Les atouts du papier
Directrice générale du Syndicat des éditeurs de presse magazine [SEPM], Julie Lorimy revient sur le projet de loi, actuellement débattu au Parlement, relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire.

Qu’est-ce qui inquiète les éditeurs de presse magazine dans ce texte ?

Julie Lorimy. Le SEPM et les éditeurs de la presse magazine soutiennent pleinement les enjeux de développement durable et prennent leur part dans la transition écologique. Le système mis en place en 2017 est véritablement favorable à une économie durable et fonctionne très bien : les éditeurs doivent payer pour la collecte et le recyclage du papier et cette « écocontribution » est modulée en fonction de critères de recyclabilité des matériaux utilisés. Aujourd’hui, si l’éditeur est vertueux, cela lui donne la possibilité de payer sa contribution en nature par des pages de publicité gratuite en faveur du geste de tri systématique et de l’économie circulaire. La presse magazine est ainsi devenue un instrument important du changement des comportements des consommateurs. Hélas, le projet de loi prévoit de supprimer cette possibilité de contribuer en nature. Nous sommes opposés à cette mesure qui revient à imposer une nouvelle taxe au secteur de la presse qui, on le sait, est aujourd’hui dans une situation économique difficile.

 

Les éditeurs ont-ils pris conscience de leur responsabilité environnementale ?

Ils ont tout à fait et sans réserve pris conscience de cette responsabilité mais s’inquiètent de mesures qui seraient finalement contreproductives en matière de développement durable. Un exemple : la quasi obligation pour la presse magazine dans le projet de loi d’utiliser de la fibre recyclée plutôt que de la fibre vierge, alors même que les deux fibres sont nécessairement complémentaires (il faut un apport de fibre vierge pour produire de la fibre recyclée) et qu’il n’existe aucune offre en fibre recyclée de qualité magazine sur le territoire français. Cela conduira les éditeurs français à se fournir en Allemagne et outre la question de l’emploi, c’est clairement moins écologique que d’utiliser, comme le font actuellement les éditeurs de presse magazine, de la fibre vierge issue de forêts gérées durablement. Les éditeurs sont prêts pour un changement des pratiques mais si c’est pour aller vers du mieux et non pour des simples effets d’annonce, dont on s’apercevra dans quelque temps qu’elles nuisent à l’environnement.



Que demandez-vous aux pouvoirs publics ?

Il est important que l’État entre dans une logique de concertation avec toute la filière en prenant le temps d’identifier les mesures réellement efficaces. Un sujet, par exemple, avait été mis en avant dans la loi de transition énergétique pour la croissance verte : le blister « fossile » pour l’envoi aux abonnés a été interdit, au profit d’un blister compostable à domicile. Sauf que ce matériau se révèle difficilement compostable et coûte cher à recycler. Aujourd’hui, nous travaillons donc à des alternatives avec nos partenaires industriels, comme les enveloppes papier ou les envois à découvert. Il faut éviter toute précipitation.

Où en est le projet de loi ?

Le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire a été adopté en première lecture, avec modifications, par le Sénat le 27 septembre dernier. Les sénateurs ont notamment retoqué l’une des mesures phares du dispositif sur la consigne pour recyclage des bouteilles en plastique. Le texte devrait être examiné par l’Assemblée nationale début décembre.

Suivez dans Mon Stratégies les thématiques associées.

Vous pouvez sélectionner un tag en cliquant sur le drapeau.