Chronique

Les agences le constatent de plus en plus souvent : les jeunes diplômés n’ont plus vraiment la flamme. La créativité a perdu ses lettres de noblesse, et face à un horizon bouché, ils ne voient plus l’intérêt de créer des logos ou d’imaginer des campagnes.

Le monde est en crise. Le front de l’est, que l’on croyait disparu depuis belle lurette, est à nouveau ouvert par un autocrate bouffi d’inquiétudes, d’orgueil et de délires paranoïaques. Dans nos sociétés aussi, de multiples fronts se creusent. Entre pros et anti, Gilets jaunes, Bonnets rouges, libéraux et antis, nantis et sans-dents… Le monde s’éclate. Mais personne ne se marre ! 

Au milieu de tout ça, la jeunesse s’interroge. Rien de plus normal : quand on a la vie devant soi, comment ne pas se poser de questions sur l’état du monde et sur les perspectives qu’il offre (où plutôt qu’il n’offre plus) ? Résultat : rien qu’en France, on assiste à une chute vertigineuse du niveau d’engagement et d’ambition chez les 18-24 ans, il suffit d’observer nos étudiants… avec, en filigrane, une interrogation latente : à quoi bon ? À quoi bon fournir des efforts pour améliorer une société qui semble vouée à se fracturer chaque jour un peu plus ? Quand toute vision à long terme, seule susceptible de générer à nouveau des perspectives encourageantes, semble désespérément absente, pourquoi s’engager sur le temps long ? 

Plus près de nous, les agences le constatent de plus en plus souvent : les jeunes diplômés n’ont plus vraiment la flamme. Face à un horizon bouché, ils ne voient pas l’intérêt de créer des logos, de composer des identités, d’imaginer des campagnes. La créativité a perdu ses lettres de noblesse. Et pourtant, c’est précisément elle qui peut permettre d’améliorer les choses. Parce qu’être créatif, c’est apporter un nouveau regard sur le monde, donc contribuer à l’améliorer. C’est un processus dont la puissance est capable d’éclipser des décisions politiques, économique et sociales pourtant stratégiques. 

Le meilleur de l’humanité

L’Histoire en fournit la preuve la plus éclatante. Se souvient-on plus de François Ier pour ses succès politiques et militaires, ou pour l’héritage artistique et architectural qu’il a offert à la France ? Notre pays rayonne-t-il plus aujourd’hui grâce à la victoire de Marignan, ou par la grâce de Chambord, par le mystère de la Joconde ou par les compositions décoratives de Raphaël et de Michel-Ange ? Quelle image garde-t-on de Louis XIV aujourd’hui, si ce n’est celle du roi bâtisseur de Versailles et promoteur des arts ? 

Parce qu’elle révèle le meilleur de l’humanité, la créativité a toujours généré une empreinte durable auprès du plus grand nombre. Même dans les pires moments, tels que les attentats qui ont frappé Paris en 2015, elle a permis de créer une unité autour d’un message et d’un graphisme devenus l’étendard des résistances face à l’obscurantisme. C’est derrière trois mots qu’ont défilé des chefs d’État du monde entier, aux côtés de millions de citoyens. Si aujourd’hui, on ne se souvient plus très bien des présidents et ministres présents à cette marche contre le terrorisme, tout le monde garde en tête « Je suis Charlie ». Merci Joachim Roncin. 

Dans le monde professionnel, c’est pareil : ce sont les entreprises les plus créatives qui tirent leur épingle du jeu, parce que leur créativité les amène à proposer des innovations de rupture, donc à redéfinir les standards de leurs marchés à leur avantage. Le meilleur exemple restant une société technologique qui a osé se donner le nom du plus commun des fruits… Finalement, chaque entreprise devrait voir dans la créativité l’étendard tangible de sa philosophie, de sa raison d’être. 

Et le constat vaut pour toutes les sphères de l’activité humaine : la créativité est le meilleur véhicule de l’échange et de la compréhension mutuelle. Parce qu’elle pousse à la discussion, au débat. Parce qu’elle questionne, bouscule les habitudes et nous fait évoluer. Parce qu’elle est le vrai liant du collectif. Et parce qu’elle nous permet de retrouver le sens du temps long et des perspectives partagées. 

Il devient urgent de la revaloriser. Et ça commence souvent, tout simplement avec un crobard et de l’enthousiasme autour d’une bonne strat puis un logo, une chouette direction artistique et quelques mots bien trouvés… Pour cela, quel meilleur terrain de jeu que les écoles et les agences? 

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