Street artist
Fervente défenseure de la liberté d’expression, Claudie Baudry utilise les rues de Montmartre, libres de droit, pour y faire passer des messages. Quelques mots blanchissent les trottoirs, parfois des interrogations, avant de s'envoler sur les réseaux sociaux.

Assise à la terrasse d'un café, Claudie Baudry assiste à l’ascension de la Butte Montmartre par des touristes essoufflés. Un matin d’avril, munie de sa craie, elle décide de leur adresser un message directement sur le sol: «Ça monte, hein? ». Hilares, les passants et les voisins l’ont encouragée à perséver. C'est ainsi qu'elle a trouvé sa signature. Au lieu d’investir les murs de la rue, c’est sur les pavés que cette street-artist parisienne a choisi de s’exprimer. «Je tiens à être lue du ciel. Mon mari, Hervé Baudry [dessinateur de presse], est mort il y a un an et demi sur ce trottoir. Quand mes messages ont pris de l’ampleur, inconsciemment, j’ai continué à le faire pour qu’il les lise d’en haut», confesse-t-elle. Habituée à deviser de l’actualité, elle perpétue l'exercice avec une nouvelle communauté, celle des passants. Claudie, conceptrice-rédactrice de métier, est passée par les plus grandes agences dont BBDO, avant de se lancer en freelance. «Avoir baigné dans ce monde m’a appris la mécanique des phrases courtes, lourdes de sens. Avant, je les faisais sous les contraintes des briefs. Maintenant, je veux écrire pour moi», lance la nouvelle artiste. À défaut d'être sa source d’inspiration, le quartier de Montmartre devient une toile grandeur nature. Que ce soit pour crayonner des messages engagés ou des hommages à des personnalités. Et lorsque le 30 juin 2017, une grande dame s'en va, l’artiste lui adresse ces derniers mots: «Simone s’éteint. Les femmes restent en Veil». Buzz total. En plus des causes féministes et humanistes qu’elle tente, à son niveau, de défendre, Claudie Baudry souhaite contourner une censure qui s’est «trop confortablement installée». «Je n’attends pas des gens qu’ils soient forcément d’accord avec ce que j’écris, mais on a le droit de tout dire comme on a le droit de répondre. Je prends le risque de m’exprimer», assume-t-elle.

Côté vintage

Pour parer au caractère éphémère de ses publications, elle prend des photos en noir et blanc de ses messages. «J’adore le côté vintage, très années 50 que donne le noir et blanc, tout en rappelant l’esprit Doisneau et Walker Evans», souligne l’artiste. Une manière également de partager son oeuvre au-delà des rues parisiennes via son compte Instagram et sa page Facebook (@marueparachbe). Sur ces réseaux, elle a atteint très rapidement les 4000 abonnés et en dénombre aujourd’hui plus de 40000. «Mes pages sont bienveillantes, je ne rencontre ni sur les réseaux sociaux, ni dans la rue, d’hostilité. J’essaie d’entretenir une relation au-delà du virtuel avec mes abonnés», s'émerveille-t-elle. Reconnaissante face à cette soudaine notoriété, elle n'est pas pour autant du genre à se laisser griser par ce succès... Une modestie troublante de la part de cette artiste, qui expose pour la première fois entre les murs, au Central Dupon (Paris 18e), à voir ou à revoir jusqu’au 23 février. 

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