Le palmarès des Cannes Lions Design montre cette année encore à quel point la catégorie se cherche une place dans cet événement à la forte culture publicitaire. Quelques rares cas sont en ligne avec ce que l'on attend du design de marque. «The Sharing Can» de Coca-Cola, par exemple, apporte une vraie innovation en jouant sur des valeurs de partage car, comme disait Steve Jobs, «le design, ce n'est pas juste à quoi ça ressemble, mais à quoi ça sert».
Le design a vocation à créer des systèmes identitaires et à donner à toucher la marque pour qu'elle touche les gens.

Le design est au point de rencontre et notre métier de «brand designer» est de rendre la marque tangible (son mythe, son offre, ses services) pour qu'elle rencontre l'utilisateur (ses aspirations, ses envies, ses besoins). Aussi est-il légitime de s'interroger: cette catégorie n'est-elle pas un fourre-tout des inclassables?

Dans cette caverne d'Ali-Baba ont en effet été jugés des programmes de communication, certes à la très belle qualité graphique, des dispositifs événementiels léchés, des projets artistiques remarquables… Mais force est de constater que tant le Grand Prix que la majorité des Gold ont distingué des sujets de communication, des mécaniques d'activation tournées vers le service, et que les programmes identitaires (les systèmes de marque) et l'innovation produit, faiblement représentés, ont été relégués en Silver.

En faisant une large place à la performance artistique, mais également à l'«hyperpédagogie» et à l'«hypermatière», ce palmarès ne serait-il que le reflet des grandes tendances sociétales du moment? Les prises de parole à visées didactiques et pédagogiques pour générer du lien côtoient l'onirisme, à l'image des sociétés qui balancent entre conscience engagée et démarche poétique.

On retrouve également la dualité générée par le virtuel. Plus on est connecté au virtuel, plus on a besoin de retrouver le toucher de manière concrète, la matière, le concret palpable (cf. Stadler et son traité à la pointe fine). Le connecté coexiste avec le grand retour de la matière. Enfin, on retrouve la nostalgie des Trente Glorieuses: l'utilisation du vinyle, les à-plats, le temps de prendre le temps.

Si l'on ne sait plus ce qui a été jugé et que la frontière entre les catégories est assez floue – on mélange l'idée publicitaire, l'art, le graphisme, la marque, l'activation –, il faut se féliciter car tout devient design ! Et ce palmarès, d'une très grande tenue révèle en définitive que le design ne peut être rangé dans un seule case tant il est tranversal et donc vital pour la communication des marques.

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