Dossier
Une évolution positive en valeur brute, mais une baisse des volumes et un retrait sensible des annonceurs en fin d’année, le marché publicitaire en 2012 a pâti de l'actualité politique et surtout d'un contexte économique difficile.

Une stabillité en trompe-l'œil. En 2012, les investissements publicitaires bruts plurimédias (voir le tableau) ont affiché, selon Kantar Media, une modeste hausse de 0,9%, à 27,9 milliards d'euros contre +5,2% l'année précédente et +10,2% en 2010. «Un quasi-équilibre, mais en apparence seulement, car en volume, le marché est en baisse, que ce soit pour la télévision, la radio ou la presse", observe Corinne in Albon, directrice marketing de Kantar Media Ad Intelligence.

Pourtant, le premier trimestre avait plutôt bien démarré avec une croissance positive de 3,4%. Mais le mois de mai a marqué une rupture en affichant une baisse de 8,5%. Le contexte économique, les élections présidentielle et législatives ainsi que les longs ponts de ce mois, toujours préjudiciables à la publicité, expliquent ce coup de frein. Un petit frémissement s'est fait toutefois sentir pendant la période estivale avec les événements sportifs, notamment les Jeux olympiques de Londres. Mais ce fut de courte durée. Dès la rentrée et à la surprise générale, le marché se repliait à nouveau, avec une baisse de 4,3% en septembre. Le dernier trimestre entamant une période de stagnation qui perdure depuis.

Cette morosité générale se retrouve au niveau du nombre d'annonceurs enregistrés l'an passé (38 342). Il est quasiment stable, à +0,7%, après pourtant une hausse de 4,7% au premier trimestre. Pour rappel, en 2008 le marché en comptait près de 39 000. Les 100 premiers annonceurs, qui représentent 40% du total des investissements publicitaires, ont vu leurs dépenses croître de 1,4%, un peu mieux donc que l'ensemble du marché. Comme l'an dernier, parmi les dix plus gros investisseurs, cinq ont accru leurs dépenses et parfois de façon significatives, mais autant ont réduit la voilure (lire pages 35 à 37).

Dans ce peloton de tête, seuls Renault, indéboulonnable premier de la classe, et Univeler, 8e annonceur français, maintiennent leur position. Tous les autres changent de rang. Il y a ceux qui montent en grade, comme Peugeot, qui passe de la 4e à la 2e place avec une forte croissance de ses investissements, Citroën de la 6e à la 5e, E.Leclerc de la 7e à la 6e et surtout Mondelez (ex-Kraft Foods), qui fait une entrée remarquée dans le Top 10 en passant de la 18e à la 9e place. Et il y a ceux qui retrogradent, tels Orange de la 2e à la 3e place, Carrefour de la 3e à la 4e, SFR de la 5e à la 7e et Bouygues Telecom de la 9e à la 10e. Procter & Gamble (10e en 2011) ne fait plus partie du groupe de tête.

Au global, la légère surperformance du Top 100 est pour l'essentiel due au secteur de l'automobile, dont les investissements ont crû l'an dernier de 5%. Des efforts budgétaires au deux tiers consentis pour les lancements de nouveaux modèles. Renault, Peugeot et Citroën affichent ainsi des hausses respectives de 4,6%, 12,5% et 6%. Volkswagen et, certes à une autre échelle, Hyundai et Kia ont fait, eux, carrément des bonds positifs respectifs de 20,4%, 189,1% et 17,4%.

Les annonceurs de la mode ont aussi, en partie, contribué à cette bonne tenue du marché, avec une hausse de 10,1% de leurs investissements médias, passant ainsi de la 10e à la 8e place du classement des dix premiers secteurs annonceurs. Ainsi, La Redoute et surtout le site de chaussures et vêtements Zalando enregistrent des croissances vertigineuses: +62,9% pour le premier et +126,1% pour le second. Autre secteur dynamique, certes plus marginal en termes de poids global, le luxe (+3,6%), comme en témoigne Chanel Parfums (+17,4%) ou Cartier (+175%).

Du côté de la distribution, de loin toujours le premier secteur investisseur en France, le bilan est plus mitigé (+2,6%). Si les enseignes spécialisées ont beaucoup investi, surtout à la télévision, tel Ikea (+44,6%), les distributeurs généralistes en revanche ont revu leurs budgets publicitaires à la baisse, le leader Carrefour en tête (–8,4%). Mais le tableau est à nuancer. En effet, la distribution a investi massivement dans d'autres médias, non couverts par l'étude de Kantar Media, comme le courrier ou Internet via l'achat de mots clés sur Google, par exemple. «Pour 2013, nous mettons en place une nouvelle valorisation du média courrier avec France Pub», précise à ce sujet Corinne in Albon. 

Certains secteurs se sont en revanche désengagés en 2012, parfois fortement. A commencer par les établissements financiers (–7,6%). Les assureurs ont été les premiers à se replier, ce dès le début de l'année. En mai, c'était au tour des banques de désinvestir, avec toutefois des positions très disparates selon les acteurs: Crédit agricole et Société générale, par exemple, augmentaient leurs dépenses pendant que le CIC ou La Banque postale levaient le pied. Les annonceurs de ce marché ont privilégié la communication sur l'épargne, qui a crû de 49%, représentant 12% des dépenses publicitaires totales des banques.

Dans les télécoms, le bilan est plus tranché. Avec une baisse de 5,1% du secteur, les opérateurs ont concentré l'an passé l'essentiel de leur force sur le marché de la téléphonie mobile, devenu très concurrentiel avec l'arrivée de Free Mobile. A noter que Free Telecom est le seul des principaux acteurs du marché à avoir augmenté ses dépenses (+7,9%). Les forfaits mobiles ont bénéficié d'une hausse d'investissements de l'ordre de 2,8% alors que la communication sur les box, la convergence ou les offres multiplay ont fait l'objet d'un net repli de la part des opérateurs (–18,4%), surtout chez SFR, dont les dépenses globales en 2012 ont chuté de 5,2%.

Des volumes globalement en baisse

Sur le front des médias, la télévision reste dominante et progresse en valeur brute (+4,5%),  totalisant 9,8 milliards d'euros d'investissements publicitaires. Les chaînes de la TNT (+13,7%) représentent désormais 30% des recettes brutes du média. Elles ont bénéficié notamment des investissements de la distribution, de l'alimentation et du secteur culture-loisirs. Boostée par l'automobile, la radio tire également son épingle du jeu (+3,7%), avec près de 4,3 milliards d'euros bruts. Le display, quant à lui, croît de +3,3%, à près de 3 milliards d'euros bruts avec plus de 4 650 annonceurs actifs, en baisse de 2,2%. En revanche, la presse a décroché, avec une évolution négative de 2,7%, même si la presse féminine et les news magazines résistent mieux. La publicité extérieure est en recul de 6,6%. Cette dernière a surtout pâti du repli des secteurs des télécoms, de la distribution ou de la banque-assurance. A noter que le cinéma est stable à +0,3%.

Mais les volumes, eux, sont résolument orientés à la baisse. Ainsi, la durée publicitaire à la télévision et à la radio est en retrait et le volume de pagination en presse également. Seules les chaînes de la TNT poursuivent leur développement et enregistrent à nouveau la plus forte évolution en valeur avec +13,7%, contre +1% pour les chaînes historiques, dont les annonceurs sont cependant toujours aussi nombreux à communiquer (+1,6%). Les quotidiens gratuits d'information et les quotidiens régionaux progressent aussi en valeur.

Quant à l'année 2013, elle ne se présente pas sous de meilleures auspices. Omnicom Media Group annonçait, début février, une baisse de 1,8% de l'activité publicitaire en 2013 en France, avec pour seuls foyers de résistance le mobile et Internet. De son côté, Kantar Media a enregistré pour le mois de janvier 2013 une baisse des investissements média bruts de 1,9%. Seule la radio est épargnée en valeur (+8,5%) comme en volume (+4%) grâce à la distribution (+12,7%) et aux services (+52,8%). Le display est stable (-0,2%) avec un fort désengagement du secteur automobile compensé par la distribution  et les établissements financiers. En revanche, exception faite  des quotidiens nationaux (+7,5% en valeur) grâce aux télécoms, la presse est en repli (-4,7% en valeur et -13,3% en volume), tout comme la télévision (-1,3% en valeur et -8,7% en volume), surtout les chaînes thématiques.  Même constat sur la publicité extérieure (-10,3% de recettes brutes) et le cinéma (-21,5%). Au total six secteurs annonceurs se sont désengagés en janvier sur les 10 premiers du classement, notamment l'automobile (-45 millions d'euros ) et l'alimentaire (-24,5 millions bruts).

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