Les services de géolocalisation font tout juste leur apparition dans le monde des médias mobiles. Le besoin croissant d’information contextualisée chez les utilisateurs leur assure un grand avenir.

Environ 15% des téléphones mobiles achetés en 2009 par les Français étaient des combinés multimédias, les fameux smartphones. Parmi ces terminaux nouvelle génération, nombreux sont ceux à être équipés d'une puce GPS (Iphone, Blackberry ou Android). Or, plus de la moitié des propriétaires de smartphones équipés d'un forfait Internet illimité utilisent déjà régulièrement cette fonction GPS. «La géolocalisation donne tout son sens à la mobilité car l'interaction qu'elle offre permet au téléphone de faire le lien entre les mondes physique et numérique», souligne d'emblée Thomas Husson, analyste senior au cabinet Forrester.

Selon les spécialistes du marketing, recevoir des informations – éditoriales ou commerciales – contextualisées serait par ailleurs le souhait de tout utilisateur de téléphone portable. Un rêve sur le point de devenir réalité et qui n'a pas échappé aux médias, même si, début 2010, peu de médias français proposent des services de géolocalisation. Les applications Iphone du magazine Première et d'Allociné se sont distinguées en proposant d'emblée une localisation gratuite des salles de cinéma les plus proches de l'utilisateur. Après Première, le groupe Lagardère sortira prochainement l'application Football.fr, qui permettra d'identifier le bar du quartier qui diffuse justement la rencontre qui vous fait vibrer… «Cette notion de service pratique sur le mobile nous paraît quelque chose de vraiment distinctif par rapport au Web», souligne Emmanuel Vacher, directeur marketing et commercialisation de Lagardère Active. Même utilisation de géolocalisation du côté de Radio France qui, avec son application gratuite France Bleu, permet l'écoute en direct sur son Iphone de la station locale la plus proche de l'endroit où l'on se trouve.

Au-delà du service de proximité, certains médias y voient aussi l'opportunité d'apporter à leur public de l'information locale. Ainsi, l'application Iphone de France Télévisions donne accès à de l'information régionale contextualisée, à la météo locale et à l'information trafic de sa région en temps réel. Et si dans les faits il y a encore peu d'exemples, la déclinaison locale de l'information sur mobile est bien dans tous les projets des développeurs médias.

«Le cap technologique a été franchi. À nous maintenant d'inventer les déclinaisons locales de notre contenu», affirme Otman Meriche, directeur du développement commercial à l'AFP. L'agence de presse s'y est d'ailleurs employé avec la création des sites et applications mobiles de treize quotidiens régionaux français (lire page 32).

L'autre intérêt de la géolocalisation pour les médias réside dans la publicité. Sur ce terrain, marques et médias marchent main dans la main. Lemonde.fr a ainsi commercialisé une campagne géolocalisée de l'annonceur Novotel qui permettait à l'utilisateur de l'application Iphone du média d'identifier l'hôtel le plus proche de sa position, un dispositif interactif pour un budget de 20 000 euros comprenant une semaine d'exclusivité en bannière sur la page d'accueil de l'application ainsi que la solution de géolocalisation.

Autre exemple, celui imaginé entre Elle à table et La Semaine du goût. Le groupe Lagardère Active, propriétaire du titre, a ainsi proposé aux utilisateurs de l'application mobile d'avoir accès à une carte des restaurants associés à l'opération événementielle. En cliquant sur une bannière publicitaire, le mobinaute pouvait obtenir le plan et le numéro de téléphone de l'établissement qui l'intéressait.

Les médias sociaux occupent le terrain

Si les médias traditionnels sont encore dans une phase d'observation, les médias sociaux, eux, se sont déjà emparés de la localisation. Aux États-Unis, des services d'un nouveau genre sont en pleine ascension. Leurs noms : Foursquare, Gowalla et Mytown, entre autres. Ils permettent à l'utilisateur de se situer géographiquement via son GPS mobile et d'avoir accès gratuitement aux commentaires des autres mobinautes sur les cafés du quartier, mais aussi de profiter de réductions.

Disponibles également via Facebook ou Twitter, ils ajoutent une dimension supplémentaire à ces réseaux sociaux déjà bien installés : partager avec vos amis (ou «followers») vos lieux favoris et les inciter à vous rejoindre s'ils sont à proximité. «Avec ces services, le réseau social de localisation devient également jeu en réseau», note Thomas Husson, de Forrester.

Ainsi, avec Foursquare, le but est de devenir le «maire» virtuel d'une zone grâce à un système de «badges». Quant à l'application Mytown, dernière arrivée sur le marché, elle emprunte plusieurs aspects du jeu Monopoly. Si Foursquare est déjà disponible en France, il côtoie également un acteur français, l'application baptisée Dis-moi où. «Nous avons été téléchargés 500 000 fois et 500 commerces professionnels sont déjà affiliés à notre réseau», explique Gilles Barbier, son directeur général. Ce service s'appuie sur le même principe que ses cousins américains : après avoir été localisé, il permet à l'utilisateur de bénéficier de coupons «bonnes affaires» dans les commerces alentour.

Même le poids lourd des moteurs de recherche est de la partie. En 2009, il proposait Google Latitude, qui permettait, via Google Maps, de localiser les mobiles de vos amis. En janvier 2010, il a lancé une nouvelle option, intitulée «Near me Now». Disponible aux États-Unis, elle permet aux possesseurs d'Iphone et de téléphones Android munis de GPS de se géolocaliser et de bénéficier d'informations de proximité. Nul doute que Google ne tardera pas à diffuser de la publicité d'annonceurs locaux par ce biais.

Certains médias parient déjà sur ces nouveaux services. Ainsi, au Canada, le quotidien gratuit Metro vient de s'associer avec Foursquare. «Nous allons maintenant pouvoir mettre en valeur nos articles au moment et à l'endroit exact où ils sont le plus utiles, ce qui en un sens est une idée révolutionnaire», estime Jodi Brown, directeur du marketing et du service interactif de Metro Canada. Toutefois, «pour que ce type de services grossissent, ils devront rester fondés sur le volontariat. C'est l'utilisateur qui doit décider de se géolocaliser, sinon, il y a risque de rejet», nuance Thomas Husson.

Avec cette logique de couponing ou d'articles géolocalisés, on entre donc de plain-pied dans le marketing de l'hyperlocal à qui tous les spécialistes du secteur promettent un grand avenir dans les trois à cinq ans qui viennent. Les médias devront vite y trouver leur place.

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