Dossier événementiel
Le marché des agences événementielles est devenu encore plus concurrentiel, alors que les budgets moyens sont en baisse. Un des espoirs du secteur réside dans les opérations qui mêlent production de contenus et d’événements.

En ce début de printemps 2013, la communication événementielle est dans une situation paradoxale. Elle n'a sans doute jamais intéressé autant d'agences, toutes spécialités confondues, et pourtant son potentiel se contracte. « En France, la communication événementielle n'est pas un marché de croissance, mais de bataille », explique Julien Carette, président de Havas Events. De fait, sur ce marché, les compétitions sont quasi permanentes, les annonceurs recourant très peu aux contrats annuels. 


Peu ou prou, le marché français de la communication événementielle est estimé à environ 15% des dépenses hors média des annonceurs, soit un chiffre d'affaires global aux alentours de 2,5 milliards d'euros [CONFIRMATION FRANCEPUB EN ATTENTE] pour l'année 2012. La dernière étude en date de l'Anaé (Association des agences de communication événementielle) avait établi les chiffres d'affaires des années 2009 et 2010 à quelque 2,02 milliards d'euros (lire Stratégies n°1666 du 16/2/2012), soit une chute de 13,5% par rapport à l'année 2008. « Depuis 2010, il n'y a pas de décrue forte, assure Franck Louvrier, président de l'agence Publicis Events. En outre, le modèle du low cost a pénétré l'activité événementielle, sous l'influence des directions des achats. »


Même si elle souffre moins que d'autres disciplines de la communication, sa santé n'est pas étincelante. « Le marché de l'événementiel se porte moyennement bien, constate Julien Carette. On observe une réduction de l'activité en valeur, mais pas en volume. » La diminution n'est pas négligeable. « En valeur, tous les budgets ont baissé de 10% à 30%, relève Cyril Giorgini, PDG d'Auditoire (groupe TBWA). Les annonceurs nous demandent de faire mieux avec moins. » Ce phénomène fait penser aux difficultés rencontrées lors de l'année 2009. « Depuis lors, nous ne sommes jamais revenus aux niveaux d'avant la crise, explique Cyril Giorgini. L'automobile et les télécoms, par exemple, étaient deux secteurs très importants de l'événementiel, mais ils ont réduit la voilure. »

 

Ces considérations financières se reflètent dans la ventilation des opérations. « Le marché est resté stable pour les petites et moyennes opérations (de 200 000 euros à un million d'euros), mais les très gros événements (budget de plus de 5 millions d'euros) ont tendance à se raréfier », indique Cyril Giorgini.

 

Ces changements de marché entraînent évidemment des répercussions sur les agences. Parmi les conséquences négatives, leurs effectifs ont été réduits et leurs marges brutes dégradées. « Il faut adapter la taille des agences, car les investissements dans l'événementiel sont certes réels, mais moins importants qu'auparavant », constate Franck Louvrier.


Toutes n'y parviennent pas. Dans les derniers jours de janvier, La Washing a cessé ses activités, six ans après sa création sous le nom de La Washing machine. « Les agences de taille moyenne, celles qui réalisent une marge brute de 2 millions à 5 millions d'euros, souffrent beaucoup, déplore Cyril Giorgini. La chute du marché les a obligées à courir après les appels d'offres, sans pouvoir se projeter dans l'avenir grâce à des alliances ou des partenariats technologiques. » D'autres ont connu meilleur destin. Au mois d'octobre 2012, l'agence Denis & Co a été acquise par le groupe de communication Australie.

 

Dans un tel contexte, quels sont aujourd'hui les principaux acteurs du marché ? Pour les uns, le « big four » caracole en tête de l'événementiel. « Le marché est structuré autour de quatre grandes agences : Auditoire, Le Public Système, Publicis Events et nous-mêmes, Havas Events », affirme Julien Carette. Pour les autres, le marché s'est plutôt fragmenté sous l'influence des bouleversements qu'il a subis. « La crise a atomisé le leadership des grosses agences et elle a fait naître une multitude de petites entités », avance Cyril Giorgini.

 

Enfin, sur ce marché qu'ils jugent très fragmenté, certains considérent toutefois que le territoire de la communication événementielle s'est étendu. « La fragmentation du marché résulte de la sortie de l'événementiel de ses frontières, qui ne sont plus étanches, estime Frédéric Bedin, président du directoire du groupe Public Système Hopscotch. Autrefois, l'événementiel était le show-business appliqué à l'entreprise ; désormais, l'événementiel a découvert qu'il était aussi du "brand content". Le marché de la communication événementielle avoisine donc plutôt les 8 milliards d'euros, car il inclut le brand content, le mécénat et le sponsoring, entre autres. »

 

En 2012, le Public Système a acquis Brand Side Story, une agence de... « brand content », dans le prolongement d'autres rachats (l'agence interactive Heaven, l'agence de relations publiques Hopscotch etc.). Une stratégie de diversification que ne partagent pas tous ses concurrents. « La crise amène certains agences non spécialisées dans le domaine à vouloir faire de l'événementiel, mais la crise nous enseigne aussi qu'il faut se recentrer sur son cœur de métier, souligne Franck Louvrier. C'est une des ambiguïtés du contexte actuel. C'est aussi une erreur stratégique de vouloir tout faire, car on exerce alors moins bien son activité principale. »

 

La montée en puissance des technologies numériques et leur adoption par le grand public a contribué à l'émergence d'un nouveau genre de campagne. « Des opérations hybrides voient le jour, note Julien Carette. Elles mêlent RP, interactivité, événementiel et divertissement. Ce marché de l'expérientiel revêt un modèle économique fragile, car le retour sur investissement de ce genre d'opérations est très difficile à évaluer. » A la limite, la réussite de ces événements « 2.0 » ne se joue pas lors de la tenue de ceux-ci, mais dans les retombées médiatiques et sur les réseaux sociaux. Le public présent devient alors un prétexte. « Sur ce nouveau créneau, on ne sait pas encore qui va s'imposer, car tous les types d'agences (brand content, digital, publicité, etc.) le convoitent, considère Julien Carette. Aucune agence n'est pour l'instant parfaitement au point. Les agences événementielles ont cependant un atout, celui de la maîtrise du contact avec les gens. »

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