Les participants aux événements professionnels se déplacent avant tout pour «networker». Certains organisateurs l'ont compris. Ils nous livrent leurs recettes pour organiser un réseautage.

Le temps c’est de l’argent. Pour les professionnels, la formule n’a jamais été aussi fondée qu’en ces temps de crise et de pression maximale. Dans ce contexte, les conférences d’affaires ne doivent plus simplement inspirer en attirant des intervenants de renom, mais miser sur la rencontre, le relationnel. «C’est une des grandes tendances du secteur, explique Cyril Giorgini, le président d’Auditoire. Autrefois, une conférence, c’était 80% de contenu et 20% de networking. Aujourd’hui, cela peut aller jusqu’à plus de 50 % de mise en relation organisée.»

Le réseautage prend des formes variées qui dépassent le traditionnel cocktail ou café de bienvenue. Il était l’un des atouts mis en avant par le tout nouveau «salon du luxe» organisé avant l’été à la Maison de la Chimie par le Journal du Luxe. Outre une soirée baptisée «networking» avec ses démonstrations et ses buffets favorisant les échanges, il proposait l’application Swapcard, lancée en 2014 pour créer et échanger les cartes de visite numériques. De quoi accéder à la liste des participants en amont de la manifestation, leur adresser un message et les rencontrer sur place. Le networking est aussi le point fort du C2 Montréal, une conférence d’affaires sur l’innovation qui a fait appel à E-180. La start-up utilise des algorithmes et les principes des applications de rencontre amoureuse, type Tinder, pour favoriser le réseautage et la prise de rendez-vous.

Confiance réciproque

Parfois, l’événement n’est qu’un des points phares d’un dispositif plus global visant à faire vivre une communauté. Le networking est alors aux premières loges. C’est le cas des Napoléons, une conférence sur la création et l’innovation dans la communication lancée en 2015. Deux fois l’an, sur trois jours, elle propose des rencontres dans des cadres non conventionnels: Val d’Isère en janvier dernier et le théâtre antique d’Arles en juillet. La cible: des top managers venant d’univers variés (publicité, design, marketing, production, médias, technos, telco…). «Nous nous définissons plus comme un réseau que comme un événement», expliquent ses fondateurs, les publicitaires Mondher Abdennadher (ex-Carat) et Olivier Mouliérac (ex-Euro RSCG C & O) à l’origine de Momentum, un concepteur d’événement B to B. À côté du «réseau physique», soit les deux grands sommets annuels des Napoléons, un réseau social en ligne, baptisé «Innovative Communications Academy» accélère les rencontres et échanges de son millier de membres toute l’année.

Cette extension du domaine de l’événement est aussi à l’œuvre au Web 2 Connect. Convaincu avant l’heure que ce que recherchent les professionnels, c’est avant tout de pouvoir efficacement réseauter, Jean-François Ruiz, formateur, consultant et organisateur d’événements explique avoir volontairement pris dès 2007 «le contre-pied du marché» en lançant un rendez-vous pour les professionnels du digital au nom évocateur: le Web 2 Connect. «La majorité de notre millier de visiteurs s’inscrivent sans que nous ayons établi le moindre programme», assure-t-il. La martingale? L’événement s’appuie sur la forte communauté d’internautes, acteurs du web participatif, adeptes du blog webdeux.info. «Ils ont confiance en nous et réciproquement.» Ainsi, le programme s’invente au fur et à mesure, en coconstruction avec les premiers inscrits, qui influencent le choix des sujets et bénéficient d’une carotte sous la forme d’un rabais sur l’inscription (les premiers inscrits paient 200 euros contre 500 pour les inscrits de dernière minute).

Opportunités business

Pendant les trois jours de l’événement, pas de conférences trop institutionnelles ou commerciales mais des contenus qui se veulent concrets et immédiatement applicables. «Contrairement à d’autres, l’esprit de nos speakers issus du web 2.0, c’est d’être dans le partage des bonnes pratiques plus que dans l’autopromo», glisse Jean-François Ruiz. Le tout dans une ambiance conviviale organisée (bar à oxygène, concours photos décalés, séance de yoga…). Et cerise sur le gâteau du networking : des tee-shirts blancs floqués des nom, fonction et entreprise de chacun, pour que start-uppers, blogueurs, journalistes, investisseurs, info-preneurs, salariés d’agences ou annonceurs sachent en un coup d’œil à qui ils s’adressent. «Chacun repart avec une quarantaine de contacts ciblés qui sont autant d’opportunités business», assure Jean-François Ruiz.

Si les participants sont en attente de contacts business, les partenaires et autres sponsors recherchent, eux aussi, un public de choix. Les salons traditionnels ont de plus en plus de mal à leur en offrir. Leurs allées sont, en effet, souvent plus fréquentées par des étudiants et retraités que par des décideurs en quête d’objectifs business précis. Résultat, les exposants trouvent rarement de retour sur investissement. Pour attirer les «decisions makers» d’entreprise, Hervé Bloch a fondé en 2013 la franchise Les Big Boss en misant lui aussi sur le networking. Son événement professionnel réunit des décideurs (2/3 des participants) et des prestataires (1/3) deux fois l’an: mi-décembre à la montagne et mi-juin au bord de la mer. De quoi créer des liens sur des pistes de ski ou les pieds dans l’eau. Ainsi, du 12 au 14 juin, deux avions ont été affrétés pour emmener en Grèce, près d’Olympie, une cinquantaine de prestataires et 170 dirigeants, parmi lesquels Thierry Petit (Showroomprivé), Valérie Dassier (Comptoir des cotonniers et Princesse Tam Tam) et Tanguy Favennec (Air France).

Comedy club

Au programme, des séances de travail bien structurées. Sur la première journée par exemple, un speed-dating affinitaire propose à chaque big boss de choisir de rencontrer dix prestataires de son choix. Des concours de présentation décalés en deux minutes chrono sont proposés. Mot d’ordre: du fun. Beaucoup. On y aperçoit entre autres des dirigeants se produisant en concert le soir (big boss band), ou d’autres qui s’inventent une éphémère carrière dans le stand-up (big boss comedy club) et même des décideurs transformés en marathoniens pour de mini-olympiades. «Les dirigeants aussi sont dans de meilleures dispositions pour faire du business quand ils sont dans une atmosphère conviviale et un décorum festif, affirme-t-il. La relation prestataire-client est d’abord une rencontre humaine.»

Un discours reçu 5/5 par les sponsors appelés à financer l’événement (de 16 000 à 30 000 euros pour des présentations supplémentaires en plénière). 240 000 euros de business ont ainsi été générés en moyenne par prestataire lors de l’édition summer 2014. Sans compter le business généré hors événement. «Le networking s’organise tout au long de l’année pour animer notre communauté», insiste Hervé Bloch. Page Facebook, fil Twitter mais aussi soirées parisiennes tous les trois mois entre les événements. De quoi soigner son ROI comme son retour sur émotion (ROE).

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