Statut
A l’heure où notre société est quotidiennement chahutée, où les modèles et figures autrefois immuables et intouchables sont remis en cause, qu’en est-il des marques? L’iconicité est-elle toujours envisageable en 2016? Et si oui, sous quelles conditions?

Pour comprendre les perspectives de l’iconicité en 2016 et dans les années à venir, il faut repartir d’un certain nombre de changements et d’évolutions. Et cela concerne en premier lieu la notion même d’iconicité. En effet, il y a quelques années encore, l’iconicité se construisait au fil du temps, parfois avec labeur: la marque, à travers ses produits ou ses publicités, construisait peu à peu son statut et nourrissait son statut d’icône. Aujourd’hui, en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, une marque peut devenir iconique et voir, comme Uber, son nom devenir un verbe, faisant partie du langage courant pour parler d’un modèle économique.

La marque iconique, c’était aussi celle qui symbolisait une forme d’inaccessibilité, ce qui participait à la rendre désirable. Aujourd’hui, les marques iconiques sont au cœur de notre quotidien, au plus proche de nos moments de vie, à l’instar d’un Starbucks par exemple.

De même, l’iconicité ne rime plus avec un seul et même produit, à l’origine de sa renommée, mais repose sur la personnification du produit iconique que la marque va proposer, à l’image de la célèbre Air Max que chacun peut customiser grâce au service Nike ID.

Des relations marques-consommateurs qui se réinventent

Au-delà de la notion d’icône, ce sont également les relations entre les marques et les consommateurs qui se réinventent et changent la donne. Fini la posture distante ou le prix élevé du service qui donnaient de la valeur à la marque. La personnalisation est désormais au cœur des services proposés, garante d’un lien émotionnel fort. Sephora, par exemple, propose une expérience «beauté» inédite dans son navire amiral des Champs-Elysées et va jouer cette personnalisation à la perfection grâce notamment à son programme de fidélité.
D’un autre temps, également, les marques incarnées par un leader charismatique, celui qui énonçait les raison de croire à la marque et sa proposition de valeur. Les marques reconnues intègrent aujourd’hui les consommateurs au cœur de leurs réflexions pour créer, débattre et innover avec elles.

Des consommateurs à l'exigence croissante

Autres bouleversements qui font évoluer l’iconicité des marques: les attentes des consommateurs, toujours plus exigeants, en ce qui concerne par exemple «le tout, tout de suite». Cette tendance de fond, que l’on observe depuis quelques années déjà, ne semble pas trouver de limite avec un Uber Eats qui livre un déjeuner en moins de cinq minutes (et tout cela proposé par les établissements les plus pointus du moment).

A l’heure où la vérité et la transparence deviennent la norme (cf Mars qui rappelle ses barres chocolatées dans 55 pays à la suite d’un morceau de plastique trouvé dans un de ses produits), une cible est à surveiller particulièrement: les millennials. Cette nouvelle typologie de consommateurs est aussi difficile à appréhender qu’à dompter. Et l’enjeu pour les marques est bien de réussir à la convaincre, au-delà de la qualité de l’offre commerciale, en valorisant un véritable projet d’entreprise qui s’inscrive au cœur de notre société.

Les futures icônes

Toutes ces grandes évolutions ont évidemment un impact sur la dimension iconique des marques. Partant de ce constat, quelles seront les futures icônes?
Iconiques seront les marques qui n’hésiteront pas à chambouler les codes d’un marché, à redistribuer les cartes et à redéfinir les rôles. Airbnb propose ainsi bien plus que de louer un lieu pour passer la nuit: la marque offre de vivre une expérience similaire, et tout aussi authentique, que celle vécue par l’autochtone dans la ville ou le pays visité. La proposition de faire partie de la communauté du monde, à travers le mouvement du «belonging», est inédite, et connecte parfaitement avec les nouvelles attentes en termes de voyages et de relation au monde. Egalement iconiques les marques qui revendiqueront un «purpose» (raison d’exister) solide et ambitieux: avec sa campagne «Like a girl», Always s’érige contre les idées reçues en demandant aux petites filles si elles choisiraient leur futur métier, joueraient, couraient différemment… si elles étaient un garçon. La marque accompagne les petites filles dans leur changement de statut et future vie de femme en leur rappelant qu’elles doivent s’épanouir librement et s’affranchir de toute forme de préjugé.

Double registre

Autre paramètre, l’incarnation par les marques de codes culturels emblématiques, qui reflètent une certaine manière de faire et un certain état d’esprit. Avec sa dernière campagne «France is in the Air»,  Air France fait la promotion d’un certain art de vivre et de voyager à la française, incarnant cette «French Touch» qui fait toute la différence.

Enfin, être en connexion avec les évolutions sociétales et les grands événements qui y seront associés sera indispensable. Prendre en considération ces réalités et y répondre seront un gage de crédit, à l’image d’Oreo, qui n’a pas hésité à mettre en scène son fameux petit gâteau aux couleurs du drapeau arc-en-ciel pour célébrer la Gay Pride.

En conclusion, l’iconicité de demain reposera pour beaucoup sur deux ingrédients clés, au cœur de notre approche de la marque: d’une part son «purpose», qui valorisera le point de vue de la marque, sa mission, le cap qu’elle se donne, et d’autre part son rôle culturel, celui qu’elle compte jouer dans la société. Un double registre savamment orchestré et qu’il faudra gérer sur le long terme pour faire partie du cercle très fermé des marques iconiques.   

Suivez dans Mon Stratégies les thématiques associées.

Vous pouvez sélectionner un tag en cliquant sur le drapeau.