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Espace de développement, gage de fidélité et d’engagement, l’alternance permet aussi aux étudiants d’aller vers le CDI en toute connaissance de cause. Et à l’entreprise d’orienter des jeunes motivés vers des compétences rares ou émergentes.

L’alternance, voie royale vers le CDI ? Les chiffres publiés cet été le confirment. Une étude réalisée par OpinionWay(1) indique même que 92 % des employeurs proposent un CDI à la fin du contrat d’alternance et plus d’un cinquième (21 %) le fait « systématiquement ». Côté alternants, l’engouement est aussi au rendez-vous puisque près des trois quarts (73 %) déclarent avoir « envie d’être embauchés en CDI » par l’entreprise qui les a accueillis. Pour autant, attirer des alternants n’a rien d’une sinécure dans le secteur des médias et de la communication. Les jeunes diplômés des écoles de journalisme ou de marketing semblent plutôt attirés par des postes chez l’annonceur. « Ils ont le sentiment d’y avoir plus d’impact qu’en agence », glisse un responsable RH. Réussir une alternance exige aussi un investissement de la part de l’entreprise. « Avant de nous lancer dans le recrutement d’un alternant, nous vérifions que nous avons le temps et les projets nécessaires pour le/la former à nos process, à un métier. Le but est de lui donner toutes les compétences voulues afin qu’il soit employable sur le marché du travail au cours de sa formation », souligne Lucille Pheulpin, DRH de Castor & Pollux.

Le secteur de la communication n’est est pas moins friand d’alternants. Dentsu France en accueille ainsi chaque année 120 à 150. « Environ 60 % effectuent une période d’alternance sur douze mois, les autres peuvent aller jusqu’à 24 mois, précise Aymeric Kouadio, responsable des relations écoles. L’ensemble des alternants présents dans le groupe représentent 17 % des effectifs et la moitié de nos recrutements annuels au global. » À BETC, les alternants représentent 4 % à 5 % de l’effectif global (900 personnes). « Nous comptons 30 à 40 alternants, et 80 %, en moyenne, sont ensuite recrutés dans les effectifs permanents, précise Sophie Paris, directrice du recrutement. Globalement, les alternants représentent 6 % à 8 % du total des recrutements. » Même les agences de taille (encore) modeste s’y sont mises. Chez Castor & Pollux, qui compte une soixantaine de collaborateurs, les alternants comptent pour 5 % à 7 % de l’effectif. « En 2021, nous avions cinq alternants et nous avons proposé à quatre d’entre eux de poursuivre en CDI », indique la DRH Lucille Pheulpin.

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Le nombre de ceux qui poursuivent leur carrière au sein de l’entreprise ne cesse de croître. Dentsu France a ainsi fait passer le « taux de rétention » d’un étiage habituel de 35 % à 50 % à la mi-2022 et compte encore progresser avant la fin de l’année en organisant des « jobs dating » internes qui font l’objet de sondages dans une optique d’amélioration continue. « Les alternants connaissent le processus et anticipent en s’informant sur les différents postes à pourvoir dans les équipes », indique Aymeric Kouadio. Castor & Pollux assure proposer un contrat neuf fois sur dix dès lors que l’alternance a été concluante pour le manager et qu’il existe une ouverture de poste en CDI. « Lorsque nous ne le proposons pas à l’alternant/e, c’est que l’ouverture de poste est destinée à un profil senior », affirme Lucille Pheulpin. Si Ogilvy ne recrute pour l’heure que deux à quatre alternants en CDI chaque année, elle compte aller plus loin.

Pour assumer une telle ambition, rien de tel que d’améliorer l’expérience des alternants. D’autant qu’ils se sentent parfois bien seuls, étant souvent intégrés à l’entreprise comme d’authentiques salariés sans en avoir les codes. À Dentsu France, un « channel Teams » permet désormais de présenter les nouveaux arrivants à ceux qui sont déjà présents et de leur adresser des informations ciblées sur la vie en entreprise, leurs droits et obligations, etc.

« Cela permet à tous les alternants de se connaître et parfois d’apprendre qu’un nouveau venu est issu de leur école, voire de la même classe », détaille Aymeric Kouadio. Des rencontres réelles, semblables à des after work, sont aussi prévues dès le premier trimestre 2023. BETC a, de son côté, mené avec des écoles de commerce des études sur les attentes de la génération Z. « Elles soulignent qu’ils souhaitent plus de variété et surtout trouver du sens dans les missions proposées, explique Sophie Paris. Nous réfléchissons aux moyens de leur proposer plus de choses sur un même laps de temps. Il faut une réflexion poussée sur les parcours pour assurer l’engagement des alternants. » Pour l’améliorer, BETC leur a ouvert son Academy à travers un concours semestriel, leur offrant ainsi la possibilité de travailler sur des cas réels, et ils peuvent également participer chaque année à une dizaine de master class.

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Ogilvy a, pour sa part, décidé de confier le recrutement et l’animation des alternants à son talent manager déjà chargée de dénicher les stagiaires mais aussi de conclure des CDI ou des CDD. « Cette reconfiguration a pour objectif de donner à toutes les personnes recrutées une expérience de candidat homogène avec des messages clairs sur notre vision, notre culture et nos valeurs notamment », explique Lobna Calleja Ben Hassine, DRH de l’agence. Des événements dédiés exclusivement aux alternants sont aussi organisés régulièrement. « Le but est de faciliter leur intégration, de faire circuler l’information et que chacun trouve sa place, explique la DRH de Ogilvy. Nous organisons des points de suivi (RH / manager) très réguliers sur les premières semaines d’intégration et ce, jusqu’à ce que nos alternants aient pris leurs marques. »

Les avantages pour les agences

Pour Aymeric Kouadio, responsable des relations avec les écoles à Dentsu, l’alternance constitue un levier de recrutement particulièrement intéressant : « Recruter des alternants réduit les coûts globaux de recrutement en externe car nous ne passons pas par des cabinets de recrutement et nous capitalisons sur nos profils en interne qui sont déjà formés à nos métiers. Cela permet aussi d’améliorer la marque employeur grâce à la diversité des profils et des écoles d’où proviennent les alternants ou de décrocher des labels tels que HappyTrainees en 2020. Grâce à l’alternance, ces personnes connaissent notre environnement et nos métiers, ce qui facilite leur future intégration dans les équipes et elles ont la possibilité d’évoluer sur d’autres métiers transversaux au sein de Dentsu. » À ces avantages s’y ajoute un autre, poursuit Sophie Paris, directrice du recrutement de BETC : « L’alternance est un moyen qui permet de développer des savoir-faire spécifiques, soit dans des domaines pénuriques, soit en réponse à des besoins nouveaux. L’émergence du métavers pourrait par exemple être l’occasion de former certains alternants. »

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