Femmes managers

En 1981, François Mitterrand nomme la première femme préfet de l'histoire de France: Yvette Chassagne. Pour Isabelle Schlumberger, directrice générale de JCDecaux, alors étudiante à Sciences Po, l'événement a son importance. «Mon ambition était de devenir la première femme préfet», raconte la quadragénaire dans un sourire. Tant pis pour la fonction publique, Isabelle Schlumberger part dans la finance, «un alphabet difficile à acquérir, mais une formidable manière d'appréhender l'entreprise, en la passant au scanner».
Dans son vaste bureau boisé et lumineux, où une rotonde donne sur les immeubles cossus de Neuilly, une photo, signée du prestigieux Studio Harcourt: Isabelle Schlumberger y pose, entourée de ses collaborateurs. «Je n'aime pas le travail solitaire, et ne me sens bien qu'en équipe», souligne-t-elle.

Si elle n'avait pas officié dans les médias, cette brune à la mise haute en couleur n'aurait pas détesté être chasseur de têtes. «J'aime m'entourer des meilleurs et les faire grandir, explique-t-elle. J'apprécie de me dire que dans cinq ans, mes collaborateurs ne seront plus aux mêmes postes. Même si cela implique qu'ils ne travaillent plus pour moi.» Et de citer l'exemple de tel membre de son équipe, parti pour JCDecaux à Shanghai, de tel autre, désormais à Bangalore… «Isabelle suscite beaucoup de mouvement, aussi bien au niveau national qu'international, remarque Isabelle Fourmentin, directrice générale déléguée de JCDecaux Airport. Elle pousse beaucoup ses N-1 et N-2, en leur proposant des postes auxquels ils n'auraient pas forcément pensé.»

Pour l'exemplarité

Que l'on ne s'y méprenne pas, cette mère de quatre enfants est loin de materner ses ouailles. «Je suis assez du genre “L'intendance suivra”, s'amuse-t-elle. Je suis exigeante, ce qui peut être perçu comme dure certains jours.» Tous ceux qui la côtoient le soulignent: «Isabelle ne supporte pas la médiocrité», comme le remarque Jeremy Male, PDG Grande-Bretagne et Europe du Nord de JCDecaux, qui a travaillé avec elle à Londres lorsqu'elle était directrice administrative de la filiale britannique d'Avenir, fusionnée en 2000 avec JCDecaux. «Elle ne fait pas de concessions et a une forte personnalité», note Jean Müller, directeur général délégué commerce et développement. «Je suis pour l'exemplarité, aussi bien au travail qu'avec les enfants», souligne cette manageuse qui se décrit comme «organisée de naissance».
Lorsqu'on lui parle de management au féminin, Isabelle Schlumberger tique: «Ce n'est pas une question d'hommes ou de femmes, plutôt de traits de personnalité.» Même chose lorsqu'on lui demande comment elle gère vie privée et vie professionnelle. «Je cloisonne bien, ce qui me permet d'avoir une vie équilibrée.» C'est d'ailleurs ce qui fait sa force: «Elle est très impliquée auprès de ses enfants, de ses parents, de ses beaux-parents, ainsi que dans la vie associative. Elle cultive des valeurs très appréciables», explique Jean Müller. Très active dans la communauté protestante, Isabelle Schlumberger est d'ailleurs administratrice du journal Réforme. De sa vie privée, elle évoque brièvement une maison en Grèce et sa passion pour la cuisine. Mais pas beaucoup plus. En plus du goût des autres, celui du secret.

 

Son parcours en bref :
25 avril 1962. Naissance à Nogent-sur-Marne.
1983. Diplômée de Sciences Po.

1980. Directrice adjointe à la direction financière de Groupe Havas Media.

1984. Membre de la direction financière de Groupe Havas.
1994. Directrice administrative et financière des filiales britanniques et irlandaises Sky Sites, Mills and Allen et David Allen à Londres.
1998. «Chief Operating Officer» de Sky Sites Londres, qui gère les transports.
2000. Suite à la fusion avec Avenir (juin 1999), directrice générale de JCDecaux Airport.
2006. Directrice générale commerce et développement de JCDecaux.

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