Disparition
Au lendemain de la disparition de l'ex-homme d'affaires Bernard Tapie, la presse salue unanimement un homme aux mille vies : «un bandit sympathique», selon Libération, «un homme entier, avec une vraie part d'ombre», d'après l'Union.

Le boss, le phénomène, le battant, le mystère... Les journaux français rivalisent de superlatifs en ce lundi 4 octobre pour décrire, au lendemain de sa mort, l'ex-homme d'affaires Bernard Tapie, ce «bonimenteur» auquel les Français pardonnent tout. L'ancien président de l'Olympique de Marseille, décédé le 3 octobre, à 78 ans, d'un cancer dont il souffrait depuis 2017, restera «à jamais le boss», s'épanche L'Equipe. Le quotidien sportif est émerveillé par «une existence incroyablement romanesque» d'un homme «mû par un désir irrépressible de s'élever et un pouvoir de séduction peu commun».

«Pour les milliards et pour le pire», titille Libération en se demandant «pourquoi une telle indulgence» des Français pour ce «bonimenteur». «Le mystère Tapie réside là. Il raconte une France en transition qui regardait déjà l'avenir avec inquiétude mais se réconfortait en s'identifiant à un bandit sympathique qui, à force de tout oser, lui a fait croire qu'elle était plus forte qu'elle ne l'était», écrit Paul Qunio.

Bernard Tapie «n'a jamais prétendu être un grand homme mais l'hommage universel de ses concitoyens prouve combien il était des nôtres. Nanar était un peu notre pote à tous. Il était de la famille des hommes», écrit Jean-Louis Hervois dans la Charente Libre. Sous son dernier combat contre le cancer, «il a enseveli toutes les avanies de sa vie d'aventurier».

Nos archives : Comment Bernard Tapie s'est refait une santé (octobre 1999)

C'était un homme d'affaires bien sûr. Mais aussi «des affaires», note L'Est Républicain. «Le showman était hors norme. À la fois menteur et victime. Il n'incarnait pas la réussite, il instillait dans chacun de nous cette idée magnifique de rendre l'improbable toujours possible. Et il aura tout vécu, sauf la demi-mesure», estime son éditorialiste Alexandre Poplavsky.

Celui qui fut un temps érigé en symbole de la réussite sociale avant d'être rattrapé par les ennuis judiciaires, «était le miroir des contradictions et des fractures du roman national», selon Le Figaro. «Mi-Comte de Monte-Cristo, mi-Jean Valjean, il a su écrire sa légende. Il en a maîtrisé chacun des chapitres jusqu'au bout, car nul ne pouvait lui dicter sa conduite. Cet homme d'instinct n'obéissait qu'à sa fureur de vivre», estime aussi Yves Thréard.

«Le flamboyant s'est éteint», doit constater en une Le Courrier Picard. «Malgré un bilan entrepreneurial contestable, Bernard Tapie a interprété son plus grand rôle en humanisant et réhabilitant l'image de patron aux yeux des Français. Et en laissant penser que parti de rien, chacun pouvait y arriver, réussir et même faire fortune. Une forme de rêve américain, dont les coulisses nauséabondes et sans scrupules ont fait déchanter plus d'un»,  écrit Bernard Meinnel.

Nos archives : Bernard tapie revient à l'Olympique de Marseille (avril 2001)

Tour à tour entrepreneur, chanteur, président de l'Olympique de Marseille, ministre, acteur ou encore patron de presse, Bernard Tapie était «libre, insaisissable, génial, insupportable, parfois infréquentable», juge Carole Lardot dans l'Union. En somme, «un homme entier, avec une vraie part d'ombre. Un personnage comme on n'en croise plus dans nos univers ouatés, amidonnés, naphtalinisés».

Midi Libre salue «une trajectoire digne d'un roman français qui ne laisse personne indifférent». «Quel type quand même ! Quelle belle vie !», s'exclame Olivier Biscaye. C'était «l'homme qui osait tout», pour Les Dernières Nouvelles d'Alsace. Un homme «hors catégorie. Comme ces cols mythiques du Tour de France qui impressionnent vue d'en bas, essoufflent si on essaie d'en suivre le tracé, offrent lumière et ravissement tout en haut». «Adieu Boss», titre La Provence, «son» journal (Bernard Tapie en était le propriétaire depuis 2013), qui propose ce lundi une édition spéciale de 58 pages.

Selon Le Monde, l'homme aux «mille vies» est parti. «Il aura laissé une trace dans notre société, une empreinte flamboyante et sulfureuse, que chacun appréciera selon ses goûts», écrit le quotidien du soir. Pour Laurent Bodin de L'Alsace, ces «commentaires dithyrambiques dépassent à ce point l'admiration qu'ils tournent à la déraison», «car la vie de Bernard Tapie est aussi ponctuée de zones d'ombre, de coups de bluff et de condamnations judiciaires, d'échecs et de comportements plus ou moins avouables», rappelle-t-il.

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