Spécial régions
Valoriser les contributeurs ayant les meilleurs arguments, tel est l’objectif de Pierre Laburthe avec l’appli Logora, très utilisée par la presse régionale. Un pari audacieux à l’heure où la modération semble submergée par les commentaires ineptes.

Pierre Laburthe est devenu startuper après une rencontre décisive : « Avant, j’étais développeur chez IBM. C’était bien, mais un de mes amis, qui sortait de Supélec, m’a dit : “On va faire du débat de qualité.” » Aucun business model pour démarrer, mais l’impétuosité de la jeunesse et l’absence de charge de famille ont vite balayé l’obstacle. S’il a adhéré avec enthousiasme au projet Logora, c’est qu’il est un grand lecteur de commentaires : « Sur les sites de presse, il m’arrive de lire le titre de l’article puis d’aller directement aux commentaires. J’aime comprendre le ressenti des gens sur l’actualité. » Il a aussi constaté que la plupart des propos tenus sont sans intérêt. « Ce qui est gênant, c’est que les gens qui travaillent leurs arguments ne sont pas récompensés, déplore-t-il. C’est un cercle vicieux : ceux qui proposent des arguments élaborés sont souvent insultés sur les réseaux sociaux. Il ne reste que les messages lapidaires et haineux. » Lancée en avril 2019, Logora a déjà été utilisée par 700 000 personnes qui ont débattu autour de 3 300 questions. Sous forme de module, l’application est déjà présente sur plus d’une dizaine de sites de presse (Ouest-France, Sud-Ouest, Capital, Gala, la Voix du Nord, Courrier picard…). Les débats sont lancés par un membre de la rédaction du site qui formule la question et l’ouvre aux contributions. « Les participants sont classés en dix niveaux différents et ceux qui présentent les meilleurs arguments sont mis en avant par l’appli, ­explique Pierre Laburthe. Quant aux utilisateurs, ils peuvent suivre les débatteurs qu’ils trouvent les plus intéressants. »

Des arguments « labellisés »

Au cœur du réacteur se niche un algorithme de pertinence qui vérifie que les messages sont constitués de phrases construites, citent des sources, sont d’une longueur suffisante sans être excessive, etc. En parallèle, un outil de modération automatique et manuelle passe les messages au peigne fin. Cet outil a été nourri de 60 000 contributions et parvient à « labelliser » 90 % des arguments, selon Pierre Laburthe : « Nous sommes très vigilants, car les messages peuvent avoir un ­impact fort sur les sites de presse. Cet outil de modération permet de filtrer tous les messages racistes, homophobes, etc., mais aussi ce qui est illisible ou totalement hors sujet. » Logora compte actuellement cinq salariés, les deux fondateurs et trois autres personnes. « Nous n’avons encore effectué aucune levée de fonds et notre chiffre d’affaires augmente de 50 % tous les mois », précise Pierre Laburthe, qui dresse un constat nuancé de la vie de startuper : « Vivre en mode start-up, c’est avoir une grande liberté, on peut tester une évolution possible du service dès demain. L’inconvénient, c’est l’instabilité. Il est compliqué de se projeter à plus de six mois. »

Parcours

Depuis Avril 2019. CEO de Logora.

2017-2018. Consultant UX/UI chez IBM.

2017. Master en affaires internationales à l’université Paris-Dauphine.

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