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Le terminal mobile est enfin devenu un support publicitaire attractif pour les marques. Prochaines étapes: mesurer son audience exacte et continuer à exploiter ses possibilités technologiques.

Des voyagistes aux constructeurs automobiles, de la banque au luxe, plus de cent marques communiquent aujourd'hui activement sur le mobile en France. Parmi les derniers arrivés, la grande distribution. Depuis janvier, Franprix propose ainsi sur Iphone une application réalisée par The CRM Mobile Corp permettant d'enregistrer sa liste de courses à partir de la base de produits du «Marché Franprix», qui permet également de géolocaliser les points de vente à proximité. Une application de service révélatrice des nouveaux usages mobiles de plus en plus recherchés par les annonceurs.

Côté terminaux, l'élément évangélisateur reste bien sûr l'Iphone. Accompagné par les forfaits Internet mobile illimités, le téléphone d'Apple en a décidé plus d'un à s'attaquer enfin au mobile. Conséquence: «Selon la même mécanique qu'Internet il y a dix ans, de plus en plus de marques intègrent le mobile dans leur stratégie médias», explique Thomas Husson, analyste senior chez Forrester Research.

Meilleure preuve de cette évolution: chez les annonceurs, la stratégie mobile est désormais aux mains de nouveaux acteurs. Si l'on ne rencontre pas encore de «patrons du mobile» comme aux États-Unis, les agences reconnaissent que leurs interlocuteurs chez le client ont changé. «La stratégie mobile occupe désormais 20% à 30% du temps d'un responsable du numérique chez un annonceur», estime Alexandre Mars, PDG de l'agence Phonevalley (Publicis).

Côté chiffres, la communication publicitaire sur mobile est aujourd'hui estimée à 23 millions d'euros net de chiffre d'affaires en 2009, selon Cap-Gemini Consulting. Et les usages s'intensifient: 31% des possesseurs de mobile seraient des mobinautes, d'après une enquête Ipsos/AFMM de 2009. Près de 75% de ces mobinautes ont moins de 35 ans et 29% d'entre eux se connectent au moins une fois par jour.

Catalogue d'applications maison

Dès lors, pour devenir un média à part entière, il ne manquait plus au mobile que sa propre mesure d'audience. Ce sera chose faite à partir d'octobre grâce à Médiamétrie. À cette date, les annonceurs auront à leur disposition une vision exhaustive des sites et des applications mobiles consultés, mais aussi une qualification de l'audience des sites mesurés.

Une qualification devenue indispensable face à une navigation mobile qui ne cesse de croître, le renouvellement du parc de terminaux dopant logiquement les usages. «Ils se répartissent en deux catégories: je suis dans le bus et soit j'ai du temps à perdre donc je joue ou je me cultive, soit je dois gagner du temps et je cherche des renseignements précis sur ma destination, l'actualité, etc.», souligne Alexandre Mars. La complémentarité entre site et application permet d'ailleurs de répondre à ce double usage que les utilisateurs attendent. Pour son application Iphone développée par Phonevalley, l'horloger de luxe Jaeger-LeCoultre a ainsi imaginé un moyen de cultiver ses utilisateurs via des «cours de montre» renouvelés tous les quinze jours.

Aucun doute, les applications ont le vent en poupe. Dans le sillage d'Apple, Android, Nokia ou Blackberry continuent de développer leur catalogue d'applications maison. «Pour une marque comme Fanta et l'opération-jeu Transforme ta voix, nous avons imaginé une application mobile en Java. Une technologie accessible par un grand nombre de terminaux et beaucoup plus pertinente sur une cible 12-19 ans peu équipée en Iphone», rappelle Antoine Levêque, PDG de l'agence Marvellous (Isobar-Aegis). Apple n'a cependant pas dit son dernier mot: l'arrivée sur le marché de l'Ipad devrait aussi favoriser le développement du marché mobile. «Via ces tablettes de salon, on va pouvoir cibler les utilisateurs dans la maison», estime Paul Amsellem, directeur général de SBW Paris.

Logique hyperlocale

Autre usage mobile que 2010 devrait consacrer: la recherche. À la fin de l'année, celle-ci sera l'une des cinq applications les plus utilisées sur mobile. Des nouveaux outils comme la géolocalisation vont la doper. C'est donc sur ce terrain que les régies développent leurs offres. «Même si peu d'annonceurs y ont encore recours, c'est incontestablement la grande tendance mobile de demain», confirme Philippe des Cars, cofondateur de la régie indépendante M Brand 3. SFR Régie vient, elle, de se lancer dans le «mobile street marketing». Ce dispositif permet à une enseigne d'envoyer ses promotions par SMS sur les mobiles des clients SFR qui se trouvent dans un périmètre de 200 mètres autour du magasin. L'offre concernera fin 2010 les 3 millions de clients inscrits au programme Promo Live. «Notre but est de créer du trafic en point de vente pour les annonceurs», souligne Patricia Lévy, directrice général de SFR Régie.

Le petit commerçant aura, lui aussi, sa carte à jouer dans ces logiques hyperlocales. C'est notamment à lui que s'adresse la régie Digital Advert via son offre Smart App. Celle-ci propose la création d'un minisite standardisé qui intègre les fonctionnalités les plus demandées par les annonceurs. Ou comment s'offrir une visibilité mobile de manière simplifiée.

L'annonceur qui a la plus grosse carte à jouer dans la géolocalisation est évidemment Pages jaunes. «La partie cartographie est capitale sur le mobile, et environ 35% de nos demandes sur Iphone sont déjà géolocalisées, explique Valérie Schwartz, directrice des services en mobilité de Pages jaunes. Il faudra bientôt intégrer une dimension communautaire à nos contenus pour continuer à intéresser le mobinaute.» À présent que son audience mobile est acquise, la marque réfléchit à une monétisation publicitaire géolocalisée de ses contenus.

Faire remonter l'information

La réalité augmentée figure elle aussi parmi les grands bouleversements à venir. Dans la rue, téléphone en main, un immeuble vous plaît? Apparaissent aussitôt sur votre écran les annonces immobilières le concernant. Bientôt disponible en France, le néerlandais Layar a développé l'une des premières applications en réalité augmentée dans l'immobilier. Mais les déclinaisons d'une telle technologie sont infinies. «Pour des acteurs comme la grande distribution, cela promet un potentiel énorme», souligne Sébastien Berten, président de l'agence Backelite (Fullsix). En France, l'application Ici info lancée par Bouygues Telecom propose déjà la réalité augmentée sur Android (Google). Un service auquel Pages jaunes et Mappy se sont notamment associés. «Nous travaillons sur cette technologie car nous avons beaucoup de contenus à diffuser pour occuper notre client quand il voyage dans nos trains», confie Régine Combremont, responsable de SNCF Direct, qui espère ainsi conserver son avance sur le mobile.

Enfin, au-delà de ces nouveaux outils, les marques devront aussi apprendre à mieux jouer avec ce média. «Le mobile est un canal de remontée d'information des utilisateurs vers la marque et de partage d'infos entre eux, mais surtout pas un canal de descente d'information de la marque vers les utilisateurs», estime Ludovic Delaherche, vice-président marketing d'Eyeka. Autrement dit, un annonceur ne doit pas chercher à utiliser les portables pour «parler» mais plutôt pour «écouter».

 

Anne-Lise Carlo

 

Comment marketer son application Iphone ?

Rançon du succès, des études sur l'App Store (le magasin d'applications d'Apple) ont vu le jour chez des agences comme Faber Novel ou User Adgents. Premier constat: que celle-ci soit gratuite ou payante, le temps d'exposition d'une application dans l'App Store est très limité. Environ 280 applications sont lancées chaque jour sur l'App Store France, selon User Adgents. S'appuyant sur leur client RATP, Faber Novel a découvert qu'Apple ne prenait en compte que les quatre derniers jours pour pondérer son classement. D'où l'intérêt de concentrer la promotion de son application lors de son lancement. Autre levier: développer sa gamme de produits, à l'instar de la RATP avec RATP Premium et RATP Lite (gratuit). Enfin, ce marché semble être ultrasensible au prix. Une baisse du coût de RATP Premium (de 1,59 à 0,79 euro) a eu un réel impact : les ventes ont été multipliées par trois.

 

Des chiffres

23 millions d'euros. Marché de la publicité sur mobile en 2009.

10 à 15 millions. Nombre d'individus se connectant à l'Internet mobile.

Entre 20000 et 40000 euros. Coût d'une campagne mobile (hors frais technologiques).

Entre 100000 et 300000 euros. Coût d'un site mobile.

Entre 50000 et 150000 euros. Coût d'une application mobile.

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