Radio
Avec la nomination de Louis de Raguenel comme adjoint au chef du service politique, la station crée un malaise interne palpable et marque une orientation qui interroge à vingt mois de la Présidentielle.

Le mail d'annulation est tombé le 9 septembre, à 16h22. La conférence de rentrée (en présentiel) d’Europe 1, prévue à 9h30 le lendemain est annulée. La station est pourtant fière de son mercato haut de gamme avec Stéphane Bern, Pascale Clark, Michel Denisot, Julian Bugier, Bertrand Chameroy. Mais c’est le patronyme de Louis de Raguenel qui joue les chamboule-tout. Des syndicats au personnel, toute la station est vent debout contre la nomination de l'ex-rédacteur en chef de Valeurs actuelles âgé de 33 ans au poste laissé vacant par David Doukhan (désormais au Parisien), de chef du service politique. 

Lors d'un vote, 114 personnes (journalistes, techniciens, animateurs) s'y sont opposées et 3 l'ont soutenu, dont Michaël Darmon, selon nos sources. Outre d'avoir été l'un des artisans de la ligne d'ultra-droite de l'hebdomadaire, on lui reproche son passé d'ancien militant UMP et de chargé de la communication de Claude Guéant au ministère de l'Intérieur. « Ce recrutement a été annoncé en catimini aux chefs de service, avec injonction de se taire. Donc sans respect pour un collectif qui travaille beaucoup », renchérit une des stars de l'antenne.

Amertume

Des têtes d’affiche hésitant à se rendre à la conférence, Constance Benqué a préféré éviter tout camouflet. Avec Donat Vidal Revel, le directeur de l'information, elle discute, soutient et nomme Louis de Raguenel, chef du service adjoint, sous la responsabilité de Michaël Darmon, chef de service en titre. De quoi apaiser les esprits ? « Oui », nous soutient un porte-parole. Pas l'avis d'Olivier Samain, délégué du Syndicat national des journalistes (SNJ) : « Je suis consterné de voir que cette décision de nommer un journaliste venant de Valeurs actuelles à la tête du service politique d'Europe 1 n'a pas posé de question. Pour la direction, c'était normal. » 

Officieusement, le malaise est palpable. « Sur la forme, il y a une concession. Mais sur le fond, cela ne change pas grand chose. Cette obstination à ne pas reculer malgré la bronca reste mystérieuse, assure un pillier de la station. Cela laisse beaucoup d'amertume. » Une source syndicale affirme : « Il a été débauché avec l'assentiment de l'actionnaire, soit Arnaud Lagardère ou son conseiller Ramzi Khiroun. Ce n'est pas un problème de personne mais de symbole. Europe 1 est une radio plutôt à droite avec des éditorialistes comme Nicolas Beytout, Catherine Nay, Sonia Mabrouk ou Vincent Hervouët. Mais il s'agit là d'un poste d'encadrement et nous craignions une droitisation de la station. »

Les justifications avancées sur le recrutement de ce journaliste de 33 ans ? Son carnet d'adresses et sa gentillesse. Un peu léger, grogne-t-on. À moins qu'il ne s'agisse de donner un gage à Vincent Bolloré, qu'on dit intéressé par le rachat de la station pour créer un pôle avec CNews. Ou par une volonté stratégique de s'inscrire dans un créneau porteur de CSP+ plus marqué à droite et moins revendiqué par le service public. Reste que le travail d'apaisement d'une équipe laminée par les changements incessants de management depuis quatre ans, et porté par Constance Benqué, en prend un coup. 

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