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Alors que la consommation de contenus éditoriaux passe de plus en plus par les supports numériques, les éditeurs de presse divergent sur la manière d’organiser leur rayonnement sur le mobile et les réseaux sociaux.
Les médias sociaux, une menace ou une opportunité? La question taraude les producteurs de contenus depuis le début de la décennie. D’un côté, les Français consomment de plus en plus d’articles et de vidéos sur Facebook, Twitter, You Tube et autre Snapchat depuis leur smartphone. De l’autre, ces médias sociaux ont intérêt à enrichir l’offre présente sur leurs plateformes pour y retenir plus longtemps les mobinautes. Ils proposent donc à ces producteurs de contenus venus de tous horizons (chaînes TV, journaux, magazines, radios, pure players) d’adopter des formats facilitant la consommation d’articles, de vidéos et de photos depuis un mobile. En contrepartie, ils leur promettent un surcroît d’audience et de notoriété, ainsi que davantage de recettes publicitaires…
Ces formats qui accélèrent le téléchargement d’articles et de vidéos sur les mobiles changent effectivement la donne. En novembre 2015, Facebook lançait en France Instant Articles (IA), rejoint en 2016 par l'AMP (Accelerated Mobile Pages) de Google. Les éditeurs qui se convertissent à l’un ou l’autre de ces formats offrent un meilleur confort de lecture et gagnent en visibilité en apparaissant plus souvent en tête de page. Google a ainsi convaincu la moitié des cinquante sites médias les plus puissants de se convertir à AMP, selon Le Journal du Net. Ce format, qui permet d’émerger en tête des recherches sur l'écran du mobile lors d'une requête sur un thème d’actualité, s’est donc déjà imposé auprès de beaucoup d’éditeurs. De son côté,l'IA de Facebook a conquis Le Parisien, Libération et 20 Minutes, et bientôt l’AFP, parmi les grands médias généralistes et certains y puisent une part substantielle de leur audience. Le Parisien, qui convertit tous ses contenus dans ce format, réalisait ainsi en février dernier 20% de son trafic mobile (soit près de 8 millions de visites) avec IA. «Depuis que nous sommes sur Instant Articles, nous touchons une audience plus large. C’est donc une opportunité pour notre marque. Reste cependant les sujets de certification d’audience – nous menons actuellement des tests avec AT internet, l’ACPM [Alliance pour les chiffres de la presse et des médias] et Facebook – et de monétisation sur lesquels nous sommes très vigilants», commente Guillaume Bournizien, digital marketing manager du Parisien.
Le nerf de la guerre
Mais certains éditeurs craignent déjà de trop dépendre de ces plates-formes extérieures. Le Monde, Le Figaro, L’Equipe ou encore Les Echos veulent privilégier leurs propres canaux de diffusion, et n’ont donc pas souscrit à Instant Article, perçu comme trop fermé et rigide dans son fonctionnement. «Nous tenons à ce que nos articles soient lus dans notre environnement et à conserver une relation directe avec notre audience», justifie Bertrand Gié, directeur des médias numériques du Figaro.
Dans les pays anglo-saxons, plus avancés dans ce processus, le basculement des contenus vers les médias sociaux suscite aussi des réticences. Outre-Manche, les éditeurs de presse ont alerté récemment le gouvernement que les plateformes extérieures qui agrègent l’information, comme Facebook et Google, menaçaient la pluralité des médias en les dépouillant de leur audience et de leurs revenus publicitaires. Et d’en appeler à ce que l’Etat prenne des mesures de sauvegarde. Aux Etats-Unis, 36% des lecteurs consultent des articles en se rendant directement sur les sites des médias concernés et 35% en passant par des plateformes extérieures (Facebook, Twitter, Google Actualités), selon une étude de The Pew Research. Ce faisant, les éditeurs perdent l’accès aux données de leurs visiteurs, qui constituent le nerf de la guerre pour vendre de la publicité, des contenus et des abonnements numériques.
Inquiets de ce basculement, de grands éditeurs américains ont fait volte-face: faute d’une monétisation suffisante, The New York Times, le groupe Hearst, Vice News, Forbes et le Los Angeles Times, ont annoncé leur retrait d'Instant Articles tandis que d’autres, tel Condé Nast, réduisaient la voilure. Sachant qu’Instant Articles privilégie la rapidité de téléchargement, mais limite la publicité, les éditeurs devaient compenser par un surcroît d’audience permettant de vendre leur espace plus cher. Or, ces espoirs ont été déçus aux Etats-Unis. En outre, Facebook a changé entre temps son algorithme pour redonner la priorité aux contenus postés par les amis, non ceux des médias. Et les Facebook Stories lancées récemment demeurent réservées aux posts d’utilisateurs individuels et fermés aux éditeurs.
Adaptation en presse, attente en radio
Le réseau social de Mark Zuckenberg a tout de même fait des concessions pour apaiser ces inquiétudes. Les éditeurs de presse peuvent désormais commercialiser sur Instant Articles des formats publicitaires plus lucratifs (vidéo, branded content), insérer des boutons «call-to-action» incitant à cliquer, télécharger ou se rediriger vers le site de l’éditeur qui promeut ainsi ses abonnements et d’autres contenus. Ces aménagements vont-ils suffire? En France, «il suffirait qu’un seul des grands quotidiens réfractaires morde à la carotte de l’audience que leur promet Instant Articles pour que les autres suivent, histoire de ne pas laisser se distancer. Et ce d’autant que les règles de comptabilisation de cette audience mobile vont changer», explique Matthieu Stefani, directeur de l'agence de conseil en digital Cosa Vostra.
La section Discover de Snapchat, qui accueille les stories de titres comme Le Monde, L’Equipe et Paris Match, suscite moins de réticences. Au prix d'une adaptation de leur contenu éditorial, ces titres touchent une audience plus jeune et engrangent des recettes publicitaires partagées avec Snapchat. Cette audience étant complémentaire de celle qui vient directement sur leur site, ces publications considèrent que le risque de cannibalisation est limité, ce qui n’est pas forcément le cas de Facebook, au public plus mature.
NRJ s’inscrit dans une démarche différente avec Snapchat: il s'agit de promouvoir l'antenne auprès des adolescents et non de l'utiliser comme support publicitaire. «Nous créons sur Snapchat des événements pour les inciter à télécharger notre application mobile, mais les annonceurs ne peuvent pas diffuser de publicité sur notre espace Snapchat, dont l’audience varie énormément en fonction de ce que nous postons» explique-t-on à la radio. Ainsi, le 27 mars dernier, la radio lançait sa NRJ Snap Story. Les auditeurs connectés vivaient toute une journée au rythme de la radio en visionnant des vidéos tournées via une caméra subjective suivant les animateurs et leurs invités.
Du côté de RTL.fr, dont près d’un quart de l’audience transite par les réseaux sociaux, la question de la monétisation de l’audience se pose déjà. «Pour le moment, nous ne pouvons vendre nos audiences réalisées via les réseaux, ce qui est très problématique pour des éditeurs premium comme nous car cette part progresse doucement, mais constamment», précise Antoine Daccord, directeur de la rédaction numérique et du développement, qui note cependant que l’offre Amplify de Twitter devrait changer dans les prochains mois. En attendant que celles de Facebook, actuellement en test aux Etats-Unis, débarquent en France.
Approches variées pour les chaînes TV
Pour les chaînes de télévision, l’enjeu se situe davantage sur You Tube. Et, là encore, l’approche est très pragmatique. «La valeur du contenu mis en ligne doit être corrélée à celle que la plateforme externe permet de créer. Pour cette raison, la diffusion sur les médias sociaux se limite à des extraits de nos programmes, qu’on a pu voir préalablement et intégralement sur la chaîne TF1 ou sur My TF1, avec un décalage de plusieurs semaines ou mois», résume Olivier Abécassis, directeur innovation et digital du groupe TF1. En vertu de quoi, You Tube ne diffuse que de courts extraits de The Voice, soit une durée suffisante pour faire le buzz, mais trop peu pour dissuader les fans de se connecter à My TF1, qui engrange de la publicité. M6 est dans la même approche au profit de sa plateforme 6-Play.
Pour toucher les jeunes, la chaîne Franceinfo vient de son côté de créer des chaînes de journalistes sur You Tube. Grâce à son partenariat avec la plateforme Brut, le groupe propose aussi des vidéos qui se veulent «une nouvelle manière d'appréhender l'actualité» pour les jeunes sur les réseaux sociaux. L'antenne comme les offres numériques de Franceinfo en profitent.
Le pure player Melty Group aspire, lui, à un équilibre de la diffusion de ses contenus et de ses revenus publicitaires entre canaux internes et externes: «Il y a un an, la quasi-totalité de notre chiffre d’affaires publicitaire se faisait sur nos cinq sites. Aujourd’hui, un tiers vient des médias sociaux, comme Facebook et Snapchat, et nous nous en félicitons. Mieux vaut marcher sur trois jambes que sur une seule», estime Jérémie Clévy, président de Melty Group. L'avenir est clairement à la vidéo sur mobile et sur toutes les plateformes.
- tf1,