Réalité virtuelle
Les premiers casques de réalité virtuelle commencent à faire sensation. Fictions, jeux vidéo, brand content... Studios de production, marques et agences de communication affûtent leurs armes.

Casque Oculus autour de la tête, assis sur un siège vibrant avec le souffle froid d'une turbine d’air, on dévale les pentes en ski, suspendu au bord d’un ravin à pic, accompagné... des Lapins crétins. Si le spectacle est de courte durée, il est d'une rare intensité, avec parfois une sensation de haut-le-cœur. Le prototype de «ride» (balade virtuelle) Lapins crétins, dévoilé par Ubisoft au salon E3 à Los Angeles, en juin dernier, a fait sensation. Et a donné un aperçu du potentiel de la réalité virtuelle dans les jeux vidéo.

Cette technique en plein essor plonge l'utilisateur dans un monde virtuel qu'il balaie du regard, et dans lequel il peut se déplacer et interagir, comme dans un jeu vidéo. Ultra-immersif, cette expérience permet d'explorer depuis sa chaise des mondes inaccessibles, des villes éloignées ou de voler comme un oiseau. Au-delà des jeux vidéo, les premiers projets de marques émergent. Pour l’instant, il s’agit surtout de publicités ou de brand content diffusés sur des casques Oculus lors d'opérations événementielles. «Avec la réalité virtuelle, on crée des contenus qui font entrer dans l’univers d’une marque. Le spectateur aura l’impression d’avoir vécu cette scène», précise Antoine Cayrol, cofondateur d’Okio Studio. Un label spécialisé dans la réalité virtuelle destinée aux marques, créé en début d’année par Fat Cat Films (Première heure) et les Studios Bagel (Canal+).

Plongée en carton

Pour la soirée des 30 ans de Canal+, des casques diffusaient quatre courts métrages où on pouvait s’immerger dans une émission, avec un présentateur à ses côtés. Autre exemple, pour dépoussiérer son image, l’Union des industries et métiers de la métallurgie a fait le tour des salons de recrutement avec son clip immersif: «Dans un “ride”, une balade où on se laisse porter par l’histoire, on montait tour à tour dans une voiture de course, un bateau, un avion, puis dans l’espace. Cela permet d’intéresser les jeunes aux métiers de l’IUMM», décrit Frédéric Lecompte, cofondateur de Backlight studio à l'initiative du projet.

Seulement voilà, ces casques de réalité virtuelle, sur lesquels planchent Oculus (racheté par Facebook), Samsung, Microsoft, Sony et HTC, ne seront pas lancés avant mi-2016. Pour au minimum 400 euros. «A moins que certains constructeurs ne les proposent en bundle [vente couplée], par exemple Sony, qui pourrait vendre son casque Playstation VR avec sa console de jeux», estime Antoine Cayrol. Dans l’immédiat, les Google Cardboards pourraient s'imposer auprès du quidam. Ces petits casques en carton, à monter soi-même, sont compatibles avec tout smartphone, et permettent de lire des contenus en réalité virtuelle. «Google a sorti You Tube 360, qui permet à toute marque d’y poster ses contenus immersifs, puis des logiciels, pour monter des vidéos immersives tournées avec des caméras Go Pro. C’est une vraie démocratisation du concept», salue Guillaume de Cartigny, head of creative technology chez Publicis Conseil.

Précurseur, Kellogg’s a glissé, en Nouvelle-Zélande, des lunettes Cardboards dans ses paquets de céréales Nutri-Grain. Une application mobile permet au client d’accéder à des contenus à 360 degrés, des expériences extrêmes, comme du vélo en haute montagne. Demain, aura-t-on un Cardboard qui permettra d’accéder à une publicité à 360 degrés à partir d’un QR code apposé sur l’emballage? «Nous travaillons pour la fin de l’année sur du brand content immersif pour des marques agroalimentaires. On peut tout à fait imaginer des contenus de ce type dans des plantations de cacaoyers pour une marque de chocolat», estime Guillaume de Cartigny. 

En fiction et dans les médias, des projets ambitieux fleurissent aussi (lire l'encadré). La plateforme Vice crée des reportages immersifs. En décembre dernier, lors de la marche de soutien à Eric Garner, un père de famille noir tué en juillet 2014 par un policier à New York, un reportage tourné avec une caméra 360° était retransmis directement au public via l'application mobile VRSE (sur Iphone et Android). En France, Arte sortira début 2016 avec Okio Studio Philip and I, la première fiction française pour masque de réalité virtuelle, destinée à rendre hommage au romancier américain Philip K. Dick. Budget global: 400 000 euros. «Dans cette fiction, on est dans la tête d'un robot humanoïde donnant une certaine vision de l’intelligence artificielle, explique Gilles Freissinier, à la direction du développement numérique d’Arte. La réalité virtuelle permet d’innover dans la narration, le spectateur peut pénétrer directement dans l’événement.» La chaîne concentrera, en 2016, tous ses contenus en réalité virtuelle sur une appli, Arte 360.

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