Dossier
À quoi ressemble le panorama actuel de la presse masculine ? Comment les annonceurs ciblent-ils le mâle à la télévision ? Internet rassemble-t-il des communautés d'hommes ?

Presse

Tous derrière et GQ devant

GQ est un phénomène, et pas seulement dans son secteur. Selon l'étude Audipresse 2011/2012, c'est l'un des titres qui, toutes catégories confondues, progressent le plus en audience (18,2%). « Seul Détente Jardin, avec 18,9%, fait mieux que nous », se félicite son éditeur, Louis Orlianges. En quelques années - GQ soufflera en mars prochain ses cinq bougies -, le mensuel de Condé Nast est devenu le premier masculin français (hors supplément). Sa diffusion France payée s'établit à 95 681 exemplaires, selon l'OJD, en progression de 4,3%.

Qui GQ séduit-il ? Selon la dernière étude One d'Audipresse 2011-2012, les lecteurs de ce magazine sont à 71% des hommes, âgés de 15 à 24 ans pour 46% d'entre eux, et le taux de pénétration de GQ augmente avec le niveau de vie de la cible : 4,2% pour les revenus supérieurs à 115 000 € par an, contre 1,1% en moyenne. Sur le plan publicitaire, GQ fait là encore le plein. « Le chiffre d'affaires sera en hausse de 7% fin 2012, annonce Louis Orlianges. En dehors de l'automobile, tous les secteurs progressent, l'habillement et les accessoires de 4% et la toilette-beauté de 54%. » Un annonceur comme Procter & Gamble a ainsi plus que doublé sa pagination chez GQ cette année.

Le mensuel, qui compte une vingtaine de journalistes permanents, voit la vie en rose. Il a lancé son premier hors-série le mois dernier, Le Manuel du style, proposé à 9,90 €. En à peine trois semaines 10 000 exemplaires se sont déjà écoulés.

Autre success story, celle de The Good Life. Mi-lifestyle mi-business, ce « mook » lancé en octobre 2011 à raison de cinq numéros par an vient de publier son n°6, intégralement consacré à New York. 350 pages sur Big Apple, pas moins ! « Quand j'ai sorti, grâce au succès d'Ideat, ce nouveau titre, raconte l'éditeur Laurent Blanc, je ne m'attendais absolument pas à en vendre 50 000 exemplaires dès le premier numéro. Ensuite, j'ai pensé que l'effet de surprise avait joué et que ça allait retomber très vite. Mais sur les cinq premiers numéros, nous sommes à 42 000 exemplaires de moyenne, dont 5 500 abonnés. C'est un petit miracle et, à ce niveau-là, ce n'est plus une niche. »

Du coup, les annonceurs suivent. Sur l'ensemble des six premières parutions, The Good Life a engrangé 420 pages de publicité, négociées au prix moyen net de 6 000 €. Si bien que le magazine va atteindre l'équilibre dès la fin 2012. Et internaliser au passage sa régie publicitaire, confiée jusqu'alors à L'Express.

Derrière ces titres qui tirent leur épingle du jeu, le paysage de la presse masculine est plutôt amorphe. Les marques historiques sont en régression. FHM, d'abord, que nombre de kiosquiers, au vu de sa veine très Playboy, ont relégué au rayon des people et qui n'écoulait plus, l'an dernier, que 70 000 exemplaires, en baisse de 20% sur l'année. Men's Health, sur le créneau de la forme, est pour sa part à 42 182 exemplaires, selon les derniers chiffres de l'OJD (-1,3%), à peine plus que L'Optimum (35 151 exemplaires OJD en 2011, en baisse de 6,6%).

Pour compléter le paysage de la presse masculine, ajoutons des titres comme Vogue Hommes (Condé Nast) ou L'Officiel Hommes, des revues confidentielles, Edgar, Monsieur ou Dandy. Sans oublier L'Equipe Sport & Style, diffusé gratuitement le premier samedi du mois avec le quotidien sportif : un concurrent redoutable sur le plan publicitaire...

 

(tableau) Top 10 de l'affinité presse sur la cible hommes

Titre Indice d'affinité
FHM 274
L'Argus de l'automobile 236
L'Équipe 232
France Football 225
Onze Mondial 198
L'Automobile Magazine 198
L'Ordinateur individuel SVM 194
Auto Plus 190
Auto Moto 189
Tiercé Magazine 181

(source: Audipresse, étude One 2011-2012)


Télévision

Les hommes détronent les ménagères

Devinette : combien pèse, dans les achats des annonceurs, la célèbre ménagère de moins de 50 ans, autrement appelée responsable des achats, dans une chaîne comme TF1 pourtant guère réputée pour son élitisme ? Réponse : 4 %. Eh oui, cela fait belle lurette que les annonceurs ont changé de stratégie. La cible des 25-49 ans pèse ainsi pas loin de 20% des achats.

« On remarque trois grandes tendances dans le ciblage des annonceurs, explique Laurent Bliaut, directeur général adjoint de TF1 Publicité. D'abord le vieillissement. Avant, on s'arrêtait à 50 ans, maintenant on cible plutôt jusqu'à 60 ans. Ensuite, la volonté de toucher l'individu en lui-même plutôt que le seul responsable des achats, car les annonceurs veulent s'adresser à tous ceux qui interviennent dans le processus d'achat. Enfin, et ce n'est pas la tendance la moins forte, on assiste à une volonté d'avoir plus de mixité, en ciblant à la fois les hommes et les femmes, et plus seulement ces dernières. »

Pour répondre aux attentes de leurs clients, TF1 vient d'ailleurs de leur présenter une nouvelle cible socio-démographique, baptisée les « shoppers ». Il s'agit des actifs ayant des enfants de moins de 25 ans encore au foyer. Cette cible, aux revenus plus élevés que la moyenne, surconsommatrice en grande distribution, représente 15,6 millions d'individus, soit 31% de la population âgée de 15 ans et plus. « La réalité de la société française, ajoute Laurent Bliaut, c'est que 35% des responsables des achats sont des hommes. »

Pour toucher la gent masculine devant son poste, les annonceurs chouchoutent toujours les écrans placés en contexte sportif, mais ciblent aussi de plus en plus les programmes mixtes, séries américaines, films et même les fictions françaises. « La recherche d'efficacité qui caractérise les hommes lors de l'acte d'achat se retrouve logiquement dans leur consommation média, analyse de son côté Nicolas Izel, channel planner chez Saatchi & Saatchi Duke. Cela se traduit par une surconsommation des chaînes d'info. Du point de vue du ciblage des hommes, la TNT ouvre de nouvelles perspectives au média-planning. »


(tableau) Top 10 de l'affinité TV sur la cible hommes

Emission Chaîne Indice d'affinité
Very Bad Blagues/La Quotidienne D8 248
Turbo W9 245
Direct Auto Reportage D8 239
The Big Bang Theory NRJ 12 239
Spartacus les dieux de l'arène W9 237
Turbo (7/10) M6 228
Turbo (21/10) M6 228
Malcolm W9 224
L'Histoire secrète de James Bond France 4 222
Encore plus d'action W9 220

(Source: Médiamétrie. Période étudiée : 1er au 28 octobre 2012)

 

Internet

L'homme et les nouvelles technos font bon ménage
À première vue, Internet est le média rêvé pour toucher les hommes. « Ils ont, avec nouvelles technologies, le même rapport que les femmes entretiennent avec la mode, avance Nicolas Izel, chez Saatchi. Ce sont des "early adopters". Il est donc judicieux de les cibler en termes d'usage, en allant communiquer sur le web mobile, les tablettes, les smartphones... »

De fait, des structures spécialisées comme Men Invest ont vu le jour. Cette dernière a d'abord créé un site d'e-commerce, Men Look, devenu en deux ans le premier distributeur de mode haut de gamme masculine sur le Net, avant de lancer des activités de création de sites et de contenus sur la cible des hommes. « Notre groupe compte aujourd'hui 80 personnes, explique Pierre-Étienne Boilard, le président de Men Invest Media. Nous ne communiquons pas de chiffres parce que nous sommes encore en phase de démarrage, mais notre pôle médias, qui  comptait quatre personnes il y a un an, en totalise déjà une trentaine. »

Seulement, l'univers du Web masculin reste encore singulièrement éclaté. Pas d'équivalent masculin du site Auféminin, qui propose une approche horizontale de tous les sujets à partir d'une même plate-forme. Du coup, Men Invest tente de rassembler des sites de manière verticale, par centres d'intérêt (automobile, high tech, mode...) et, en cumulant leur audience, revendique une puissance de 11,5 millions de visiteurs uniques. La condition pour que l'eldorado ne soit pas qu'un mirage...

 

(tableau) Top de l'audience des sites Internet sur la cible des hommes

Site Audience en milliers
Google 7 843
Facebook 6 417
MSN/Windows Live 5 963
You Tube 5 704
Microsoft 5 345
Orange 4 429
Wikipedia 4 192
Free 4 169
Leboncoin.fr 4 145
Yahoo ! 3 739

(Source: Médiamétrie-NetRatings, juillet 2012. Cible: hommes de 25 à 49 ans)


(sous-papier) Le datasexuel, dernier avatar de l'homme moderne
C'est l'agence de publicité St John's qui a levé le lièvre à la rentrée. GQ, dans son numéro de novembre, lui consacrait aussi une longue enquête. Après le metrosexuel, séducteur moderne incarné notamment par David Beckham, puis l'übersexuel à la George Clooney, voilà donc le datasexuel, son avatar digital, un sociotype inventé au printemps par l'Américain Dominic Basulto. Pas tant un geek qu'un obsédé (à des degrés divers) de datas, comprenez de données personnelles, qu'il communique ensuite à ses « followers » sur les réseaux sociaux pour améliorer son image numérique. St John's s'est amusée à établir une sorte de carte de tendre du datasexuel, qui nous classe dans les catégories frigide, timide, lover ou carrément pervers ! « Au-delà de cet aspect, explique Lisa Wyler, directrice des relations médias à l'agence, l'idée était aussi d'interpeller les marques. Comment peuvent-elles prendre en compte ce nouveau phénomène, à l'instar, par exemple de Nike, pionnier en la matière ? En quoi le fait que les datasexuels soient aussi des influenceurs est-il important ? »

Suivez dans Mon Stratégies les thématiques associées.

Vous pouvez sélectionner un tag en cliquant sur le drapeau.