Patronymes

Réjouissons-nous des subtilités de la langue française et de la faculté qu'ont les stratèges de la communication d'en jouer. Après le temps de l'OPA inamicale, voire franchement hostile, voici venu celui d'une OPE«non sollicitée mais amicale»,pour reprendre les termes de Thierry Desmarest, le patron de TotalFina, bien parti pour s'offrir Elf. Au rythme où s'enchaînent les fusions-acquisitions, attendons-nous encore à quelques surprises lexicales. Y aura-t-il bientôt des Pdg assez fous pour vendre à leurs actionnaires des OPA «amoureuses» ou des OPE «sensuelles»? En attendant, nos capitaines d'industrie ont de sérieuses questions d'identité, sinon d'ego, à régler. Total avait déjà changé son nom en TotalFina après son mariage avec le belge Petrofina. Thierry Desmarest envisage - provisoirement - d'appeler le nouveau groupe TotalFina-Elf. On comprend sa prudence. Encore quelques alliances et le nom de sa compagnie ne tiendra plus sur les cartes de visite. Inventeurs des Natexis (Crédit national et BFCE) et autres Novartis (Ciba et Sandoz), les experts en création de noms de marque sont bien les seuls, dans tous ces regroupements, à ne pas risquer leur emploi. Un nouveau nom, surtout s'il faut le protéger dans le monde entier, coûte une fortune, sans parler de la nécessité de l'imposer. Il y a deux ans, Novartis a investi la bagatelle de 250millions de francs en publicité pour se faire connaître auprès des décideurs. Visiblement sensible à ce problème, Michel Pébereau, le patron de la BNP, n'a pas tergiversé: en cas de succès, la grande banque qu'il nous promet s'appellerait SBP. Imaginez le cauchemar des publicitaires devant une SociétéGénéraleBanqueNationaledeParisParibas... Et pourquoi pas Euro RSCG Babinet Erra Tong Cuong? Impensable.