Tribune
Tribune de Cyril Gaillard, directeur de la création de Bénéfik.

Une fois de plus, le sujet est à l'ordre du jour: faut-il changer le nom du Front national? La fille le souhaite, le père s'y oppose. A travers ce duel familial se joue l'habituel débat des anciens et des modernes, reflet d'une stratégie naming qui fait directement écho à une stratégie politique assez simple.

 

Au nom du père. Le Front national, à la différence de beaucoup d'autres partis politiques, est intimement lié au nom de son fondateur. Un nom qui sent le souffre et les dérapages plus ou moins contrôlés, un nom lié à une histoire, une image que l'héritière souhaite voir disparaitre. Seulement voilà, Le Pen fille porte le même nom que son père. C'est à ce nom qu'elle doit sa place.

 

Nom de marque politique. Jean-Marie Le Pen a déclaré que «le Front national n'était pas une marque commerciale». Seulement voilà, époque oblige ou le marketing politique remplit les urnes, les choses ne sont pas si simples. Un nom, qu'il soit celui d'un individu, d'une marque ou d'un parti politique, symbolise une réputation, un territoire, une différence.

 

Tuer le père. Sur un plan politique, Marine Le Pen a intérêt à voir son père disparaître au plus vite. Et à n'en pas douter, la présence du père limite la possibilité de changer le nom du parti. En attendant, elle avance à petit pas, par tests répétés, pour sentir si les sympathisants seraient plus nombreux.

 

Naming transition. Le nom du parti est un frein quand le nom de Le Pen s'efface peu à peu ou s'utilise en fonction des circonstances, des interlocuteurs. La base vote Le Pen et Front national, quand les sympathisants votent Marine et demain peut être pour un nom de parti différent. Le but de cette véritable stratégie naming consiste à jouer sur les deux tableaux avant d'enclencher la phase ultime, celle qui consistera à élargir considérablement la base des électeurs possibles pour qui le nom actuel du parti est encore un frein.

 

Jeu de sept familles. Dans la famille Le Pen, la petite-fille concentre à elle seule tous les enjeux de cette stratégie. Marion Maréchal-Le Pen ou le dernier avatar de la présence du nom historique, d'un nom qui dérange. Relégué ici au second plan, il ne sert plus que comme caution secondaire. Si alors entre-temps, et à n'en pas douter le nom du parti disparaissait, la métamorphose de l'hydre à trois têtes aura atteint son but.

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