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L'ESPAGNE CONTRE-ATTAQUE
28/03/2003Face à une concurrence moins chère sur le créneau « soleil et plage », la nouvelle campagne pour le tourisme en Espagne tourne le dos de manière spectaculaire aux canons du genre, avec un message élitiste et décalé pour attirer une clientèle choisie.
Une pub pour des vacances en Espagne dont la vedette ne serait ni une plage avec parasols ni des monuments inondés de lumière, et qui renoncerait aux couleurs chaudes de l'été et de la fête ? C'est le pari de Turespaña, l'organe de promotion du tourisme espagnol, décidé à jouer la rupture d'image pour accompagner sa nouvelle stratégie marketing : diversification de l'offre au-delà de la plage et diversification de la clientèle vers le haut de gamme.
À la place des traditionnelles cartes postales, vingt-quatre portraits d'un noir et blanc élégant, souvent sombres, réalisés par le photographe de mode barcelonais Jose Manuel Ferrater. Des images un brin provocantes : gros plans d'une lèvre ornée d'un « piercing », d'orteils meurtris, d'une fesse d'homme que laisse entrevoir un jean déchiré... Chacune illustre un thème (gastronomie, tourisme vert, golf, séjour linguistique, année Dali, etc.) par l'empreinte laissée sur le corps du modèle/touriste. Le soleil et la plage n'ont pas été oubliés, mais sont seulement suggérés par une marque de bronzage laissée par un string, au bas du dos d'une élégante en robe de soirée... Le slogan, dans les treize langues de diffusion, veut intriguer : « Touché par l'Espagne », « Spain marks ». Comprenez : vous reviendrez transformé par la richesse de l'expérience.
« Nous voulions surprendre »,résume German Porras, directeur de Turespaña. Surprendre pour endiguer d'urgence une dérive inquiétante : en 2002, les recettes du tourisme ont baissé de 3,5 % malgré un nombre de visiteurs en hausse de 3,3 %. Ainsi l'adepte de la bronzette, qui était déjà économe, dépense encore moins.« Si nous ne pouvons plus accroître de beaucoup le nombre de visiteurs, nous devons faire en sorte que les gens qui viennent aient un pouvoir d'achat plus important. Bref, faire le pari du tourisme de qualité »,affirme Luis Solero, directeur créatif de la campagne chez Publicis Espagne.
Dans le secteur, numéro deux mondial (derrière la France en nombre d'entrées et les États-Unis en recettes) et premier employeur du pays, l'heure est à la contre-offensive, après des années de croissance facile. Car la concurrence est devenue forte sur le marché européen du « soleil et plage ». Turquie, Bulgarie, Croatie prennent des parts de marché, surtout auprès de la clientèle la plus sensible aux prix. Les Allemands, notamment, victimes d'une économie poussive, délaissent l'Espagne en nombre pour se rendre, par la route, sur les côtes de l'Adriatique.
« Il faut répondre à cette concurrence avec une stratégie produit. Nous ne pouvons pas nous battre seulement sur le prix, car les coûts seront toujours plus faibles en Bulgarie ou en Turquie,analyse German Porras.Nous mettons en avant la qualité des infrastructures, des services, des transports, des installations sanitaires, etc. »Sans pouvoir effacer toutefois les stigmates du tourisme de masse, visibles sur la Costa del Sol et la Costa Brava. Un point douloureux ravivé par la campagne croate, qui vante « La Méditerranée telle qu'elle était avant ».
En revanche, avec son patrimoine historique et naturel, sa culture et son style de vie, l'Espagne dispose d'une véritable « réserve de qualité » encore sous-exploitée.« Nous représentons 37 % du tourisme de " soleil et plage " européen et seulement 8 % du tourisme culturel »,déplore German Porras.
Il faut enfin diversifier la provenance des touristes qui, actuellement, viennent à 91 % d'Europe. D'où une offensive publicitaire en Amérique du Nord, Amérique latine et Asie-Pacifique, qui se traduit par un budget record de 38 millions d'euros pour 2003, en hausse de 65 %.