Chronique

Bien sûr, cela nous semble encore loin. Mais le jour viendra. Ce jour ou le danger se sera éloigné, ce moment ou la vie progressivement aura gagné. Les restaurants sortiront leurs terrasses, les rues s’animeront tard le soir, les cinémas seront pleins – et la qualité de leurs films fera oublier la désastreuse soirée des Césars –, la jeunesse retrouvera le goût de la fête, les départs en week-end se prépareront furieusement, et pendant des heures sur nos écrans nous ne parviendrons pas à arbitrer entre nos rêves de vacances tant le soleil et les grands espaces nous auront manqué. Et pour nous tous, en tout cas on l’espère, les compétitions refleuriront, les pitchs se multiplieront.

D’ici là, il faut tenir. Vivre avec la peur, subir ce sentiment d’une menace permanente, s’étonner d’être méfiant face à l’autre même quand il fait partie des siens, compter les jours, espérer en le vaccin. Pour nos business aussi l’inquiétude est présente. Peut on résister à deux années aussi difficiles ? Faut-il continuer à recruter, à investir ou faut-il attendre que l’orage passe ? Mais répondre à ces enjeux du quotidien ne doit surtout pas nous détourner de la question fondamentale qui est devant nous. Le jour d’après, qu’est ce qui dans nos activités aura changé, quelles seront les attentes nouvelles de nos clients, de la société, de nos collaborateurs ? Comment s’y préparer ? La tension n’est bien sur pas évidente à surmonter. Nous devons continuer à gérer au mieux le court terme et en même temps nous projeter dans un futur dont on ne sait rien ou presque.

Six Français sur dix veulent retrouver leur vie d’avant

D’abord parce qu’entre les adeptes de la « reprise en K » et les théoriciens du retour des « Années folles », les paris vont bon train. L’ampleur de la reprise et son rythme seront décisives pour nos secteurs, souvent très corrélés à l’activité économique générale. Ensuite parce que même si des tendances se confirment dans les préoccupations aussi diverses que celles liées à la santé et à l’environnement, dans la volonté de faire de ses mains ou d’acheter local, que d’autres se dégagent par exemple en matière de retour de la souveraineté, d’arbitrage majoritaire dans la recherche d’une vie tranquille avant toute forme d’hédonisme, le balancier n’est sur beaucoup de sujets pas stabilisé. Un seul exemple, en juin dernier, la part des Français privilégiant le « tout changer dans votre vie » (46%) était sensiblement égale à ceux qui voulaient que leur vie reprenne comme avant (45%). En début d’année, ces derniers sont désormais 6 français sur 10 (+15).

Mêmes interrogations pour l’interne qui constituera sans aucun doute une priorité renforcée de tous les dirigeants. Difficile de savoir aussi ce qui l’emportera entre l’expérience réussie d’un nouveau rapport au travail et le besoin de retrouver du collectif, du lien et du sentiment d’appartenance. Quant aux entreprises enfin, leur rôle indispensable pendant la crise va-t-il consolider la perception de leurs engagements sociétaux ou faire monter le niveau d’exigence envers elles ?

Toutes ces questions vont ouvrir une période passionnante. Mais se mettre en situation de répondre à cette demande s’anticipe aujourd’hui. Être là bien sur pour accompagner nos clients à décrypter, poser des hypothèses, élaborer des scenarios. Mais se dire que les positions tenues pendant la crise ne valent pas protection pour la nouvelle période qui va s’ouvrir. Imaginer que si la crise a protégé les « sortants », la sortie de crise peut faire naître dans les entreprises une envie et un besoin de regarder ailleurs d’expérimenter d’autres solutions, de remettre à plat leurs stratégies. Porter aussi toute son attention à des collaborateurs qui, eux aussi, après la crise, et même s’ils ont été pleinement engagés, pourront avoir envie d’autre chose. Et dans le même temps se renforcer pour répondre aux attentes de demain. Investir sur de nouvelles solutions, de nouvelles offres, imaginer de nouvelles méthodes. Préparer une vague de croissance, une possible surchauffe et donc anticiper les recrutements, les nouveaux métiers.

Le jour d’après, il faudra aller vite et la course s’annonce féroce. L’erreur serait d’attendre, de temporiser, d’hésiter. Le jour d’après se prépare dès aujourd’hui.

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