autres pistes évoquées par Emmanuel Macron, la volonté du chef de l'Etat de lancer un «grand programme de commandes publiques» auprès des différents acteurs du secteur culturel, que ce soit dans le domaine du spectacle vivant, de la littérature ou des arts plastiques.

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