Audiovisuel
Insaisissable et multiple, le comédien renforce ses liens avec la pub en signant son premier spot comme réalisateur. Un choix en phase avec un personnage qui lutte farouchement contre les étiquettes.

En cette mi-novembre, Paris est au diapason du reconfinement : rues désespérément calmes, commerces fermés, ciel gris et passants masqués. Autant dire que l’arrivée de Frédéric Testot dans le hall du luxueux hôtel Lutetia, déserté par les clients, ne passe pas inaperçue. De retour d’un mois de tournage en Bourgogne pour les besoins d’une production France Télévisions, le comédien est fidèle à son image. Second degré permanent, traits d’humour et poses hilarantes face au photographe, il joue le jeu. Et à part quelques poils blancs parsemant une barbe désormais bien fournie, la verve qui le caractérise façon Omar&Fred semble intacte.

« N’oublie pas que tu es ici en tant que réalisateur de film publicitaire, pas en tant qu’humoriste », le taquine gentiment Cyril Deleye, à la tête d’Anarchie Paris, la société de production avec laquelle l’acteur vient de signer son premier film TV, pour le compte de la marque Cheerz, spécialiste de l’impression photo. Un univers a priori lointain du cinéma, des téléfilms ou du théâtre, dans lesquels le grand public est plus habitué à la voir à l’œuvre depuis une décennie. Mais, en réalité, une finalité logique pour celui qui « baigne dans la pub » depuis son départ de Canal+, comme il le rappelle d’entrée. Que ce soit pour SFR, avec un rôle sur mesure de papa dans la lune, puis Xiaomi, pour qui il a joué le temps d’une opération un youtubeur déjanté, ou plus récemment Burger King, incarnant un commandant de bord au franglais impeccable, le natif de Boulogne-Billancourt a multiplié les collaborations ces trois dernières années.

Terrain de jeu

Autant dire que ce passage derrière la caméra « relève de l’évidence » pour Estelle Pinet, directrice de création chez Saatchi&Saatchi France, à l’origine de la rencontre entre les deux hommes. « À l’époque, nous voulions développer une série de petits films humoristiques pour le compte de notre client SFR. L’idée de Fred Testot comme égérie s’est imposée facilement, on connaissait son travail et c’est quelqu’un de très attachant, en plus de son côté barré », se remémore-t-elle. D’où l’idée de « mettre en scène un père de famille un peu fou qui découvre malgré lui les avantages » de la marque. « À partir de là, nous avions coécrit huit spots, dans lesquels il joue et improvise à merveille. Le fait qu’il ait pris part à l’écriture n’est pas anodin. On sentait poindre cette envie de réalisation », note la directrice de création.

Un choix que le premier intéressé, engagé parallèlement dans divers projets - La Mante saison 2, En passant pécho sur Netflix, le podcast Fred en mode avion… - assume haut et fort. « J’ai toujours adoré la pub. Quand on y réfléchit, c’est un exercice extraordinaire. Il faut raconter une histoire en 30 secondes et même moins. Aujourd’hui, ce métier n’est ni plus ni moins que de l’entertainment, un terrain de jeu et un indicateur de tendances, qui adoptent de plus en plus fréquemment les codes de la fiction », estime celui qui a grandi dans le sud de la Corse, resté son principal port d’attache. Avant de tordre définitivement le cou aux idées reçues. « Je connais plein de réalisateurs qui regardent avec un œil averti les campagnes et notamment les acteurs et les actrices. Les barrières s’effacent entre pub et fiction, d’autant que le besoin de contenus explose », analyse-t-il.

Sensibilité exacerbée

Car s’il y a bien quelque chose qu'exècre Fred Testot, c’est ce besoin viscéral de « mettre les gens dans des cases ». Tout sauf surprenant au regard du parcours du comédien qui, après des débuts en radio chez Fun Radio puis Nova, aura notamment passé 14 ans chez Canal+. « Un très long stage », lâche-t-il, pince-sans-rire, à propos d’une époque bénie où « tout était possible ». Mais ce rejet des a priori qui l'amène à endosser des rôles dramatiques comme dans le thriller TV La Mante (TF1) s’explique aussi par la psychologie du personnage, complexe, hypersensible - on le dit encore marqué par la séparation avec son complice Omar Sy - et dont « l’instinct » reste le fil d’Ariane. « C’est quelqu’un d’unique et de multiple. Unique car il possède un potentiel et un talent immenses, sans même le savoir parfois ! Et multiple car ils sont nombreux dans sa tête, raison pour laquelle cela peut s’entrechoquer et on ne sait plus vraiment à qui on a affaire ni s’il dit vrai. Ce n’est pas étonnant car il a toujours voulu surprendre, sortir des rails. En un mot, dérailler. C’est ce qui l’amuse et ce qui fait sa force », témoigne Bertrand Delaire, coauteur du SAV des émissions, au sujet d’un « grand généreux » et d’un « électron libre » qui continue à se faire un nom propre et à s'affranchir d’un binôme passé aux allures d’étiquette. Une de plus.

Parcours

1997. Rencontre avec Omar Sy alors qu’il travaille chez Radio Nova.

2005. Lancement du SAV des émissions sur Canal+, programme passé à la postérité qui vivra jusqu’en 2012.

2011. Joue dans les comédies françaises Itinéraire bis, de Jean-Luc Perréard, et le remake de La Guerre des boutons, sous la direction de Yann Samuell.

Avril 2012. Apparaît dans le film Sur la piste du Marsupilami, d’Alain Chabat.

Janvier 2014. Joue dans la pièce de théâtre Un singe en hiver, aux côtés d'Eddy Mitchell.

Septembre 2016. Lancement de son one-man-show baptisé Presque seul.

Mai 2017. Collaboration avec SFR dans le cadre d’une série de publicités.

Septembre 2017. Joue aux côtés de Carole Bouquet dans une série de TF1 intitulée La Mante.

Décembre 2019? Figure au casting de la saison 3 de Platane, coréalisée par Éric Judor.

Octobre 2020. Premier film publicitaire en tant que réalisateur pour le compte de la marque Cheerz.

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