20% des Français ont recours au travail au "noir"

Le 22 mai dernier, le sommet des chefs d'Etat européens s'est soldé par une déclaration a minima en matière de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales. Les dirigeants des 27 pays de l'Union européenne se sont en effet contentés d'annoncer leur intention de parvenir à un accord sur l'échange automatique d'informations fiscales sur les particuliers d'ici la fin de l'année. La veille, le gouvernement français avait annoncé sa volonté d'alourdir les sanctions pénales à l'encontre des contribuables coupables d'évasion fiscale, promettant«ni amnistie ni cellule de régularisation» pour les fraudeurs.

En cette période de redressement des comptes publics et alors que le pouvoir d'achat des ménages a chuté de 0,9 % en 2012 et la consommation, de 0,4% selon l'Insee, «la deuxième plus forte baisse depuis l'après-guerre», le sujet est plus que jamais sensible. Le manque à gagner pour l'Etat serait de 60 à 80 milliards d'euros par an.

Une question avec laquelle les Français ne badinent pas si l'on en croit le sondage de l'institutCSA mené du 14 au 16 mai dernier pour le site Atlantico. Ils sont en effet très majoritairement respectueux de la procédure de déclaration de revenus: seuls 4% des personnes interrogées reconnaissent qu'il leur est déjà arrivé de ne pas déclarer une partie de leurs revenus.

Une moralisation inefficace

« Un chiffre fiable compte tenu du mode de recueil des réponses via Internet, outil moins propice à la sous-déclaration », assure Yves-Marie Cann, directeur adjoint du pôle Opinion Corporate de CSA. Les Français sont aussi 62% à affirmer que «rien ne peut justifier la fraude fiscale car chacun doit contribuer au financement des institutions et des investissements publics en fonction de ses revenus».

Ils restent toutefois sceptiques quant aux capacités du gouvernement à lutter contre ce fléau. Selon un autre sondage réalisé par BVA pour I-Télé les 11 et 12 avril, ils jugent inefficaces les mesures prises pour «la moralisation de la vie publique»: mettre fin aux paradis fiscaux (80%) et réduire la fraude fiscale (67%). Déjà, une enquête menée en novembre dernier par Toluna Quicksurveys pour Economiematin.fr indiquait que 72% des Français étaient convaincus que la fraude fiscale allait s'aggraver en 2013. 

Un scepticisme à rapprocher du fait que d'après BVA, 20% des Français confient recourir au travail au "noir" en n'ayant pas déclaré aux organismes sociaux une personne qu'ils ont rémunérée pour services rendus et pour près d'un quart d'entre eux (23%), la fraude fiscale peut se justifier dans le cadre de la préservation des dépenses indispensables de la famille. Ils étaient 30,6% à penser de même en novembre dernier selon l'étude Toluna Quicksurveys qui indiquait par ailleurs que l'immense majorité de nos concitoyens (82,8%) pensaient aussi que «trop d'impôt tue l'impôt».

« De fait, le niveau de tolérance à l'impôt a atteint un seuil maximum », analyse Yves-Marie Cann de CSA, «la majorité des Français a des pratiques vertueuses mais dans un contexte économique difficile, on ne sait pas comment cela peut évoluer. Les digues tiennent encore, mais jusqu'à quand?»

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