Chronique

C’est, je crois, la première fois que j’ai tant hésité sur le sujet à aborder ici. Rien à voir avec la peur de la page blanche, mais en faisant un pas de côté sur l’actualité, tout bouge trop fort et trop vite, certains sujets inquiètent, d’autres révoltent et, toujours sur la table, ce verre à moitié plein, à mieux remplir et partager. Qu’est Facebook devenu ?! Ses algorithmes sont-ils aussi difficiles à maîtriser que les révélations de ses anciens employés ? Pourquoi le metaverse fait-il le plein médiatique, alors qu’au même moment, Ikea accueille physiquement un milliard de personnes dans ses magasins conçus comme des plateaux de jeux vidéo ? Après TF1 et M6, Veolia et Suez, c’est au tour de Carrefour et Auchan : nos grandes entreprises se sont-elles mises à jouer au Squid Game ? Alors que la campagne présidentielle est lancée, quelles seront les promesses et perspectives de ces fusions ? Et qui du CSA ou de l’Autorité de la concurrence sera compétent dans celle des deux médias ? 

Avons-nous bien mesuré que cela fait bientôt deux ans qu’Hermès, entreprise familiale aux produits artisanaux, est devenue la troisième capitalisation du CAC40 devant Total, la major française, qui a longtemps été notre entreprise la plus riche et la plus puissante ? Alors que nos licornes lèvent par centaines de millions et embauchent par milliers, les talents – on ne dit plus salariés ou employés – sont eux-mêmes attirés par des projets plus personnels : c’est la « great resignation », l’appel de la « passion economy » et du « full remote ». Ces départs seront-ils compensés par l’automatisation en cours qui s’étend au-delà des usines et des entrepôts grâce à l’intelligence artificielle et aux technologies « no code », qui transforment les non-codeurs en no-codeurs capables de développer des applicatifs robustes et puissants ? Bref… pour avancer dans ce tintamarre remuant et aveuglant, nous avons plus que jamais besoin d’une boussole et d’une balance.

Un sujet s’est imposé récemment en haut de tous les agendas au point d’écraser les nombreux événements que je viens d’énumérer : celui de l’environnement et de la crise climatique. Habitués que nous sommes désormais à vivre des crises exceptionnelles, sanitaires et planétaires, alors que notre chère économie tourne à plein régime. Le CAC40 a battu tous ses records et la croissance a atteint des niveaux inconnus pour deux générations au moment où nous prenons conscience que nous sommes, pour la première fois, dans la position de devoir impérativement arbitrer contre notre confort pour le futur et, pour la dernière fois, en mesure de contrôler et de réduire les dérèglements que nous avons provoqués. 

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La roue de la valeur

Cette boussole ou cette balance ne sont pas encore homologuées, on tâtonne, à coup de mission, de raison d’être, de labellisation… à défaut d'indicateurs normalisés et d'équivalent aux outils méthodologiques de la transition numérique, pour les entreprises qui permettraient de rendre objective la mesure de la valeur et de pouvoir la suivre en interne et par les parties prenantes. Je me souviens comme si c’était hier de ma découverte que la martingale du design thinking était une formule gagnante mais totalement ignorante de l’environnement, du recyclage, obsédée qu’elle est du confort de l’utilisateur final. 

Avec des collègues – plein de talents bien sûr, j’adore le mot collègue – nous avons développé une roue de la valeur, « value wheel » pour ne pas être en reste avec les « business model canvas » ou « lean startup ». Le principe est simple : imaginer que la valeur créée est un continuum. Comme une roue donc qui roule pour produire l’utilité économique d’une organisation sur la planète, pour la société et l’écosystème, tout en étant capable de la mesurer et de la partager en ayant bien conscience que les ressources ne sont pas infinies et que les tensions pour leur répartition sont inéluctables. Nous l’avons testée, elle ne demande pas mieux que de s’enrichir de vos cas, de vos questions, de vos découvertes. Et si nous inventions ensemble, en Europe, l’outil méthodologique de la réconciliation des transitions en cours ? 

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