Tribune
Face à l'hégémonie de Facebook et Google sur le marché publicitaire, mais aussi à la fragmentation des audiences, les éditeurs doivent s'affirmer collectivement. Il en va de leur santé financière.

On évoque souvent le décalage entre l’attention portée aux messages publicitaires qui diminue et un paysage médiatique qui devient plus fragmenté et plus complexe. Si ce décalage existe bel et bien, la réalité est autrement plus complexe. Conscient de cela, une étroite collaboration entre les acteurs de l’open internet sera essentielle pour réussir à tirer son épingle du jeu. Si on ne peut pas dire qu’il y ait un désamour de la publicité, force est de constater que les internautes, plus exigeants, sont en quête d’une expérience plus personnalisée, fluide et transparente.

Historiquement, la publicité numérique a toujours fait écho à des usages en pleine démocratisation, en permettant, d’une part, aux consommateurs d'accéder gratuitement à des contenus de qualité et, d’autre part, aux annonceurs de financer ces contenus. Cette démocratisation est constante et se poursuit encore aujourd’hui avec l'évolution des usages. Mais ces évolutions ne s’accompagnent pas uniquement d’effets positifs. En parallèle, les dérives et le manque de transparence sur l’utilisation des données personnelles a polarisé l’attention des consommateurs sur ces problématiques. L’introduction de nouvelles réglementations sur la protection de la vie privée en Europe a conduit récemment au bannissement progressif des cookies tiers. Ensemble, ces éléments ont créé un climat d’incertitude quant à l’avenir de l’identification et de la monétisation.

Dans cet environnement versatile, l’avènement d’une technologie publicitaire ouverte, efficace et transparente est plus que jamais nécessaire. Actuellement, le marché des dépenses publicitaire en ligne est majoritairement contrôlé par Google et Facebook. Cette consolidation s’affirme plus que jamais et nombreux sont ceux à penser que les «walled gardens» sont la réponse à tous les besoins exprimés par les annonceurs. En réalité, la domination du secteur par un, deux ou même trois acteurs n’est dans l’intérêt de personne. Le manque de concurrence dans un écosystème limite non seulement les choix, mais surtout freine l’innovation.

Solutions alternatives

Les spécialistes du marketing et les éditeurs sont non seulement en mesure de répondre aux attentes des annonceurs au même titre que les géants de l’écosystème, mais sont capables d’aller plus loin et de proposer des solutions alternatives. Pour cela, les éditeurs ont plusieurs options à leur disposition, notamment l’adoption d’un modèle d’abonnement. Ce modèle permet à la fois de financer la production de contenu et de collecteur leurs propres données first-party. Cette stratégie présente cependant un risque pour la pérénité de l'accès gratuit (et financé par la publicité) au contenu premium pour les consommateurs, tandis que les annonceurs pourraient se heurter à des restrictions sur l’inventaire mis à leur disposition.

Pour capter l’attention des consommateurs et les détourner des «walled gardens», il faut d’une part que l’équation de l’offre et de la demande soit mieux équilibrée, et d’autre part que les éditeurs s’affirment collectivement. En Europe, des éditeurs indépendants, mais également des regroupements d’éditeurs, travaillent ensemble pour atteindre cet objectif et rétablir cet équilibre. La collaboration entre les différents acteurs du marché est donc essentielle pour garantir une échelle de cibles viable et maintenir les éditeurs en bonne santé financière tout en proposant une solution simple.

L'un des défis majeurs de l’open internet est la fragmentation des audiences. L'attention du spectateur est de plus en plus difficile à capter et à retenir, car les consommateurs accèdent au contenu multimédia sur une myriade d'appareils, passant souvent d'un écran à l'autre de manière fluide au cours de leur journée. Pour capter cette audience, les spécialistes du marketing doivent reconsidérer leurs stratégies de planification, d'achat et de mesure de la publicité. En conséquence, les éditeurs font évoluer leurs modèles de packaging et de vente. La création d’une plateforme unique, qui permettrait aux annonceurs de ne plus se contenter d'acheter l'audience d'un seul éditeur, et aux éditeurs de différents marchés de collaborer, réduit le nombre d'interfaces entre les acheteurs et les audiences qu’ils souhaitent toucher.

A travers le monde, les acteurs se réunissent pour échanger et proposer des alternatives viables aux walled garden. L’industrie est à un tournant majeur et opère un pivot. Une autre voie est donc possible. En tirant bénéfice des avantages du walled garden, de nouveaux acteurs développent des solutions plus transparentes, sûres et innovantes qui ont vocation à devenir des alternatives crédibles.

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