Vous êtes ici
Pour bénéficier des alertes ou des favoris, vous devez vous identifier sur le site :
Vous avez déjà un identifiant sur stratégies.fr ? Identifiez-vous
Pas encore d'identifiant ? Créez vos identifiants
Non Fiction, c'est du concret
24/01/2008 - par Delphine Le GoffLe site, qui se décrit comme le portail des livres et des idées, s'est fait remarquer dans les médias par son contenu exigeant et quelques scoops.
L'AFP est en ligne. Une journaliste souhaite s'entretenir avec Frédéric Martel, écri-vain et rédacteur en chef de Non Fiction. « Ça n'arrête pas, explique-t-il. Nous nous sommes lancés le 1er octobre et notre dossier de presse a déjà fière allure. » Olivier Assayas, Jean-Pierre Azéma, Élisabeth Badinter, Angelo Rinaldi, Élisabeth Roudinesco ou Alain Touraine : il y a pire comme parrains pour un site qui se présente comme « le portail des livres et des idées ».
« J'ai longtemps vécu aux États-Unis, où de nombreuses publications, comme le Times Litterary Supplement ou la New York Review of Books, s'intéressent aux essais, souligne Frédéric Martel. En France, leur couverture est réduite à la portion congrue, hormis pour quelques best-sellers, à l'instar des Classes moyennes à la dérive du sociologue Louis Chauvel. » Le site entend couvrir l'actualité intellectuelle au sens large, grâce à un impressionnant réseau de 400collaborateurs, chercheurs et auteurs. En une, en cette semaine du 18 janvier, un entretien sur l'élan bergsonien avec Frédéric Worms, professeur à l'École normale supérieure, à l'occasion de la parution, en octobre dernier, des trois premiers volumes de l'édition critique complète des écrits du philosophe.
La gratuité comme vocation
Mais ce qui a surtout fait parler dans la presse ces derniers temps, c'est un scoop plus journalistique que philosophique : l'interview exclusive d'Emmanuelle Mignon, directrice de cabinet de Nicolas Sarkozy. Elle y prend ses distances avec Henri Guaino, précisant que, selon elle, un « conseiller est là pour servir, non pas pour se mettre en avant », ajoutant ne pas « être le gourou de Sarko ». L'interview a été reprise un peu partout, de France Info au Figaro en passant par VSD. L'ex-major de l'ENA, qualifiée de « machine à idées de Sarkozy », parle peu. Comment l'interview a-t-elle été négociée ? « Le plus simplement du monde : en envoyant une demande par courrier électronique », raconte Frédéric Martel. Pourquoi la directrice de cabinet a-t-elle accepté l'entretien ? « Parler chez nous, ce n'est pas la même chose que prendre la parole dans un média grand public, estime-t-il. Elle a précisé qu'elle ne souhaitait pas aborder l'actualité immédiate. Mais, finalement, l'interview est loin d'être langue de bois ! »
Cette interview, qui a dopé l'audience du site (dont la fréquentation oscille entre 5 000 et 15 000 visiteurs uniques par jour), a aussi valeur de déclaration d'indépendance. « Nous et nos collaborateurs sommes plutôt marqués à gauche, mais ne voulons pas être prisonniers de cela », insiste Frédéric Martel. De fait, le site compte parmi ses soutiens financiers, outre Grégoire Lassalle (patron d'Allociné) et Jean-Noël Tronc (ex-directeur général d'Orange), Benoît Thieulin, l'un des artisans de la campagne en ligne de Ségolène Royal. « Ce qui ne nous a pas empêchés d'être les premiers à parler du rendez-vous manqué entre Royal et Bayrou, à l'occasion de la sortie du livre de l'ex-candidate socialiste », précise Frédéric Martel.
Succès d'estime, audience prometteuse... Fort bien. Mais Frédéric Martel le reconnaît, « il reste à trouver un véritable modèle économique pour le site, dont la vocation est la gratuité ». Non Fiction, dont le budget est de 120 000 à 150 000 euros par an, vend des livres, conclut des partenariats et a amorcé des développements vidéo. Ses parrains financiers lui ont donné deux à trois ans pour faire ses preuves. Ses débuts témoignent en tout cas d'un bel élan vital.