Communication interne
La conférence internationale Cop 21 autour du réchauffement climatique est un formidable prétexte de communication interne. A deux semaines de l’événement, les entreprises multiplient les initiatives.

La COP21 réunira 20 000 délégués du monde entier, au Bourget, du 30 novembre au 11 décembre, afin de plancher sur des solutions au réchauffement climatique… A Sciences Po Paris, on a organisé pendant deux jours une simulation des négociations. En coulisses, les entreprises sont également mobilisées depuis plusieurs mois en impliquant leurs salariés. C’est le cas parmi les très nombreux partenaires officiels: Engie, Renault-Nissan, EDF, ou Orange qui fournira par exemple les smartphones aux délégués présents et mobilisera 200 techniciens tout au long de la conférence. Il faut dire que la Cop 21 est l’occasion rêvée de communiquer et de fédérer ses collaborateurs autour du développement durable. A condition de ne pas tomber dans le greenwashing, comme le souligne Armelle Le Comte, chargée de plaidoyer climat et énergie chez Oxfam France.

Les exemples d’entreprise qui ont fait passer leurs salariés au vert ne manquent pas. Chez Renault-Nissan, les effectifs sont sur le pont depuis plusieurs mois. «Nous avons diffusé de l’information et des quiz aux 450 000 collaborateurs, dit Claire Martin, directrice de la responsabilité sociale du groupe Renault et leader pour l’alliance Renault-Nissan du projet Cop21. Nous avons par exemple expliqué à nos collaborateurs ce que l’entreprise a mis en place pour apporter des solutions afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le monde.» Et surtout à l’occasion de la Cop 21, 200 salariés du constructeur joueront les chauffeurs pour les délégués présents. «Nous avons lancé une campagne de recrutements de volontaires qui prendront en charge les délégués durant les quinze jours de la conférence, détaille Claire Martin. Nous avons reçu près de 500 candidatures et nous en avons retenu 40% (ouvriers, agents de maîtrise ou cadres).» 200 véhicules électriques (Renault Zoé, Nissan Leaf) offriront ainsi une solution de covoiturage aux délégués. Le travail des collaborateurs de Renault-Nissan ne se limitera pas à la conduite: «Ils ont suivi une journée et demie de formation, car ils devront aussi être les ambassadeurs des véhicules électriques, dit Claire Martin. Ils devront pouvoir répondre aux questions de leurs passagers. L’occasion de redonner du sens à leur travail.»

Points d'interrogation

Le groupe JC Decaux est également partenaire de la Cop 21. Et il aura des salariés déployés sur le site du Bourget, avec la mise à disposition de mobiliers et d’un kiosque à journaux, avec un vendeur multilingue.

Dans le cadre de l’opération «Paris de l’avenir», organisé par la mairie de Paris, le leader du mobilier urbain présentera au grand public une vingtaine d’e-VLS: vélo en libre-service à assistance électrique, sur le parvis de l’Hôtel de ville. Le groupe a habillé 450 véhicules franciliens aux couleurs de la Cop 21. Par ailleurs il propose à ses collaborateurs français un outil d'e-learning sur le développement durable. Celui-ci sera déployé à l’international en 2016. JC Decaux en a aussi profité pour communiquer vis-à-vis de ses salariés sur son bilan de gaz à effet de serre et sur les mesures prises pour le limiter les impacts.

Chez Engie (ex-GDF-Suez), les salariés sont invités à se poser des questions: «Nous avons organisé un débat interne pour nos 150 000 salariés du groupe autour de la thématique du climat, détaille Anne Chassagnette, directrice de la responsabilité environnementale et sociétale d’Engie. Comment ils vivent la transition énergétique? Ce qu’ils en pensent? Le rôle des uns et des autres? Il y a un fort niveau d'engagement.» Chacun a pu envoyer ses questions et une dizaine de réunions physiques sont prévues. Le groupe sera aussi présent au Grand Palais, à Paris, pour présenter ses solutions innovantes et il entend bien démontrer leur pertinence avec force arguments. Pour répondre aux critiques de green-washing des ONG (lire ci-dessous), Engie met en avant ses initiatives: «Nous avons créé un fond d’investissement qui doit investir 100 millions d’euros d’ici 2020 dans des solutions bas carbone, avance Anne Chassagnette, directrice de la responsabilité environnementale et sociétale d’Engie. Et puis nous aidons nos salariés qui ont des projets liées à l’énergie via un incubateur et certains d’entre eux sont bas-carbone.»

Le groupe Renault aussi, met en avant ses solutions pour limiter le réchauffement climatique: «En tant que constructeur automobile, nous sommes conscients de faire partie du problème des gaz à effet de serre, admet Claire Martin, directrice de la responsabilité sociale du groupe Renault. Mais dès 2007, nous avons investi 4 milliards d’euros pour développer une gamme de véhicules électriques.» Après les paroles, les actes ?

Sciences-Po réchauffe les négociations

Jérôme Guilbert, directeur de la communication de Sciences Po



Vous avez organisé la Cop 21 avant l’heure?

Jérôme Guilbert. Oui, plus de 200 étudiants (dont 58 étrangers) ont simulé la Cop 21, au Théâtre des Amandiers (Nanterre), du 26 au 31 mai dernier. L’idée vient de Laurence Tubiana, enseignante, qui dirige la chaire développement durable de Sciences Po, et est par ailleurs ambassadrice chargée des négociations sur le changement climatique pour la France, et de Bruno Latour (enseignant et sociologue). Les étudiants ont été répartis dans 42 délégations.

Cette simulation, avec les moyens des sciences sociales, du théâtre, du cinéma et des arts plastiques, a transformé le théâtre en un lieu d’expérimentation et d’invention, réunissant artistes, chercheurs et étudiants, pour qu’ils imaginent et expérimentent d’autres modes de représentation de la négociation climatique.

 

L’événement a pris de l’ampleur ?

J.G. «Paris Climat 2015 Make it Work», c’était une véritable répétition générale des négociations du sommet climatique international. Au terme de 48h de discussions, les étudiants sont parvenus à un accord. Cela a valeur de laboratoire pour les vraies négociations. D’ailleurs, l’ex vice-président Al Gore est venu soutenir le projet à Sciences Po. Le Label «Cop 21 make it work» est devenu une marque que nous avons déposée et que nous prêtons aux autres. Il y a eu depuis une quarantaine d’événements «Make it work». Des entreprises nous ont accompagnés sur cet événement: Renault, EDF, Rexel, la Poste, Axa…

 

«Gare au green-washing»

Le choix des sponsors officiels de la Cop21 pose problème aux ONG, comme Oxfam France. «Il y a trois groupes qui à nos yeux ont des activités nocives, directement ou indirectement sur le climat: Engie, EDF et BNP Paribas, note Armelle Le Comte, chargée de plaidoyer Climat et énergie chez Oxfam France. Nous avons rédigé un rapport avec les Amis de la terre qui pointe les activités charbons d’EDF et Engie dans le monde». L’ONG aurait aimé que l’Etat exige des prises de position claires des entreprises partenaires: «Qu’elles s’engagent à ne plus financer de centrales à charbon, ce qu’a fait Engie, note Armelle Le Comte. BNP Paribas reste la première banque française à financer des centrales à charbon dans le monde, alors que Crédit agricole et Natixis se sont engagés à ne plus le faire». La porte-parole d’Oxfam est, en revanche, favorable, à ce que les entreprises mobilisent leurs salariés sur ce sujet car cela peut permettre de les sensibiliser.

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