Médias

Une vague de départs bouscule et questionne sur le management du premier newsmagazine de France. Le point sur la situation à la veille de l’arrivée de la nouvelle directrice de la rédaction.

Valérie Toranian prendra la direction de la rédaction du Point le 1er décembre 2022. Un journal qu’elle connaît… par personne interposée. Son mari, Franz-Olivier Giesbert l’a dirigé pendant quatorze ans (2000-2014) et en demeure l’éditorialiste. L’ex-rédactrice en chef puis directrice de la rédaction de Elle (1998-2014) a peu apprécié les commentaires dans la presse sur son arrivée en tant que « femme de ». « Moi, c’est moi et lui, c’est lui. Aux États-Unis, ce genre de propos ne passeraient pas. Je trouve cette misogynie, émanant de journaux soi-disant progressistes comme Libération ou Le Monde, stupéfiante. Même si je sais qu’il faut que je fasse avec les préjugés que cette situation inspire. Je ne crois qu’à deux principes : “travailler et avancer ensemble” ».

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Et elle a du pain sur la planche car la situation au Point n’est pas des plus sereines. Elle remplace Sébastien Le Fol, numéro 2 du journal depuis neuf ans. Certains rapprochent son départ de la publication des fausses révélations sur une prétendue employée maltraitée par le couple de députés LFI Garrido-Corbière. « Même si François Pinault a été très énervé par l’affaire, le départ de Sébastien Le Fol n’y est pas lié », estime cependant un journaliste. Le management de Sébastien Le Fol serait davantage en cause : « Il pouvait demander aux équipes de travailler en parallèle sur trois sujets de couverture, et ne tranchait que la veille du bouclage sur celui qu’il retenait. Les deux autres étaient reportés ou publiés sur le net. »

Les sujets « commandés » sans jamais apparaître in fine dans le journal, mais seulement en ligne des semaines plus tard, y compris des exclusivités, sont légion. Sa personnalité est aussi clivante « Le mode de management a été trop souvent brutal au Point. Même s’il s’est radouci. Une cellule de soutien psychologique avait été mise en place pour les équipes du web notamment il y a quelques mois », poursuit une source interne. Au moins deux cas de burn-out ont eu lieu ces dernières années. Et l’adjoint de Sébastien Le Fol, recruté par ses soins, Gilles Denis, est aussi mis en cause pour son mode de management.

Depuis janvier, douze journalistes sont partis, aux Échos, à L’Express, au JDD, au Figaro, à L’Informé : de Marie-Laure Delorme, critique littéraire, à Florent Barraco, directeur adjoint de la rédaction chargé du numérique, en passant par Thomas Bourgeois-Muller, rédacteur en chef adjoint du Point.fr. Sans oublier le critique gastronomique Thibaut Danancher, l’éditorialiste Laetitia Strauch-Bonart ou Jérôme Béglé parti diriger Le JDD.

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Des départs qui auraient fortement irrité et inquiété l’actionnaire François Pinault, peu satisfait de voir que tant de talents n’ont pas été retenus. D’où la nécessité d’insuffler un nouveau souffle en la personne d’une femme au cœur d’un management « où il y a trop de couilles », nous a-t-on trivialement assuré. La feuille de route de Valérie Toranian est toute tracée : écouter, rassurer, conforter et fédérer l’une des plus belles rédactions de Paris. Et féminiser un titre qui pèse près de 309 000 exemplaires payés en France (+13,2 % en 2021-2022, selon l’ACPM) avec une recette très politique, éco, justice.

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