Risques
Sites frauduleux, contexte d’exposition peu valorisant, inventaires fantômes… Certains usages, amplifiés par l’avènement du RTB, ont de quoi effrayer les annonceurs. Mais des solutions voient le jour.

Les risques liés au RTB sont la bête noire du marché de la publicité en ligne. En janvier 2015, lors d’un débat du Petit Club sur « la junk pub », organisé en partenariat avec le SRI, Laurent Laforest, directeur digital Europe de L’Oréal Luxe, revenait sur la peur légitime des annonceurs en matière de brand safety. Et de raconter qu’un parfum du groupe s’était retrouvé, en ligne, sur la même page qu’un produit pour incontinence. C’était avant l’avènement du programmatique, qui n’a rien pour rassurer les marques. En achetant une audience qualifiée et non plus un support, comment garantir que leurs publicités ne finissent pas sur un site tendancieux ou peu qualitatif ? Voire inexistant. Une autre pratique a en effet de quoi inquiéter les annonceurs : la fraude ou la vente d’inventaires commercialisés sur de faux sites, ou générés par des robots singeant l’activité humaine et s’invitant chez les éditeurs. Ces pratiques de triche ont toujours existé, mais ont pris de l’ampleur avec l’avènement du RTB. Elles sont favorisées par certains prestataires peu scrupuleux proposant des solutions « black box » sans accès du client à la liste des URL de diffusion.

Jusqu’à présent, la solution la plus répandue pour se prémunir contre ce risque consistait à établir une « liste noire » des sites indésirables (black list) et une « liste blanche » (white list), regroupant ceux que l’on souhaitait privilégier. Mais dans bien des cas, ce n’est pas une solution suffisante, le problème se situant au niveau de l’impression et non pas du site. Ces listes ont par ailleurs tendance à tout mettre dans le même sac lorsqu’un site a priori « valable » achète par accident du trafic frauduleux, sans savoir si une partie des impressions est malgré tout acceptable.

« Il est clair que le recours à la seule sélection site par site ne peut pas suffire à satisfaire les exigences des annonceurs en matière de protection de leurs marques », reconnaît Sylvain Deffay, directeur général du bureau français du trading desk Infectious Media. Même son de cloche du côté de Videology. « Les méthodes basées sur les cookies et les noms de domaine ne fournissent pas de résultats pour les impressions individuelles, explique Anne de Kerckhove, managing director EMEA de cette plateforme de technologie publicitaire vidéo. Or la fraude représente 23 % de la publicité vidéo. »

La technologie en renfort

Conscient des enjeux, le marché se mobilise de toutes parts. Le 23 mars dernier, à l’initiative du ministère de la Culture et de la Communication, les professionnels de la publicité et des médias (IAB, UDA, SRI, Udecam, Alpa…) sont partis en guerre contre les sites pirates en signant une Charte des bonnes pratiques dans la publicité pour le respect du droit d’auteur.

Question programmatique, c’est la technologie qui est appelée en renfort. L’an dernier, Audience Square a montré l’exemple en développant, en partenariat avec la société AlephD, une solution programmatique permettant d’isoler les comportements suspects issus de l’activité des robots. Depuis deux ans, la plupart des gros acteurs du marché s’efforcent toutefois de faire le ménage dans leurs inventaires. À commencer par AppNexus. Véritable géant du secteur, qui pèse près de 40 % de l’inventaire programmatique en France, la plateforme de trading a décidé de prendre le problème à bras-le-corps en lançant récemment, avec plusieurs partenaires (DoubleVerify, Integral Ad Science, Microsoft, PubMatic et Xaxis), un programme de certification. Baptisé Certified Supply Program, il permet d’éliminer les impressions dont la validité ne peut être vérifiée. Si une bannière frauduleuse est détectée après coup par ce programme, AppNexus s’engage à ne pas la facturer. Les technologies de DoubleVerify et Intregral Ad Science (spécialistes de la mesure de la visibilité et de la détection de bannières frauduleuses) seront utilisées pour détecter et bannir le trafic non humain sur l’ensemble de l’inventaire d’AppNexus. L’inventaire « humain » obtiendra alors le label Certified Supply Program. D’autres solutions comme Adledge, Adloox ou ComScore permettent également de garantir pleinement la diffusion des campagnes. Dernier en date : l’initiative de Videology, qui a annoncé, en mai, un partenariat mondial avec White Ops, pionnier américain dans la détection de la fraude publicitaire, pour lutter contre les impressions générées et vues par des robots. Leur technologie les identifie la première fois qu’ils apparaissent, les reconnaît dans les médias et les différencie du trafic humain.

Au gré de leurs besoins, les annonceurs ont donc à disposition un panel de technologies. Mais selon Laurence Milhau, directrice de la programmatic business unit chez Group M, « la solution la plus évidente pour s’en prémunir tient du bon sens : c’est de ne pas acheter à l’aveugle, c’est-à-dire sans connaître les URL des éditeurs commercialisant leur inventaire ». Une réflexion qui s’accompagne d’une recommandation adressée aux annonceurs : « Formez-vous au programmatique pour être pilote de votre stratégie et ne pas dépendre de la seule expertise de vos prestataires ».

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