Tribune
Alors que l'époque est au collaboratif, à la valorisation permanente sur les médias sociaux, les programmes d’employee advocacy fleurissent en entreprise. Derrière la source de business qu'ils peuvent représenter, il s'agit aussi d'un vrai levier de performance pour les salariés.

Fini la gestion top-down des informations, fini le matraquage de la communication interne vers les employés, terminé les infos sans humanité. Les programmes d’employés ambassadeurs, ou employee advocacy, misent sur la co-construction des contenus et des communications corporate, la notoriété individuelle et collective. Depuis cinq ans, ils se diffusent et prônent l’engagement des collaborateurs sur la toile. Mais est-ce du business déguisé réalisé grâce au volontariat des salariés, une méthode managériale pour réengager les équipes ou un challenge de performance pour booster le collectif ?

L’objectif premier affirmé des programmes d’employés ambassadeurs est l’engagement des collaborateurs. C’est déjà un premier signe fort du désengagement chronique des troupes dans leurs sociétés. Pourquoi les collaborateurs se sentiraient-ils désengagés dans leur travail ou de leur entreprise alors qu’ils y consacrent une grande partie de leur temps et qu’elle subvient à leurs besoins financiers mensuels ? Le manque de motivation, la perte de sens dans les missions quotidiennes et le manque de reconnaissance sont les trois raisons les plus souvent invoquées. L’ennui guète, les challenges s’étiolent, les résultats obtenus sont moins reconnus et valorisés. On parle alors de bore-out et brown-out. Dans d’autres cas, c’est le burn-out et le travail acharné qui se désincarne n’est pas reconnu à sa juste valeur.

Pourquoi en est-on arrivé là ? Probablement à cause de la baisse du chiffre d’affaires des entreprises, qui conduit depuis une dizaine d’année à un climat morose. Les 35 heures ont également perturbé le rythme et les cadences de travail, il faut faire plus avec moins. La baisse chronique des recrutements, induite par la baisse du CA et les 35 heures, ont également conduit à surcharger le personnel restant. Beaucoup de collaborateurs affirment aussi que l’hyper-découpage des tâches empêche d’avoir une vue d’ensemble des dossiers ou des projets. L’excès de contrôle des organisations pyramidales et l’empilement des strates hiérarchiques pousse à déresponsabiliser, voire infantiliser, les collaborateurs, et met le pouvoir décisionnel dans les seules mains de quelques-uns. Alors au titre de la nécessité de réengager les collaborateurs dans leur travail et auprès de leur entreprise, les programmes d’employee advocacy peuvent être une brique intéressante.

Réseau sociaux, formidables centres de profits

Le deuxième objectif de ces programmes mis en avant côté entreprise est le rayonnement de la marque. Mais n’est-ce pas le rôle des directions publicité, marketing et communication d’œuvrer pour la notoriété et la réputation de l’entreprise ? Oui, d’une certaine manière, mais plus vraiment ou plus seulement. Et c’est encore une affaire d’enveloppe budgétaire. La publicité et les campagnes institutionnelles n’engagent plus les clients comme il y a quelques décennies et les budgets ont drastiquement diminué, entraînant de faibles retours sur investissement (ROI). Les campagnes de marque sur les médias traditionnels ne font plus autant recette, l’audience morcelée s’est déportée sur le web. Les médias sociaux et les réseaux sociaux ont pris le lead sur le marché.

Pourquoi en est-il ainsi ? D'abord parce que sur le web, les budgets à engager sont faibles comparativement aux campagnes dans les médias traditionnels. Ensuite, parce que les résultats en termes de ROI sont bien plus probants concernant l’engagement client. Les médias sociaux et réseaux sociaux sont les nouveaux centres de profits et d’informations. C’est le royaume de la data, l’or noir du XXIe siècle. Ce sont les nouvelles agora où l’on consomme, où l’on s’informe et où l’on discute. 53 millions de personnes surfent sur internet en France, soit 84,6% de la population, selon Médiamétrie. Les clients, consommateurs devenus consomme-acteurs, font désormais bien plus confiance aux avis de leurs pairs qu’aux campagnes institutionnelles des entreprises.

Chaque collaborateur étant un client en puissance avec un fort pouvoir d’influence, les entreprises saisissent cette opportunité de faire rayonner la marque par leur intermédiaire. Et ces nouveaux intermédiaires, ces collaborateurs promoteurs, s’engagent gracieusement dans le programme ambassadeurs. En cela, les programmes d’employee advocacy sur les réseaux sociaux sont un formidable levier de visibilité et de réputation pour les marques, à faible investissement et à très fort taux d’engagement.

Echange bien-être contre performance

Le troisième objectif mis en avant est la valorisation des collaborateurs en interne et en externe. Ce qui sous-entend qu’il y aurait un manque à ce niveau. Mais pourquoi faudrait-il que les collaborateurs soient valorisés ou mis en avant ? Car cela motive, cela concours au bien-être au travail, au sentiment d’appartenance et au mérite. Il est aujourd’hui prouvé qu’un salarié reconnu dans son travail, dans son investissement professionnel et personnel, valorisé, sera plus efficace et s’engagera plus volontiers pour vendre ou défendre son entreprise. Plus il peut prendre d’initiatives et contribuer à la vie de son entreprise, plus il sera performant, et par rebond, l’entreprise le sera.

L’attention mise sur le bien-être au travail est relativement nouvelle en termes de reconnaissance sur la performance et d’applications organisationnelles. Et à ce titre, les démarches d’employee advocacy peuvent y participer. C'est presque un échange, du bien-être contre de la performance. Le collaborateur est reconnu comme acteur visible de la création de contenu et de valeur de son entreprise. Il prend le pouvoir de la parole, il devient un influenceur, un porte-drapeau.

C’est un fait : si les programmes d’employee advocacy n’offrent pas de remèdes miracles pour la crise de sens qui touche le monde du travail, ils posent néanmoins des jalons d’efficacité individuelle et collective, comme l’engagement, le bien-être au travail, la relation managériale, la marque employeur et le business. Tout est dans la reconnaissance de la valeur de chaque collaborateur.

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