Le Post, Le Plus, le Lab d'Europe 1... Benoît Raphaël est un entrepreneur en série. Sa dernière création? Trendsboard, une start-up spécialisée dans la prédiction de buzz, c'est-à-dire l'analyse en temps réel des sujets qui vont faire l'actualité sur les réseaux sociaux. Une solution qu'il a déjà fait tester à une quinzaine de médias (Metro, Radio France, etc.) et qu'il commercialise aujourd'hui. Trendsboard a levé 500 000 euros, et l'équipe d'une petite dizaine de salariés se répartit entre Aix-en-Provence (où est installé son associé, Jean Véronis, sémanticien) et Paris (commercial et marketing).
Benoît Raphaël ne rencontre pas toujours le succès. Son aventure précédente, Fuzu, une plate-forme de développement de médias (qui a donné naissance au Lab d'Europe 1), a tourné court. «On s'est plantés sur la stratégie globale, le modèle économique n'était pas assez viable», reconnaît-il. Pas de quoi refroidir les ardeurs de ce féru d'innovation participative, qui mène toujours plusieurs projets de front. «De 2010 à 2013, mon entreprise, c'était mon réseau, d'ailleurs je pense que le manager d'aujourd'hui est moins un patron qui dirige verticalement, qu'un rouage essentiel d'un réseau qui va au-delà de ses équipes internes, explique-t-il. Avec le digital, il faut travailler différemment, quitte à créer plusieurs sociétés, afin d'autonomiser chaque projet.»
Du «temps libre novateur»
Avant d'être son propre patron, Benoît Raphaël a été «intrapreneur» (celui qui fait bouger les lignes dans son entreprise), en lançant par exemple Le Post au sein du groupe Le Monde. Ce n'est plus trop sa tasse de thé : «Les groupes n'offrent pas assez d'espace pour l'innovation, juge-t-il. J'ai toujours été freiné, étouffé par les changements de direction, les décisions politiques». En tant que manager, il tente aussi de suivre les traces de Google, qui laisse à ses salariés 20% de «temps libre novateur»: au Post, il accordait ainsi une journée par mois à ses collaborateurs pour qu'ils puissent se consacrer à d'autres projets.
A la tête de start-up, Benoît Raphaël ne se définit pas comme un patron «cool». «Il pousse les gens à donner le meilleur, peut être dur, exigeant, relate Aude Baron, rédactrice en chef du Plus du Nouvel Observateur, qui a collaboré avec lui pendant trois ans. Au début du Post, il pouvait être un peu cassant, puis il s'est ouvert au dialogue.»
Son goût pour l'innovation l'a poussé à prendre des décisions originales: comme la création d'un bistrot au sein de l'antenne locale du Dauphiné libéré àEchirolles (Isère), du temps où il y était journaliste: «Cela permettait de dialoguer avec les habitants, les jeunes du quartier et de nourrir le journal.» Donner la parole à ceux qui n'ont pas l'habitude de s'exprimer, voilà l'une des obsessions de Benoît Raphaël: c'est ce qu'il a fait au Dauphiné libéré, puis au Post et enfin au Plus du Nouvel Observateur. La montée en puissance des réseaux sociaux lui a donné raison. «Il prend des risques, car il a bien compris que dans l'économie numérique on peut tout tester; avec lui, un test chasse l'autre», souligne Aude Baron.
En 2007, s'il a été repéré par Bruno Patino, alors à la tête du Monde interactif c'est grâce au site Internet participatif Quel candidat, qu'il avait développé pour Le Dauphiné libéré lors de l'élection présidentielle. «Je dors toujours avec une nouvelle aventure numérique», conclut ce passionné qui fonce constamment tête baissée.
Son parcours en bref :
1970. Naissance à Grenoble (isère).
1996. Deug de droit.
2000. Journaliste au Dauphiné libéré, puis directeur adjoint de la rédaction de Vaucluse Matin. Chargé de mission innovation au Dauphiné libéré.
2007. Rédacteur en chef du Post.fr (Le Monde interactif).
2011. Cocréation du site Le Plus (Nouvel Observateur).
2011. Lance la start-up Fuzu, qui donne naissance au Lab d'Europe 1.
Fin 2012. Cofondation de Trendsboard.
