Influence

La chief digital officer de Carrefour arrive en tête du classement Meltwater/Stratégies des CMO/CDO [chief marketing/digital officer] les plus influents. Elle revient sur son utilisation des réseaux sociaux et de la presse, et comment cela l'aide pour la transformation numérique du groupe. 

Vous êtes en tête de notre premier classement des CMO/CDO les plus influents. Avez-vous conscience de cette « influence » et pourquoi une telle présence ?

ÉLODIE PERTHUISOT. Je ne vise pas les classements, mais j'ai bien conscience de la puissance et de l’intérêt que peut avoir pour Carrefour une forte présence sur les réseaux sociaux et dans les médias. Ce sont des canaux parfaits pour accompagner les messages que je porte et expliquer notre transformation digitale. Donc j’utilise beaucoup les réseaux sociaux, notamment LinkedIn. Une telle transformation est une aventure collective, et les réseaux sociaux ont une résonance en interne comme en externe. C’est très important. Vous ne transformez pas une entreprise comme Carrefour, avec ses milliers de collaborateurs, sans les embarquer avec vous. D’autre part, les sujets dont j’ai la charge, sont multiples. Notre actualité a été florissante ces derniers mois, et les retombées médiatiques sont à l’image de nos actions. Nous bougeons beaucoup ! Enfin, j’ajouterai que le digital reste un sujet qui, à la fois, fascine, mais paraît encore lointain et complexe. Je me rends compte que nous avons des demandes de pédagogie de la part des followers, mais aussi des journalistes, lorsque je pointe ce que le digital peut faire sur le retail, de façon simple et concrète. Ce sont des sujets à fort engagement, et des milliers de gens se posent les mêmes questions dans d’autres industries. Cela fait écho aux problématiques qu’ils peuvent rencontrer.

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Mais vous ne pouvez pas cibler précisément les messages ?

Je poste, mais je like également sur les réseaux, donc j’entretiens des effets de communauté, qui peuvent être différents. J’ai trois grandes communautés : l’interne, la communauté du digital, et une communauté plus internationale. En interne, j’observe que cela crée beaucoup d’engagement. Tous nos collaborateurs ont de la famille, des amis, des collègues, qui fréquentent Carrefour. Nos collaborateurs sont aussi des ambassadeurs. Pour eux, s’engager via les réseaux sociaux, c’est aussi une façon de porter la transformation de la marque. Carrefour est une marque engagée ! Les collaborateurs peuvent ainsi participer à changer la perception de la marque.

Si vous étiez à un autre poste, auriez-vous la même utilisation des réseaux sociaux ?

J'occupe une fonction qui conduit une transformation digitale à un rythme extrêmement soutenu, donc j’ai naturellement accéléré mon utilisation des réseaux sociaux. Vous l’avez vu, un jour, nous nouons un partenariat avec Flink, le lendemain, nous sortons des NFT... Les réseaux sociaux sont en quelque sorte mon journal de bord de la transformation digitale de Carrefour. Si j’étais à un autre poste, j’utiliserais autrement ces outils, pour une autre aventure. Je ne pense pas du tout que ce soit exclusivement réservé aux sujets digitaux.

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Votre influence dans la presse ressort aussi beaucoup dans ce classement. C’est une volonté de votre part ?

J’ai beaucoup de sollicitations de la part de la presse car le digital interroge, et la pédagogie est nécessaire. Désormais, on se tourne assez naturellement vers Carrefour ou vers moi pour expliquer nos actions en matière digitale. Cela s’est accéléré depuis qu’Alexandre Bompard a présenté les axes clés de notre stratégie, lors du Digital Day, en 2021, avec les nombreuses annonces et initiatives qui ont suivi. Nous avons fait prendre conscience de l'ampleur que représentait le digital dans la transformation de Carrefour, de l’éventail des sujets. La presse nous permet de rentrer davantage dans les détails, de prendre plus de temps pour expliquer les concepts, les raisonnements. Quand je parle d’un algorithme, je prends le temps de le montrer aux journalistes, d’expliquer son fonctionnement. J’ai pu, par exemple, faire découvrir l’algorithme que nous avons réalisé pour manger plus sainement, en substituant un produit par un autre, et qui prend en compte l'éco-score. C’est plus concret.

De plus en plus de dirigeants embauchent des auteurs pour leurs réseaux sociaux. Vous gérez ces outils vous-même ?

Bien sûr. C'est mon journal de bord. Je n’ai pas besoin d’aller chercher ou d’inventer des sujets. Ce sont ceux que je pilote tous les jours. Je poste dans les transports, le soir... Je sais ce que j’ai écrit, ce que je like, je peux prendre moi-même les feedbacks sur les sujets. C’est peut-être moins parfait au regard des codes de LinkedIn, mais c’est plus naturel. On finit par créer ses propres codes. Et visiblement, le résultat est là... J’utilise plus fréquemment LinkedIn, et Twitter, de façon plus ponctuelle.

Le recrutement devient très disputé. Les réseaux sociaux sont-ils clés pour vous en RH ?

Énormément. Je dois vous avouer qu’avant de recevoir un candidat, je vais regarder le profil et les posts sur LinkedIn, avant même de regarder le CV. C’est un réflexe assez naturel. En termes de communication, c’est essentiel pour attirer des talents différents, notamment sur la transformation digitale, comme des ingénieurs. On ne vient pas travailler dans une entreprise pour les réseaux sociaux, mais cela crée une attractivité fondamentale. Cela change la culture de l’entreprise. Quand je partage une formation, en interne, avec Google, sur le machine learning, qui réunit 1000 personnes, cela donne envie aux collaborateurs de se former également ; à l’externe, cela change notre image et attire de futurs candidats qui viennent de la data, de la tech... Carrefour leur apparaît désormais comme une option naturelle. Ce qui n’était peut-être pas le cas avant. Tout cela demande du temps, c’est une vision de long terme. Et au bout du compte, ces candidats potentiels s’aperçoivent également que transformer une entreprise comme Carrefour peut être tout aussi passionnant que de créer leur start-up.

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