Le basculement vers le tout numérique guette la presse papier. 20 Minutes, leader des gratuits d’information, multiplie les innovations pour rester dans la course.

20 Minutes sera-t-il le premier des quotidiens gratuits à sauter le pas ? En suspendant l’édition papier du mardi depuis la mi-janvier, le leader de cette famille – en nombre d’exemplaires, audience et chiffre d’affaires publicitaires – ouvre une brèche vers ce basculement numérique qui semble guetter la presse à terme. Certes, la mesure vise avant tout à réduire les coûts, la filiale commune des groupes Schibsted et Sipa Ouest-France – seul acteur à l’équilibre sur ce marché – évitant ainsi d’éditer un journal le jour où les annonceurs sont moins présents sur le papier. Mais « cela n’aurait pas été possible sans avoir atteint une maturité sur le numérique », prévient Olivier Bonsart, le président et directeur de la publication.

De fait, le titre a multiplié les initiatives pour conquérir les internautes à partir de 2007, année durant laquelle « les actionnaires de Schibsted ont eu l’idée d’une plateforme, adoptant une logique d’information en continu et non d’un simple site miroir du papier », souligne le dirigeant. Une première. Après avoir rendez-vous le matin avec le journal, la communauté de lecteurs (à 80% connectée) est dorénavant tenue informée tout au long de la journée quel que soit le support.

Et 20 Minutes continue sur sa lancée en misant plus que jamais sur des innovations technologiques et éditoriales. Fin 2014, le média a inauguré une nouvelle appli pour Ipad avec une interface personnalisable inédite chez un éditeur, l’internaute pouvant y intégrer ses sites favoris et ses comptes des réseaux sociaux aux côtés du flux d’actualité. Un mois auparavant, la rédaction, commune au web et au papier, lançait « la 21e Minute », un module d’informations approfondies et multimédias, avec des dossiers sur les condamnés à tort ou la sexualité des Français. En octobre, l’éditeur avait déjà repensé le site, avec une maquette plus aérée et illustrée, des contenus adaptés à la localisation de l’internaute et une place plus grande donnée aux commentaires. Et veillé à mieux intégrer la publicité sur le mobile, avec notamment une « bannière newsfeed » disposée dans le flux et activable par l’internaute. « Il faut éviter les publicités multiples et intrusives qui font fuir le lecteur, estime Renaud Grand-Clément, directeur général adjoint en charge des revenus. Un discours compris et adopté par les annonceurs. »

Autant d’initiatives qui ont permis au titre de conserver sa place de numéro deux du marché, derrière Le Figaro mais devant Le Monde, avec plus de 15,7 millions de lecteurs (source One Global, janvier 2015) répartis de manière équitable entre utilisateurs numériques (49%) et lecteurs exclusifs print (51%). Selon l’OJD, le site a enregistré entre 18,8 et 30 millions de visites mensuelles en 2014, le site hybride entre 5,4 et 13 millions, et l’appli entre 0,92 et 1,09 million de visiteurs chaque mois. 

Seul bémol, les revenus publicitaires issus du numérique ne représentent que 17% du chiffre d’affaires. Mais « il faudrait les situer plutôt à 30/35%, précise Renaud Grand-Clément, car le choix des annonceurs se fait dans une complémentarité papier-numérique. Sans ce dernier, le papier serait balayé. » De quoi condamner, à terme, le rendez-vous imprimé du matin ? « Si on l’arrête, ce sera la décision des annonceurs et des lecteurs », avance le président. Avec ses 4 millions de lecteurs par jour, cela ne semble pas encore d’actualité. 

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